Chapitre 18

31 3 0
                                    


"I get mystified by how this city screams your name"

Cornelia Street - Taylor Swift

Gabriel

Chanson Bonus : Colors, Halsey

Ma vie à cet instant ressemble à ce silence assourdissant qu'il y a après avoir écouté ta chanson préférée en boucle. La même sensation de vide. J'aurais pu la laisser en boucle jusqu'à m'endormir. J'aurais pu. À la place, j'ai éteint mon téléphone et j'ai tenté de dormir alors qu'elle passait encore dans ma tête.

C'est comme ça que je ressens le moment présent. Luc et moi venons de nous échanger notre premier baiser. Nous sommes tous les deux sobres et nous ne pouvons pas nier ce qu'il s'est passé. Même s' il m'avait dit que cela ne signifiait rien, il y a toujours une part de vérité dans une plaisanterie. J'aurais pu garder ce souvenir dans un coffre rangé dans ma mémoire et le regarder une fois de temps en temps pour ne pas le diluer. À la place, je casse la magie en voulant poser des mots sur des actions qui ne peuvent être décrites.

Je marche un mètre derrière Luc alors qu'il fend la foule pour trouver un stand de boissons. Il en repère un et commande un café au caramel et un à la vanille. Comme d'habitude, je goûte les deux et il prend celui que j'aime le moins. Il m'a toujours forcé à faire ça. Cette habitude remonte à la maternelle, quand je préférais le goût de son jus de fruit plutôt que le mien. De toute façon, il est bien moins difficile que moi d'un point de vue alimentaire. Je ne pense même pas pouvoir citer un seul aliment qu'il n'aime pas, sauf peut-être le champagne, si tant est qu'on considère ça comme un aliment.

Je n'aime pas celui à la vanille, alors je choisis l'autre. J'aurais ma dose de caramel pour un moment, entre ça et la pomme d'amour, mon sang doit être à moitié caramélisé. J'ai réservé un train qui part dans trois heures, on arrivera à Paris dans la nuit. En attendant, on préfère se balader dans le parc avant d'aller vers la gare. Luc est venu sans affaires, il est habillé avec des vêtements de Jeremiah. Il les lui rendra ou les enverra par la poste plus tard.

Le rouge et le bleu dominent partout dans ce parc. Les néons teintent même la peau de Luc. On erre sans but un peu partout avec le sentiment d'être à nouveau des enfants. Luc voit des auto-tamponneuses et me force à faire un tour avec lui. Des mini-voitures multicolores et sans roues sont alignées. Je saute dans l'une d'entre elles de couleur rouge. Luc me poursuit partout dans la sienne et quand je pense qu'il va me tamponner, il saute hors de sa voiture, monte dans la mienne et je redémarre en vitesse. Le vrai jeu commence enfin. Il tient le volant d'une main et parfois, il le tourne d'un coup pour foncer dans une autre voiture. Dès que notre voiture entre en collision avec une autre, nous sommes projetés l'un contre l'autre en riant. Le temps d'une partie, on oublie tous nos problèmes et nos rancœurs pour juste se concentrer sur ce qui compte vraiment.

— Merde, dis-je quand je regarde mon téléphone. Le train part dans une heure. Il va falloir qu'on court si on veut l'avoir.

Luc attrape ma main et part comme une fusée. Son sens de l'orientation hors pair va nous permettre d'y aller sans se perdre. Même en ayant été à Londres une ou deux fois, il sait exactement où se trouve la gare.

On se retrouve donc à courir aussi vite que si nous étions poursuivis. Le plus étrange, c'est ce contact physique spontané qui ne m'aurait pas étonné si on ne s'était pas embrassé plus tôt dans la soirée.

J'ai beau essayer de toute mon âme de ne pas résumer toute ma vie à ce baiser, je n'y arrive pas. La moindre chose est chassée de mes pensées par cette euphorie.

Burning RedOù les histoires vivent. Découvrez maintenant