Il fait tiède dans la chambre.Enveloppé dans un immense drap de bain bleu foncé, je me blotti au creux de mon lit nid.
Deux oreillers derrière ma tête, un grand coussin collé à mon dos, un contre ma poitrine, encore un entre mes cuisses.
Je remonte ma couverture lestée.
je peux enfin me laisser aller,Ma respiration s’ apaise.
J’aime l’odeur de ce grand tissu moelleux.
Un mélange de lessive , de savon à la noix de coco puis un parfum indéfinissable. Masculin. Rassurant.En voyant le message d’ alerte, je n’ ai pas réfléchi, j’ ai couru.
Depuis longtemps , je ne vis plus qu’ en pyjama.
Je ne suis pas sortie de ma chambre depuis trois ans.
J’ avais 20 ans.
Je suis allé au-delà de ma panique pour lire le message laconique de Marie Neville.Mon ami Philippe vient chuchoter derrière ma porte, deux fois par semaine.
Au début, il glissait un petit papier sous la porte.
Je suis là.
Il me racontait des histoires, il écrivait ses romans à haute voix.
Petit à petit, j’attendais avec impatience sa venue.Je me laissais aller dans mon lit nid.
Sa voix finissait par m’ apaiser, me bercer,
Il était mon rental brother
Mon frère de location.Je préfère chuchoteur.
Je suis hikikomori. Perdu pour la société. En retrait total dans ma chambre. Seul.
N’ ouvrant à personne, même pas à ma famille, je suis un reclus volontaire.Parfois, il partait en déplacement, pour une dédicace, un voyage d’ exploration. Ses romans se passent toujours à l’ étranger.
D’ habitude, il m’ envoyait des images
Je n’ aime pas écrire, lire. Je préfère les images.
Là, rien depuis des semaines.Un jour, sur le plateau de nourriture que laisse ma mère devant ma porte, il y avait un téléphone.
Avec un groupe enregistré, Ses proches,
Je me suis senti fier d’ être dans ce panel.
IL est mon cordon ombilical, celui qui me relie encore un peu à la vie.Je n’ ai plus de chaussures à ma taille. J’ ai autant grandi en 3 ans?
J’ ai voulu prendre le bus.
J’ ai tenu trois arrêts.
Puis j’ ai couru, couru, couru sous la pluie froide d’automne.Je me focalise sur Philippe.
Il ne peut pas mourir, il ne peut pas mourir…
Je bloque ma respiration, si je bloque un peu ma respiration, je vais contrôler la crise de panique qui monte en moi.
Elle grouille dans mon ventre, me tord les tripes.Je reprends ma course.
Je connais le chemin de l’hôpital. J’y suis allée en consultation après ma dernière année de soin études.Il pleut. Il pleut. Il pleut.
Je le répète en boucle. Sous l’effet de cette litanie, la panique reste tapie au fond de mon ventre.Les passants m’observent, je sens leurs dizaines d’yeux sur mon pyjama, mes chaussons.
Courir, courir, courir.Ne pas laisser les vers de la peur s’entortiller au-delà de mon ventre.
Courir. Courir. 212.
Il y avait écrit 212.Jeune homme, jeune homme, où allez-vous ?
La voix de la femme résonne douloureusement dans mes poumons.
Vite. Vite. Vite.
212. Un abri.Ils sont nombreux.
Ils parlent fort.Au fond de la chambre, un vieil homme brun se tient en silence.
Un grand homme buriné par la vie au grand air.
Il a quelque chose de rassurant.
Je voudrais aller vers lui.
Ils sont si nombreux, ils parlent si fort.
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Sortir
RomanceDepuis trois longues années, Joshua vit cloîtré dans sa chambre, volontairement. Il fait partie des invisibles, des hikikomori. Son rental brother ne peut plus l'accompagner. Un personnage inattendu, Alfred, va lui permettre d'ouvrir son cœur...