Chapitre 5

961 69 4
                                    


Nous nous observons encore un moment en silence, j'ignore ce qu'il attend de moi, peut-être une coutume dont je ne suis pas au courant ? 

_ Tu sais... Je n'arriverais pas à me relever toute seule, avoué-je avec un sourire gêné. 

Sa queue s'avance lentement et vient s'enrouler autour de mon bras puis je suis tirée vers le haut comme si je ne pesais rien. Je lâche un gémissement et sa queue me relâche pour passer sous mon haut, il relève le tissu et affiche mon hématome qui va mettre un sacré bout de temps à disparaître. Mon ventre et une partie de mon soutien-gorge sont exposés, je chasse sa queue du revers de ma main. 

_ Hey, ce n'est pas très poli ça. Tu te balades peut-être tout nu mais ce n'est pas mon cas, le grondé-je. 

Il penche sa tête sur le côté, ses longues tresses suivent le mouvement et mes jambes se font guimauve sous ce regard scrutateur. S'il continue de me regarder ainsi, je vais faire une combustion spontanée. Ma gorge est serrée, je suis face à un alien gigantesque et je ne sais que dire, de plus il n'a pas l'air d'être très loquace non plus. Mon flanc me lance toujours autant, je dois mettre de la glace dessus. 

_ Suis moi... Enfin... Euh... Si tu en as envie, balbutié-je. 

Putain je me fais honte moi-même. Il n'y a pas si longtemps, j'étais une star, mon documentaire a connu beaucoup de succès dans de nombreux pays et maintenant je bégaie maladroitement. Je lui tourne le dos et prends la direction de la porte qui donne accès à la partie habitation du chalet avec des gestes mesurés pour ne pas réveiller plus de douleur. Je n'entends aucun son derrière moi et je pense qu'il est resté sur place mais lorsque je jette un œil par-dessus mon épaule je suis stupéfaite de voir qu'il me suit et de très près. Il se déplace sans bruit malgré sa taille imposante, c'est un véritable prédateur. Je tente d'ignorer cette présence menaçante dans mon dos et j'entre enfin dans mon salon, le soleil levant illumine la pièce par les larges baies vitrées qui donnent sur la prairie. Dans la cuisine attenante, j'ouvre la porte du réfrigérateur et attrape un sac de petits pois surgelés que je pose délicatement sur mes côtes, puis je me retourne et m'appuie contre le plan de travail. Il est si silencieux que j'en ai oublié sa présence mais lorsque je me rappelle qu'il est là, je rencontre une paire de prunelles reptiliennes écarlates, il observe avec attention le sac de petits pois. J'ai l'impression qu'il veut poser une question mais qu'il se retient, c'est un soldat, il masque bien ses pensées mais pas de chance pour lui, je suis très sensible aux émotions des autres. 

_ Le froid ralentit la progression de l'hématome et apaise la douleur, expliqué-je sans qu'il ne demande. 

_ "Hématome" ? Répète-t-il avec son accent alien. 

Je soulève mon débardeur et lui montre la marque bleutée causée par le choc avec le mur. 

_ Ça s'appelle un hématome. La peau des humains marque lorsqu'elle reçoit un choc trop important. 

Il semble réfléchir intensément, ses sourcils dépourvus de pilosité sont percés avec des piercings de formes variées dont le métal est noir et brillant. Bordel, il m'a fait manger un mur de toutes ses forces et je continue avec ma curiosité morbide. 

_ Vous êtes faibles, finit-il par lâcher. 

Je ne sais pas si c'est un simple constat ou une insulte mais je ne peux retenir ma répartie cinglante. 

_ Peut-être mais est-ce que quelqu'un de ton espèce aurait pu te sauver ? Te réparer comme si tu n'avais pas été coupé en deux il y a quelques jours à peine ?! 

Sans en avoir conscience j'ai fait un pas vers lui et très peu d'espace nous sépare désormais, je pointe un doigt accusateur vers la cicatrice rosée qui jure avec ses écailles noires. L'éclat de ses prunelles écarlates change. Est-ce que je viens de provoquer un alien de six mètres de long ? Il semblerait que oui. 

Venimus : an alien romanceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant