Chapitre 5 - Amour immortel.

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Yumes, en pointant du doigt le paillasson : « Soulève ça, il y a une clé en dessous ».

Moi, m'agenouillant vers le sol : « Quoi ? Tu te crois dans un film, je rêve ! Qui fait ce genre de chose ? »

Lui, grommelant : « Commence pas à saouler ».

Moi, en marmonnant : « Il faut vraiment être timbré pour laisser ça là.. »

Je lui tends la clé qui était cachée sous le petit paillasson. Il se penche vers l'avant et l'insère dans la serrure de la porte abîmée. Il pousse la porte d'un coup sec ce qui laisse la vue sur un petit couloir partiellement éclairé. Il s'avance, en déplaçant son fauteuil par la force de ses bras. Je ne bouge pas, j'étais complètement immobile. Je ne savais pas ce que je devais faire, enfin, je crois qu'inconsciemment, je dessinais des limites invisibles. Certes, je voulais m'assurer de son bien-être, mais je ne voulais pas pour autant m'immiscer vulgairement dans sa vie. Ce n'était pas correct. Ça ne me ressemblait pas.

Lui, en criant au loin dans la pièce : « Alors, tu rentres ? »

Moi, me sortant de mes pensées : « Euh.. Oui, j'arrive ».

Je passe un pied dans le petit appartement et referme soigneusement la porte derrière moi. Au moment où je m'apprêtais à retirer mes chaussures, il me devance et me coupe.

Lui : « Ne retire pas tes chaussures, de toute manière, il faut que je nettoie ».

Je m'arrête donc dans mon action et repose mon pied sur le sol. Je m'avance vers l'endroit où sa voix se faisait entendre. Ma timidité semblait ressortir enfin, j'étais simplement embarrassée. Découvrir l'endroit où il vivait relevait de l'ordre de l'intime. Le fait qu'il me laisse entrer signifiait d'une certaine manière que ma présence ne le dérangeait pas autant. Une part au fond de moi ne pouvait s'empêcher de penser que je n'avais pas ma place ici. Il avait allumé chacune des lumières, ce qui laissait place à chaque détail de l'appartement. Les lieux étaient très petits, mais suffisant pour une seule personne. J'en déduisais qu'il vivait seul, puisque chaque objet semblait lui appartenir. Un sac de sport près du canapé, des casquettes accrochées sur une des chaises de la table à manger. Une tonne de paires de chaussures dans le couloir à l'entrée. Je m'approche vers le salon dans lequel il se trouvait. La décoration était simpliste, du noir et blanc, quelque chose d'efficace, je dirais. Chaque chose était mise à sa place, bien qu'on voie qu'il n'était pas maniaque, j'étais surprise de voir que l'ensemble était plutôt bien agencé et entretenu.

Lui : « Il faut que j'ouvre les fenêtres, ça pue le mort ici ».

Moi, à voix basse : « Une vraie fée du logis.. »

Lui, me toisant du regard : « Excuse-moi d'être propre, c'est vrai que ce n'est pas quelque chose de commun chez toi ».

Je laisse échapper un sourire. Sa repartie m'amusait tant, j'avais l'impression de me voir face à Lounès, lui qui aime tant me taquiner.
Je ne dis rien et m'avance près de la fenêtre puis l'ouvre en grand. Bien que son quartier laisse à désirer, la vue était plutôt agréable. Enfin moi qui aime tant l'horizon et les maisons illuminées dans la ville, j'étais servie. Le vent s'étale sur mon visage, je respire l'air frais qui entre peu à peu dans l'appartement.

Moi : « Ça va être difficile de ranger maintenant que tu es en fauteuil ».

Lui, soupirant : « Hum. »

Moi : « Si tu veux, je peux passer après les cours pour ranger ».

Lui : « D'où vient cet élan de propreté ? »

Moi, levant les yeux au ciel : « Ah Ah très drôle ! Je passerai, je pourrai faire les courses aussi ».

Lui : « Tout ça pour que je devienne ton ami, ou bien ? »

Moi, souriant : « Non, rappelle-toi, je suis déjà ta cousine ».

Il soupire en me dévisageant.

Moi : « Passe-moi ton téléphone, j'enregistre mon numéro ».

Il ne dit rien et m'indique de la tête la table basse. Je prends son téléphone et rentre mon numéro.

Je me retourne vers lui.  Il était sorti de son fauteuil et c'était assis sur le canapé, un paquet de cigarette à la main.

Moi, le visage tendu : « Tu fumes ? »

Lui, posant la cigarette dans le coin de sa bouche : « Ouais ».

Je ne peux pas me contrôler, mon visage affiche directement une mine dégoûtée. Il avait littéralement a mes yeux, un poison entre les mains.

Lui, ouvrant son briquet : « Quoi ? Tu vas pas nous la jouer moralisatrice ». Il inspire un bon coup et souffle la fumée devant lui.

Moi, blasée : «  T'as raison, j'ai pas le temps pour ça. Mais ce n'est pas comme si t'avais frôlé la mort il y a deux mois, tu joues avec le feu sans mauvais jeu de mot ».

Lui : « Ah parce que t'insinue que je vais en mourir ? Arrête un peu ton baratin, c'est pas ça qui va me tuer, regarde », il tire fièrement sur son pull avec sa main. « Accident de voiture, toujours vivant. Rien ne peut m'atteindre, j'ai la vie devant moi et je suis surtout pas prêt à me tailler de là, j'ai des choses à régler. Après ça, je partirai en paix ».

J'étais abasourdie. Comment pouvait-il avoir autant confiance, comment pouvait-il être sûr que sa vie soit aussi longue. Et puis son misérable discours sur la cigarette, il parlait sans savoir. Il ouvrait mes plaies entrouvertes.

Moi, perdant patience : « Non, mais tu t'entends ? Et après, tu oses venir me rabâcher que t'es plus grand que moi ! Tu n'as même pas conscience des bêtises que tu dis, c'est ça la maturité ? ».

Lui, ricanant : « Et voilà, elle recommence son monologue. Tu vas me traiter de quoi aujourd'hui, hein ? »

Moi, agacée : « T'es vraiment débile, je crois que c'est mieux que je rentre avant que je dise des choses que je regrette ».

Je lui jette son téléphone à la figure et pars vers le chemin du couloir.

Lui, me hurlant sarcastiquement : « Eh ben, elle a durée longtemps ton amitié ! »

Je ne dis rien et me contente de soupirer face à ces absurdités. Je pars en claquant la porte. Je préférais partir avant que ça dégénère. Il abordait un sujet beaucoup trop sensible pour moi. Ça pouvait paraître ridicule, mais je n'étais pas prête à entendre ça. Les larmes commencent à monter. Mon père n'a pas eu la vie devant lui, et j'aurais juré qu'il aurait arrêté de fumer s'il avait su ce que ça lui coûterait.

Mais il est trop tard, maintenant.

Ezia - L'âme de mes larmes.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant