Chimère. Féline-Tome 2

Chapitre 21-1

Pendant un court instant j'eu la terrible et agréable sensation de voler, avant que le capot de la voiture ne percute l'eau avec violence, m'envoyant heurter la vitre du break dans un craquement sinistre. Curieusement, il n'y eu aucun cri, aucune plainte, juste un silence hébété, troublé par le bruit de l'eau s'engouffrant à toute allure dans le moteur du véhicule. Pour le moment nous flottions encore, mais cela n'allait durer que quelques secondes, il fallait que nous sortions de là et tout de suite.

Je n'avais pas plus tôt penser cela, que la vitre arrière explosa, laissant pénétrer l'eau dans un maelstrom bruyant et terrifiant.

— Il faut sortir, vite ! hurla Jude en m'attrapant par le bras et en me propulsant en avant alors que la voiture plongeait inexorablement vers le fond de la rivière.

Je vis Worth et Cassie, saisir Hannah chacun par un bras et traverser in-extrémis la lunette arrière, avant que cette dernière ne soit totalement engloutie. Je restai figée pendant un instant, paniquée. J'étais prise au piège de ce liquide froid et glacé qui s'insinuait sous mon pelage et me paralysait les pattes...

— Féline, criai-je en cherchant mon amie du regard à la seconde où je prie conscience que ces pensées et ces sentiments n'étaient pas complètement les miens.

Elle avait dû être projeté vers l'avant lors de l'accident et s'était retrouvée coincée par l'un des sièges arrières. Je tentai d'entrer en communication avec elle, mais son cerveau saturé par la panique ne me laissait pas accéder. Je me précipitai vers elle pour l'aider à se dégager, mais l'eau tourbillonnante et glaciale entravaient mes mouvements, les ralentissant et les rendant gourds et imprécis.

— Christina...vite, me pressa Jude, le visage collé au plafond de l'habitacle, inspirant dans l'une des dernières poches d'air disponible.

— Il faut dégager Féline, où elle va se noyer ! lui répondis-je en prenant une dernière grande inspiration, avant de plonger à l'aide de mon amie.

Féline était une panthère, elle n'était pas humaine et ne savait pas retenir sa respiration comme nous, si bien que ce n'était plus qu'une question de secondes avant qu'elle ne succombe. J'étais totalement submergée par la panique, autant la mienne que la sienne, mais parvins quand même à me calmer suffisamment pour retrouver une certaine lucidité.

Lorsque je m'approchai d'elle pour tenter de la dégager, elle ne me reconnut pas et tenta de m'attaquer à coup de griffes. Mais heureusement ou malheureusement, elle était à bout de forces et ses attaques désordonnées ne portèrent pas. Je m'acharnai depuis plusieurs secondes, sans succès, à dégager sa patte coincée, quand Jude me rejoignit et d'une traction puissante et contrôlée, parvint à libérer la panthère dont la vie ne tenait plus qu'à un fil. D'un signe de tête, assortit d'un regard paniqué, je lui fis signe de remonter immédiatement à la surface. Il hésita quelques secondes, puis à contrecœur, sortit à son tour.

En prenant appuis sur le sol de la voiture, à présent recouvert de vase, je me propulsai vers la seule poche d'air encore accessible et y pris de grandes goulées d'air vicié mais vitale. J'essayai de calmer les battements frénétiques de mon cœur, ainsi que ma respiration erratique et superficielle. La voiture avait touché le fond du cours d'eau assez rapidement, ce qui laissait supposer que la distance à parcourir pour rejoindre la surface n'était pas très importante. Je pouvais y arriver ! Au moment où je prenais ma dernière inspiration, des pensées brouillées et incohérentes me parvinrent...féline était en vie ! Ce qui signifiait que Jude aussi ! Rassurée et boostée par cette bonne nouvelle, j'inspirai avidement une ultime fois et plongeai.

L'eau qui était encore claire quelques minutes plus tôt, était à présent remplie de vase et de débris végétaux en tout genre qui me gênaient et perturbaient ma vision. Je me cognai plusieurs fois dans les portières et dans les sièges avant de parvenir à trouver la sortie. J'avais perdu du temps et l'air commençait déjà à me manquer, quand j'entamai mon ascension vers la lueur bleutée et salvatrice qui ondulait au-dessus de moi. La distance n'était pas importante, mais cela me sembla durer des heures et c'est avec un soulagement indicible, que je sentis ma tête crever la surface de l'eau.