Sortir

La terrasse

La chaise racle le sol.
Tactac....
J'ai oublié.... Ce matin je suis allé au marché...

Je sursaute. Il est là, on doit être samedi.
Il fait déjà sombre.
J'ai joué toute la nuit à un jeu de course de voiture.
Je me réveille.

Il y avait bien du monde et pas grand chose dans les paniers. 4 euros le kilo de pommes, ca fait cher la tarte! Heureusement, j' ai mon verger, et mes poules.

Tiens, il doit habiter à la campagne.

On a bu un canon au bistrot avec les copains.
Une bière, avec l' hiver qui arrive, ce sera bientôt du vin chaud. Un bon moment de rigolade.

Scrach...scrach... les pages du journal tournent.

Oh ! Debleu!!! Le Jacques Bordaz est mort!!!!

Un grand silence.
Ça a l'air de le rendre triste.
C'était qui ce Jacques Bordaz?

Debleu!!! On parlait de lui tout à l' heure au troquet...
.........

On le trouvait absent.... On est de la même année.
A courir la montagne ensemble, à user nos fonds de culotte sur les bancs de l'école, on a même fait l'armée ensemble , dans le Génie...du côté de Toulouse...on s'est un peu perdu de vue quand il est parti fonctionnaire de la Poste, à Paris. Il revenait un peu pour les vacances, et puis à la retraite.
On est de 47.

Je calcule rapidement. J' ai un cerveau calculette. Depuis toujours.
77 ans. Je ne le pensais pas si vieux.

Une maladie du cœur... bah...ca allait pas trop fort après la mort de sa Jacqueline... ça les faisait rire de s' appeler pareil...une bretonne...
Ça se fait bien maintenant les remerciements pour les soignants... Tiens, on avait le même docteur. Le Firmin. Y en a qui l' aime pas trop, vu qu'il est gay,pffff...des cons...et le Nathan comme kiné, tu sais celui qui nous a ramener de l' hôpital l' autre jour.

Je serre la grande serviette bleu. Je mets un nom, un métier sur le géant. Je croyais qu'il faisait du rugby...

Le Nathan, je le connais bien, c' est avec lui que j'ai rencontré Philippe.
Voyons voir...

Je n' en saurai pas plus...
Il décortique cet avis de décès mots à mots. J' ai droit à la liste complète de la parentèle.

Y se sont pas moqués de lui dans l' avis.
Y disent aussi sa médaille du courage. Il a sauvé un gamin qu' était tombé dans l' Arve.

Voyons voir...
Ah... ah... comment je vais faire?

Comment il va faire quoi?

Parce que, tu vois....

Je ricane...je ne vois rien. Les rideaux sont tirés , la lumière éteinte.

Façon de parler. Ta mère m' a montré ta fenêtre avec les volets clos.
Parce que, tu entends... ca me fait bizarre de dire comme ca... tu entends : les funérailles auront lieu à l'église du village mardi à quatorze heures. Après, y aura un canon au café, histoire de se rappeler notre amitié.
Il faut accompagner proprement les morts à leurs dernières demeures.

Je me souviens de l' enterrement de mes grands-parents.
Quelques froides poignées de main et chacun repartait dans sa voiture. Les paternels. Ma mère n' a pas de père et ne veut pas entendre parler de sa mère.

Bon...bon ...on fait comment?
On va pas finir avant les dix sept heures... ça fera trop tard pour venir ici après...j' aime pas bien conduire la nuit
Je pourrais y venir le matin?
Si ça te convient, tu tapes le mur.
Si ça te convient...
Le jeune docteur y parle ainsi. Si ça vous convient...si vous êtes d' accord...on cherche une solution ensemble...
Moi, j' aime bien...