Venimus : an alien romance

Chapitre 50

J'entame miraculeusement mon sixième mois de grossesse et même si j'adore inconditionellement mon bébé, ce n'est tout de même pas une partie de plaisir. Je suis sous perfusion et alitée une bonne partie de la journée. C'est incroyable que j'arrive à faire une petite balade quotidienne toute seule pour m'aérer et garder un semblant de forme physique. Même si ça ne plait pas à mon docteur, je ne lui ai pas laissé le choix en le menaçant de le tuer de mes propres mains si je ne pouvais pas avoir un moment pour moi à l'extérieur de ma maison. Mon état a empiré malgré nos efforts et je sais que ce n'est pas uniquement de la faute de l'hybride alien que je porte en mon sein. J'ai puisé dans mes ressources pour dépasser la perte de mon compagnon et sa trahison mais plus le terme approche et plus mes instincts d'Union me poussent à le retrouver, la douleur au niveau de ma marque est devenue plus importante que celle de mon corps qui se plie en quatre pour faire grandir un foetus bien trop gros et puissant pour moi.  

_ Tu as des idées de prénoms ? Demande Allan alors que nous partageons un repas sur le mange-debout de la cuisine.

_ Non ... Je ne me vois pas lui donner un prénom humain alors qu'il n'y ressemble en rien. Et je n'ai pas passé assez de temps avec les Venimus pour avoir des idées qui me plaisent, lâché-je sans émotion.

_ Pourtant il faudra bien lui en trouver un, il nous reste peu de temps avant son arrivée.

J'abat ma fourchette sur mon assiette ce qui produit un grincement insupportable. Allan à un mouvement de recul alors que j'ai toujours mon regard plongé dans mon assiette à moitié vide.

_ Je m'étais toujours dit que ce serait Nox qui choisirait le prénom, sifflé-je tout en étouffant un sanglot. C'est ... C'est au-dessus de mes forces ...

Si mes hormones ne m'avaient pas trop bousculées jusqu'à maintenant, ces derniers temps je suis affreusement lunatique et colérique. Parce que je lutte contre la douleur et mon instinct, je suis constamment en conflit avec mon corps. Parce qu'au fond de moi je sais pertinemment que je suis incapable de faire cela sans lui, j'ai besoin de sa présence, qu'il me transmette sa force, qu'il m'encourage et qu'il me tienne la main. Je ne veux pas faire ça avec un semi-inconnu pour lequel je n'ai aucune affection ou empathie.

_ Je vais mourir ... Éclaté-je en sanglot alors que mon visage plonge dans mes mains.

Je sens le médecin se rapprocher et poser une main sur mon épaule tremblante.

_ Non, je ne laisserais pas ça arriver Callysta, dit-il avec confiance.

Quel crétin. Comment peut-il comprendre alors que moi je le ressens au plus profond de mes tripes. La science et la médecine que j'ai toujours admiré ne me sauveront pas cette fois. C'est au-delà des lois de ce monde, Iemnaïll a bénie notre Union et elle ne tolèrera pas que cet enfant de sang royal naisse sans père. Elle prendra ma vie pour avoir bafoué son don. Sans un mot je me lève et je ne répond même pas à la remarque stupide d'Allan. Je crois que les humains m'insupportent encore plus qu'avant. Leur orgueil, leur condescendance, leur besoin de prendre ce qu'ils veulent quand ils veulent. Certes il n'est pas le pire de sa race et il a fait beaucoup pour moi ces dernières semaines mais ce n'est pas un acte de pure bonté, il me veut et il espère que je cède avec le temps.

_ Où vas-tu ?

_ Prendre l'air, j'étouffe.

Mes mains soutiennent mon ventre qui donne l'impression que j'attend des jumeaux, je saisis mon manteau trois fois trop grand pour moi et je passe la baie vitrée. La neige est bien installée et je ne me lasse pas de voir la prairie et la foret couvertes de blanc. Je m'installe sur un fauteuil en rotin et j'observe la condensation échapper de ma bouche quand je respire. M'émerveiller de choses simples me permet d'oublier un peu ma situation, ma peine et ma colère. J'inspire l'odeur particulière des pins et de la neige qui est un mélange agréable même si le froid me brule les narines. Je caresse la marque à la base de mon cou même si ça ne soulage pas la brulure qu'elle me procure depuis six mois.