Chimère. Féline-Tome 2

Chapitre 34-2

Neuf d'entre eux se répartirent en rangs bien serrés de chaque côté de la porte, livrant passage au dixième, visiblement plus âgé que les autres et qui prit la parole d'un air solennel, bien planté au milieu de la pièce.

— Prince Jude, fut égard à votre rang, le conseil a décidé de vous entendre, vous et vos invités, avant de prendre une décision. Je vous prierai donc de nous suivre...de votre plein grés, déclama l'homme d'une voix calme et protocolaire, bien qu'une certaine inquiétude émaille la dernière partie de sa phrase.

Le bref regard que ce dernier échangea avec Jude, me laissait à penser que les deux hommes avaient un certain respect l'un pour l'autre, mais que cela ne les empêchait pas de se méfier.

— Cela va de soi, Euclide. Mais j'aurais une faveur à vous demander. Notre amie Cassie peut-elle rester ici ? Elle vient de faire un malaise...

— Le conseil a bien précisé...tout le monde, l'interrompit Euclide d'un ton guindé en jetant un rapide coup d'œil suspicieux à la pauvre Cassie, qui tenait difficilement sur ses jambes et paraissait complètement perdue.

— D'une part c'est la seule d'entre nous qui n'a joué aucun rôle dans les évènements qui nous occupe, sans compter qu'elle est humaine...l'introduire dans un conseil d'un clan de métamorphe ne me semble pas être une idée judicieuse, répliqua Jude sans se démonter. Réussissant même l'exploit de paraître sûr de lui, tout en restant humble et respectueux.

Euclide sembla réfléchir sérieusement à la proposition de Jude, sans qu'une seule fois son regard ne se détourne de ce dernier.

— Vos arguments sont pertinents et judicieux. L'humaine restera donc ici sous bonne garde, j'en prend l'entière responsabilité, proclama-t-il d'une voix forte et solennel, certainement pour que les gardes présents ne contestent pas sa décision.

Même s'il le cacha bien, je vis le soulagement envahir brièvement le visage de Jude à l'entente de cette décision inattendue et qui pour une fois, allait dans notre sens. Cet Euclide commençait à me plaire ! Il me donnait l'impression d'un homme intègre et juste qui ne se laissait pas influencer facilement. Si une telle personnalité était de notre côté...nous avions peut-être une chance...

— À présent, veuillez nous suivre ! Nous avons déjà perdu assez de temps, ajouta-t-il en se reculant de quelques pas, pour laisser ses hommes s'approcher deux par deux de chacun d'entre nous.

Jude qui s'apprêtait à me rejoindre pour m'aider à me lever, en fut empêcher par deux métamorphes aux visages fermés, qui l'agrippèrent sans ménagement chacun par un bras.

— Qu'est-ce-que cela signifie, Euclide ?! demanda Jude d'une voix sourde, à la limite de la menace, tandis qu'il se raidissait sous la poigne des deux hommes.

— Ces hommes sont là pour s'assurer que vous ne ferez pas de vagues et ne tenterez pas de vous enfuir.

— Je ne cherche pas à m'enfuir...juste à aller aider mon amie, lui répondit-il en lui lançant un regard d'avertissement. Dis-leur de me lâcher, où ils sauront très vite ce que signifie opposer une résistance, les menaça-t-il d'une voix grondante.

Euclide, fit un simple petit mouvement de tête en direction des deux hommes et ceux-ci libérèrent Jude instantanément. Alors qu'il s'approchait de moi en faisant bien attention à son attitude ainsi qu'à ses gestes, je tentai de me lever seule et après avoir chanceler quelques secondes sur mes jambes sans forces, je retombai mollement sur le matelas, dans la même position qu'auparavant.

Devant l'atmosphère tendue régnant dans la pièce, Jude ne perdit pas de temps et après avoir passé son bras dans mon dos, m'aida à me redresser, pour de bon cette fois. Constatant que ce n'était pas de la comédie et que j'avais réellement besoin d'aide pour marcher, Euclide et ses hommes ne firent pas d'autre commentaire et c'est chacun escorté de deux gardes du corps zélés, que nous quittâmes enfin notre prison de fortune.