-Pourquoi ton écharpe sent le parfum d'un AUTRE mec ?!
Je ne réponds toujours pas. Il attrape fermement mes deux poignets, il les serre très fort et me donne comme une grosse secousse, ce qui provoque un choc de ma tête contre le mur.
-REPONDS PUTAIN !!! C'est l'autre connard là ?!
-Il s'appelle Evan ! C'est mon ami et il m'a offert un cadeau d'anniversaire !
-Et en plus de ça il a mis son parfum dessus !!!
-Mais c'est pas grave !
-C'est avec lui que t'étais pendant quinze minutes hein ?! Pendant que moi je t'attendais dehors comme un chien ! »
Il me met un coup de poing dans le menton, je tombe par terre.
« -T'aurais du refuser son cadeau !!! T'es avec moi, pas avec lui ! Il a mis son parfum dessus ! SON PARFUM ! Tu comprends pas toi hein, tu comprends pas qu'il veut juste coucher avec toi !!!
-C'est pas vrai !
Il me redonne une gifle. Je me relève et rassemble mon courage pour lui dire :
« -Au moins il m'a pas tapé dessus pour me souhaiter mon anniv !
-T'es qu'une sale anorexique ! J'aurais préféré que tu meures de ta maladie ! »
Ses paroles me font vraiment mal au cœur. Pourquoi est-il si dur ?
Je pars en courant et me retrouve sur le palier lorsque Jared m'attrape le bras violement, ça me fait mal mais je n'y prête pas attention.
« -Où tu vas comme ça ?! Tu vas le rejoindre c'est ça ?!
-Je te déteste !!! »
Jamais je n'ai osé dire ça à Jared. Il attrape mes deux poignets, les serre fort tout en me regardant droit dans les yeux, puis soudain il m'éjecte d'une force surprenante et je tombe dans les escaliers. Je dévale ainsi un étage, sans réussir à m'arrêter. Tout cela va si vite, je n'ai pas le temps de réaliser ce qu'il se passe que je me retrouve affalée sur le palier de l'étage d'en dessous. J'entends la porte de chez Jared claquer, et je sens soudainement une intense douleur à la cheville. Je reste donc allongée pendant un moment, en soufflant pour essayer de me détendre et attendre que la douleur passe. Je rassemble mon courage et me lève, mais au moment où j'essaye de poser ma cheville je manque de tomber. J'appelle l'ascenseur et descends en restant sur un pied. Je sors de l'immeuble de Jared à cloche pied et m'assieds sur le rebord de la vitrine du magasin à côté. Je ne peux m'empêcher de me remémorer les paroles dures de Jared. Je crois qu'il ne m'a jamais rien dit d'aussi vexant. Cette journée avait pourtant si bien commencé.
J'hésite à appeler Evan pour qu'il vienne m'aider. Je ne peux pas appeler Loan car il m'a dit qu'il faisait du hand et que c'était aujourd'hui. Je sais que je ne peux pas rentrer chez moi seule. J'appelle finalement Evan. Il décroche rapidement à mon grand soulagement.
« -Brinou ! s'écrie-t-il.
-Evan je...
Ma voix est un peu tremblante, ce qui alerte Evan.
-Pourquoi t'as cette voix ?! ça va pas ???
-Heu en fait tu as dit que si j'avais besoin d'aide je pouvais t'appeler...
-Qu'est-ce qui se passe ? T'es où ?
-Tu peux venir me chercher s'il te plait...
-Oui mais pourquoi ?!
-Je préfère t'expliquer sur place.
-Ok envoie-moi l'adresse par message j'arrive ! Bouge pas je me dépêche ! »
Je lui envoie l'adresse de Jared et j'attends. A ma grande surprise, il arrive en moins de dix minutes. Il est essoufflé. Lorsqu'il voit mon visage, il fronce les sourcils.
« -Ok j'ai compris...
-Nan c'est pas ce que tu crois ! Je suis tombée dans les escaliers et...
-Ouais et Jared t'a pas aidé ?
-Non on s'est un peu disputés juste avant...
-Je vois ça, il s'est bien défoulé on dirait ! dit Evan, énervé.
-Je t'ai appelé car je me suis fait mal à la cheville en tombant...
-On va regarder ça chez moi d'accord ?
Je hoche la tête. Je me lève sur une jambe et m'appuie sur lui pour n'utiliser qu'un pied.
-C'est bon je te porte, dit-il.
-Non je vais me débrouiller comme ça ! C'est pas la peine.
Il ne m'écoute pas et me met sur son dos, donc je m'accroche à lui. Il marche rapidement. On prend un bus, puis on arrive chez lui. Il me pose sur son lit. Il amène de la glace et de la pommade. Il met un peu de glace sur ma joue.
« -Qu'est-ce que tu fais ? je demande.
-T'as la joue rouge et le menton qui commence à être violet. »
Puis il enlève ma chaussure et soulève un peu mon pantalon.
« -Elle est bien gonflée... dit Evan.
Il met de la glace dessus puis vient s'asseoir à côté de moi. Il caresse doucement ma joue, ce qui me fait immédiatement rougir. Il prend ma main et soulève un peu mon pull, laissant ainsi apparaître mes bleus. J'ai un mouvement de recul, mais il ne lâche pas ma main. Je ne le regarde pas mais je sens qu'il me masse le poignet avec de la pommade. Puis il prend ma cheville et me la masse également. Je le regarde, il a l'air concentré.
« -Merci Evan, lui dis-je.
Il lève la tête.
-C'est dégueulasse de te faire ça le jour de ton anniversaire. Quelle pourriture.
-Qui ?
-Fais pas comme si tu comprenais pas de quoi je parle. »
Il y a un petit silence.
« -Il t'a offert un cadeau ? demande-t-il.
-Non...
Evan fait un bandage autour de ma cheville.
-T'as mal autre part ?
-Oui au dos, mais un antidouleur suffira.
-Montre ton dos.
-Nan s'il te plait...
-Me regarde pas comme ça ! Je vais pas te faire de mal.
Il s'approche de moi, se met derrière moi et soulève doucement mon tee-shirt, que je tiens fermement devant.
-Tu as mal en bas à droite nan ?
-Comment tu sais ?
-C'est gonflé par rapport à l'autre côté. Allonge toi sur le ventre.
-Non c'est mort.
-Je te masse juste le bas du dos ! C'est bon fais-moi confiance. »
Fais-moi confiance. Haha ! Il se fourre le doigt dans l'œil. Je me laisse faire malgré tout car j'ai bien mal et ce ne sont pas mes parents qui vont me masser. Je m'allonge sur le ventre, Evan relève mon haut, mais juste assez. Je sens la pommade froide puis ses mains qui me massent. Je ne peux m'empêcher de rougir et d'être un peu gênée, mais Evan masse vraiment bien. Jared m'aurait tuée s'il avait su ça.
Mais après tout, c'est lui qui m'a poussée. Il ne m'a même pas rendu mon écharpe, mon seul cadeau d'anniversaire.
« -Voilà ! dit Evan.
-Merci !
-Je masse bien n'est-ce pas ?
-Bof, y'a mieux ! dis-je en riant.
-Pourquoi refuses-tu d'admettre que c'était le meilleur moment de ta vie ? »
Evan est interrompu par mon téléphone qui sonne pour un nouveau message :
« Papa : Urgence pour l'entreprise. On part à Lyon et on revient dans trois jours. »
-C'est qui ? Demande Evan.
-Mon père.
-Il veut que tu rentres ?
-Non, il m'annonce simplement qu'il part trois jours à Lyon avec ma mère pour leur travail, dis-je avec une pointe d'amertume dans la voix.
-Attends quoi ? Tes deux parents ne sont pas là pour ton anniversaire ?
-C'est pas grave, je comprends. C'est important le travail !
Evidement je ne le pense pas, mais hors de question de montrer ma déception.
-Tu peux rester ici ce soir ! dit-il.
-Ce soir ? Mais demain on a cours !
-C'est pas grave ! Je vais quand même pas te laisser seule pour ton anniversaire, en plus ma mère est médecin du sport donc elle pourra vérifier ta cheville !
-Mais je ne veux pas déranger ta famille !
-Pff, t'es bête des fois, tu déranges personne t'inquiète pas, je suis sur que mes parents vont t'aimer en plus. Bon viens, on va prendre tes affaires !
-D'accord...
-Tu peux marcher ?
-Bien sur ! dis-je en me levant.
Mais la douleur se fait ressentir lorsque je mets du poids sur mon pied. Je bascule en avant donc Evan me rattrape.
-Euh attends, on a une paire de béquilles qui devraient être à ta taille !
-Mais je ne suis pas blessée ! Protestai-je alors qu'il part déjà.
Il revient avec une paire de béquilles. Je les prends mais pose tout de même le pied. L'appui du pied n'est pas impossible, j'ai simplement besoin de l'alléger un peu. On part et on arrive chez moi. Je prends ce dont j'ai besoin tandis qu'Evan scrute minutieusement mon appartement. Il s'arrête sur une photo. Il me regarde, puis regarde à nouveau la photo. Je m'approche et m'aperçoit qu'il s'agit d'une photo de moi. Avant. En quatrième. Avant que je sombre dans l'anorexie. Avant que je sois avec Jared, ou aux débuts de notre relation. Je devais bien faire... au moins vingt kilos de plus. Ça fait très bizarre. J'ai envie de lui arracher cette photo des mains et de la balancer, mais à la place je continue de chercher mes affaires. Je joue la carte de l'indifférence. On repart chez lui et à mon grand soulagement, il ne me pose aucune question, on rigole bien.
J'ai une complicité effrayante avec Evan. On ne cesse de rire pour rien, à des blagues qui certainement ne font rire que nous. C'était ce qu'à la base je voulais éviter, mais tant pis. Je me sens bien avec lui.
On se met à table. Ses parents ont l'air très gentils. Ils entament une discussion avec Evan et moi.
« -Alors Ambre ! ça se passe bien au lycée pour toi ?
-Oui, ça va, je réponds timidement.
-Elle est deuxième juste derrière Loan ! s'écrie Evan.
-Ouah ! Impressionnant ! Tu sais que Loan est surdoué mais ses parents et lui-même ne voulaient pas qu'il saute de classe ? dit sa mère.
-J'en ai entendu parler...
-Et sinon, comment est ta famille ?
-Euh... A vrai dire je suis fille et unique !
-Tu as de bonnes relations avec tes parents ?
-Ils sont malheureusement très pris par leur travail et très stressés, mais ça se passe assez bien. »
Nous discutons encore un peu, puis sa mère commence à débarrasser, je veux l'aider mais elle refuse et Evan me force à m'asseoir et l'aide par lui-même. Ils vont dans la cuisine et y restent un bon moment. J'observe chaque détail de la pièce. Puis soudainement les lumières s'éteignent. Pensant que c'est un court circuit, je m'attends à une quelconque réaction du père d'Evan mais il n'en a pas.
« -Joyeux anniversaire.... Joyeux anniversaire... »
Evan et ses parents me chantent joyeux anniversaire. Je me retourne et vois Evan qui tient un gâteau avec des bougies dessus.
C'est impossible. Tout ça ne peut pas être pour moi !
Je ne me souviens même pas vraiment de la dernière fois que cette chanson m'était destinée. Pour mes dix ans il me semble ; quand j'avais fêté mon anniversaire et que j'avais invité Romain, car il habitait à Paris. Six années que l'on ne me l'avait pas chanté, en m'amenant un gâteau avec des bougies.
Une douce chaleur se fait ressentir dans mon ventre et dans mon cœur, et une vague d'émotion s'empare de moi. Je suis plongée dans une sorte de joie mêlée à de la surprise. Je ne peux m'empêcher de sourire et mon cœur bât rapidement, tandis qu'Evan me lance un grand sourire derrière ce gâteau. Je mets mes deux mains devant ma bouche tant je suis surprise. Evan pose le gâteau devant moi, sur la table. La chanson se termine, donc je souffle mes bougies. Ils rallument la lumière.
« -Merci... réussis-je à articuler. Comment avez-vous su ?
-Evan m'a dit que c'était ton anniversaire au téléphone, et que ta pâtisserie préférée était le fraisier, alors en rentrant j'en ai acheté un ! dit la mère d'Evan.
-Mais c'est trop gentil... C'était pas la peine... ça coute cher en plus !
-Tais-toi ! on le mange maintenant, dit Evan. »
Je le regarde, il me sourit et me sert. Un jour, nous avons eu un grand débat pour départager entre la forêt noir et le fraisier. Je ne pensais pas qu'Evan s'en souvenait.
On mange donc mon gâteau préféré dans la bonne humeur, avec une sympathique musique de fond que la mère d'Evan, Sylvie, a mise. Elle regarde ma cheville et me dit que ce n'est qu'une entorse bénigne, donc j'aurais besoin d'une seule béquille jusqu'à dimanche et ensuite je pourrai marcher normalement et reprendre le sport avec une atèle de maintien qu'elle me prête.
On discute encore jusqu'à tard, puis je remercie encore les parents d'Evan qui montent à l'étage se coucher et me dirige avec Evan dans sa chambre. On s'assied sur son lit qui est un lit deux places.
« -Merci Evan, c'est vraiment adorable ce que tu as fait pour moi !
-C'est normal, dit-il. Pourquoi tu t'es disputée avec Jared ?
-Eh bien... euh... Il a vu ton écharpe et m'a demandé de qui elle était, mais je ne lui répondais pas donc il me l'a prise et a compris qu'avec la marque ce n'était pas moi qui l'avais achetée vu que je n'achète pas cette marque, il s'est énervé et il a sentit ton parfum et là il était vraiment énervé et m'a fait des reproches, alors sur la colère je suis partie en courant et je suis tombée... désolée j'ai oublié de récupérer l'écharpe... »
J'ai un peu changé la version, effectivement, mais il le fallait bien. Je suis très embarrassée d'avoir laissé l'écharpe là-bas. Je tripote ma bague.
« -C'est pas grave pour l'écharpe, tu la récupèreras !
-Tu sais Evan, dis-je en abaissant la voix, la dernière fois qu'on m'a chanté cette chanson et que j'ai eu un gâteau et des bougies, c'était pour mes dix ans... Et pour ton cadeau c'est pareil. A part des virements sur mon compte de la part de ma tante, je n'ai rien reçu depuis mes dix ans. »
Mon cœur bât rapidement. Je ne sais pas trop ce qui m'a prise de me confier à lui subitement, je fixe ma bague et la tripote.
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"Même les méchants rêvent d'amour."
Teen FictionVoici l'histoire d'Ambre Bourgeois-Ferricelli, seize ans, première scientifique dans un bon lycée parisien, résidant dans le centre de Paris au sein d'une famille riche. Elle excelle en cours, en sport et a même un petit ami. Rien ne semble l'attei...