Chapitre 42

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"I think I've seen this film before and I didn't like the ending"

Exile - Taylor Swift ft. Bon Iver

Luc

Gabriel m'assène un coup sec afin que je lâche sa main et pars en courant dans le couloir qui mène à la porte de sortie. Je reste figé, je ne cours pas après lui. La vérité, c'est que même si je le rattrape, je n'ai rien à lui dire. Il a raison sur tout, je ne peux pas lui dire que je n'ai rien fait avec Lana, sinon retour à la situation initiale : il ne partira pas à New York.

Là au moins, après le dégoût que j'ai repéré dans ses yeux, je suis certain qu'il voudra être le plus loin possible de moi, quitte à changer de continent s'il le faut.

— Il vient de se passer quoi là ? s'exclame Lana. Tu es censé me dire quoi, Lucian ?

Je reste sans voix, toujours dos à elle, dans le reste de l'odeur de Gaby. Je ne la sentirai peut-être plus jamais. Mon Dieu, j'ai vraiment tout foutu en l'air ! Je ne pensais pas que ça me fasse mal à ce point, j'ai l'impression que je vais mourir. Je n'exagère pas, je sens mon corps sombrer dans un néant sans fin.

— Luc, je t'ai posé une question !

Sa voix me ramène à la réalité, à l'odeur envolée, au cœur de Gabriel meurtri et à mes mains recouvertes de son sang. Je me sens tomber, c'est le cas puisque mes genoux heurtent littéralement le sol. Je ne m'étais pas rendu compte que tout mon corps tremblait de cette façon.

Ma cage thoracique devient étroite et je me sens oppressée dans mon propre corps. Je n'arrive plus à respirer et mon cœur s'arrête de battre un instant avant de se mettre à tambouriner violemment dans ma poitrine. Lana me ramène à la réalité quand elle pose ses mains sur mes épaules et s'accroupit près de moi. Elle pose alors ses mains froides sur mes joues et plonge son regard dans le mien pour tenter de comprendre.

Elle fronce les sourcils, tentant de mettre en ordre tous les indices qu'elle a déjà eus. Me rendant compte que je ne verrai plus jamais des yeux du même bleu unique de Gabriel, je fonds en larmes.

Je pense qu'elle commence à comprendre. La colère monte doucement en elle, elle m'attrape brutalement par le bras pour m'aider à me relever, puis elle me traîne férocement jusque dans la chambre d'Amy dans laquelle nous étions avec Gabriel quelques instants plus tôt.

— Dis-moi maintenant que j'ai tort, que ce n'est pas ce que je pense.

Je rassemble toutes mes forces restantes pour affronter son regard. Je me sens pathétique, le dos courbé, les joues mouillées de mon erreur et les poumons refusant de respirer.

— Il faudrait d'abord que tu me dises à quoi tu penses.

— Oh non, Luc, ne joue pas à ce petit jeu avec moi ! Ne me prends pas de haut avec ton sarcasme ! Tu sais très bien que je parle de Gabriel ! Est-ce que tu l'aimes ?

Ses yeux s'embuent de larmes. Elle se sent trahie et je ressens de la honte pour lui faire ressentir ça. Maintenant que je suis au pied du mur, je ne peux qu'assumer et libérer ma conscience de ce poids. Au moins, je n'aurais plus ça comme un boulet à ma cheville, mais il a été remplacé par un boulet encore plus grand, celui de l'absence de l'homme que j'aime.

— Je l'aime plus que tout, et maintenant, il me déteste.

— Il a raison, tu es la personne la plus mauvaise que j'ai rencontrée dans ma vie. Je te déteste aussi. D'ailleurs, on devrait peut-être monter un hate club, lui et moi ! Je n'en reviens pas ! Comment j'ai pu etre aussi aveugle ? Tout était en face de moi depuis le début ! Les regards, les vacances, la façon que vous avez de vous toucher. Ou plutôt de ne pas vous toucher. Tu évitais presque son contact comme la peste quand vous étiez en public, comme si tu cherchais à cacher le fait que tu mourrais d'envie de l'avoir près de toi.

— Je suis désolé de t'avoir mise au milieu de tout ça.

— Tu ne m'as pas brisé le cœur, je ne t'aime pas assez pour t'autoriser à le briser.

— Et je n'ai pas la prétention de dire que je l'ai brisé.

— Très bien, maintenant, tu dégages de chez moi et je ne veux plus jamais te revoir.

— Encore désolé, Lana, m'appitoyé-je.

— Désolé ? Il fallait y penser avant. Je t'ai dit de te barrer d'ici, je n'étais pas assez clair ?

Je ne proteste pas et me lève. Je déambule dans le couloir, slalomant entre les gens et m'arrête quelques secondes devant l'encadrement de porte du salon. Le chien que Gaby caressait est toujours là, endormi.

Je continue ma route et descends les escaliers avant de rentrer chez moi. Je suis vide de larmes et d'émotions. Je marche comme un robot jusqu'à chez moi, sans réfléchir, sans ressentir l'air sur ma peau ou la moindre émotion. Je rentre dans ma chambre et je sais que je ne trouverai pas le sommeil, alors je m'installe sur le balcon.

Je reste là, sans penser à rien, sans rien ressentir, jusqu'à ce que la nuit laisse place au jour. Je resterai peut-être ici jusqu'à ce que le jour laisse à nouveau place à la nuit.

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