Chapitre 6-1

6.6K 870 112
                                    




Jude réussit l'exploit de me tirer en arrière tout en tenant toujours Hannah dans ses bras, le tout sans faire bouger ma main d'un millimètre.

— Ne reste pas plantée au milieu du couloir, me réprimanda-t-il dans un chuchotement agacé comme si j'avais dix ans, tout en me foudroyant du regard.

— Quoi, que se passe-t-il ? nous demanda Worth, coupant la répartie bien sentie que je m'apprêtais à lui envoyer dans les dents.

Jude se contenta de lui lancer un regard assassin, en lui faisant signe de se taire. Puis, jetant un coup d'œil dans la cage d'escalier, nous fit signe de continuer à monter. Worth s'apprêtait à répliquer, puis voyant ma tête, s'abstint et suivit le mouvement en silence. Jude nous fit encore grimper deux étages, avant de pousser doucement la porte délabrée avec son dos et de jeter un coup d'œil prudent dans le couloir. La voie étant manifestement libre de tous méchants armés jusqu'aux dents, il continua son mouvement et nous arrivâmes dans ce qui avait jadis été...le sixième et dernier étage de l'immeuble.

Il y régnait une atmosphère délétère et une odeur immonde, mélange subtil de moisissure, d'urine et de fientes d'oiseau. Cet étage ayant été abandonné depuis longtemps, toutes les fenêtres en étaient cassées, laissant s'infiltrer l'eau de pluie qui avait ruisselé partout, imbibant la moquette et la faisant pourrir.

— C'est quoi votre plan, bird-man...nous asphyxier ? attaqua Worth, dès la porte palière refermée.

— Pas besoin de moi pour ça ! Vous vous en êtes déjà très bien sorti tous seuls. Vous empestez tous à quinze mètres, répliqua Jude, le nez exagérément plissé en signe de dégout et un sourire retors étirant ses lèvres.

— Non mais c'est fini tous les deux ! m'écriai-je excédée. Vous croyez vraiment que c'est le moment de s'envoyer des vannes ? Vous ferez ça lorsque nous serons tous hors de danger. Non mais je vous jure, ne pus-je m'empêcher de marmonner, tellement j'étais énervée.

Ils me jetèrent tous les deux un regard hostile tellement ils étaient remontés l'un contre l'autre. Quoique celui de Worth, était au final plus gêné qu'agressif.

— La porte de l'appartement a été forcée, expliquai-je finalement à l'inspecteur qui ne devait pas comprendre grand-chose à notre montée précipitée.

— Et vous avez entraîné une blessée grave dans ce cloaque infâme...pourquoi au juste ?

— À votre avis Colombo ? Vous êtes toujours flic ou pas ? Vous auriez préféré que l'on se jette dans la gueule du loup avec deux blessées sur les bras ! Pff...

— Ils sont sûrement partis depuis longtemps. S'ils avaient voulu nous tendre un piège, ils n'auraient pas laissé autant de signes évidents de leur passage, le provoqua l'inspecteur sur un ton de défi.

Effet un peu gâché cependant, par l'effort de plus en plus évident, qu'il devait faire pour porter Cassie et qui lui donnait le souffle court.

— Parce que vous croyez qu'ils ne se sont pas fait la même réflexion que vous...Einstein ! Ils sont très certainement là-bas, planqués, en train de nous attendre.

— Et si ce n'était pas le cas ? Nous serions en train de perdre un temps précieux pour rien !

— Vous voulez prendre le risque ? Vous voulez vraiment, leurs, faire prendre ce risque, appuya-t-il dans un murmure agacé, tandis qu'il désignait les deux jeunes femmes inconsciente d'un mouvement de tête.

— Ici, c'est surtout la septicémie qu'elle risque, répliqua-t-il en finissant par poser les pieds de Cassie par terre, ne supportant visiblement plus de la porter.

Chimère. Féline-Tome 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant