Après le départ anticipé de Marlon, nous sommes retournés à nos travaux. Le bruit de ma machine à coudres résonne dans l'atelier.
Stephan, le regard plongé dans le vide, semble absorbé par ses pensées.
- Tu sais Sophie, il n'était pas comme cela avant, enfin, pas à ce point-là. Sa voix trahit une certaine inquiétude et une pointe de tristesse. Je le connais depuis des années maintenant. Je ne l'ai jamais vu aussi acharné sur quelqu'un.
- Je te crois. Mais parfois, les émotions prennent le dessus, et on dit des choses que l'on ne pense pas vraiment. Lui répondis-je, essayant de dissiper la tension.
Il hoche la tête, mais ses yeux reflètent encore une préoccupation profonde. Il s'approche de l'établi où je travaille et s'assoit près de moi en laissant échapper un soupir.
- Faire face à la jalousie est compliqué. Surtout lorsqu'elle n'émane de personne que l'on apprécie.
Je prends une pause dans mon travail et me tourne vers lui.
- Tu sembles connaître quelque chose à ce sujet.
Stephan sourit légèrement, presque mélancoliquement.
- Qui n'a pas été touché par la jalousie à un moment où un autre ? Mais Marlon, c'est différent. Il a grandi sous les projecteurs de l'admiration de sa mère, et maintenant... il se sent menacé par l'attention qu'elle porte à ton travail. Il se sens rabaissé et doit toujours donner plus. Il a peur de décevoir les personnes qu'il aime. Il travaille dur pour être où il en ai.
Ses paroles résonnent en moi.
- J'essaie simplement de faire ce que j'aime, de mettre tout mon cœur dans mon art. Je n'ai jamais voulu causer de problèmes entre eux deux bien au contraire. J'ai essayé de m'éloigner d'elle de peur de dire où de faire quelque chose de mal contre lui.
Stephan pose sa main sur mon épaule.
- Tu n'as rien fait de mal. Parfois juste notre présence peut déclencher des sentiments que les autres ont du mal à gérer. C'est leur lutte intérieure qu'ils doivent combattre. Ta créativité n'a pas pour but de blesser qui que ce soit bien au contraire. Ce que tu crées, c'est magnifique et cela devrait être célébré, même si ça suscite des émotions complexes pour certains.
- Merci Stephan, cela signifie beaucoup pour moi.
Un silence contemplatif s'installe entre nous car ni l'un ni l'autre ne sais plus quoi dire. Puis, la sonnerie du téléphone de Stephan retentit, brisant ce silence gênant. Il décroche et entame une conversation rapide et discrète, hochant par moment la tête.
- Je dois y aller, un imprévu. Cela ne te dérange pas si je te laisse seule ?
- Non bien sûr, vas-y. Je gère comme d'habitude. On se voit plus tard lui répondis-je en souriant pour le rassurer.
Il rassemble ses affaires et quitte l'atelier, me laissant seule dans mes pensées. Après quelques minutes de réflexions, je reprends mon travail. Je laisse mes mains créer, déplacer, façonner les tissus, mais mon esprit reste accroché à cette confrontation tendue, encore une parmi les autres.
Des heures passent, et le soleil commence à décliner, jetant des reflets orangés à travers les fenêtres de l'atelier. Lorsque Stephan revient, son expression semble plus légère, moins chargée d'inquiétude. Il s'assoit à côté de moi, observant mon travail avec intérêt.
- Est-ce que ça va ? Lui demandais-je curieusement.
- Oui, prendre l'air m'a fait du bien.
Il pose un sac en papier sur la table, souriant d'un air mystérieux.
- J'ai pensé que tu pourrais avoir besoin d'une pause-café, te connaissant, tu as dû te replonger dans le travail et ne pas penser à manger ce midi.
Je m'arrête de coudre, surprise par cette proposition. Les heures passées à travailler m'avaient fait oublier la faim et la fatigue.
- Eh bien oui, tu commences à me connaitre.
- Ne t'inquiète pas, je suis comme toi plaisante-t-il.
- C'est bon à savoir.
Nous nous installons un peu plus loin et prenons ce que Stephan a rapporté, un cappuccino pour moi et un latte macchiato pour lui avec chacun un fondant au chocolat.
- Le chocolat est le meilleur remède quand l'on n'est pas bien dit-il en rigolant.
- Merci, c'est vraiment gentil de ta part de me proposer cette pause, dis-je en prenant une gorgée de mon nectar.
Il sourit, un sourire sincère qui semble dissiper les traces de cette tension que Marlon avait laissé.
- Pas de problème, parfois, il est bon de prendre du recul et de se rappeler qu'il y a autre chose que le travail et les conflits.
Nous discutons de sujets légers, échangeant des anecdotes sur nos vies, nos passions et nos rêves. Le temps s'écoule paisiblement, et je réalise à quel point j'avais besoin de cette pause. Cette pause inattendue, offerte par mon collègue avait apporté un répit bienvenu. Finalement, nous retournons à nos travaux, presque une heure plus tard mais, cette fois avec un nouvel état d'esprit. Stephan semble plus détendu, et moi aussi.
Parfois, il faut une pause courte où pour apaiser les esprits et retrouver son équilibre. Et dans ces moments précieux, il est important d'avoir des personnes comme Stephan, qui comprennent le besoin de prendre du recul et offre un soutien inattendu. Il ne faut surtout pas rester seul et garder cela au fond de soi-même.
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Tu es ma haine
RomanceSophie une étudiante en stylisme va gagné le concours que son école organise. Elle va devoir créer pour Marlon un mannequin de renommé. Celui-ci la déteste sans la connaitre. Il va tout faire pour qu'elle arrête la mode.