Prologue

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Assise sur le rebord de la fenêtre, je regardais les gens dans la rue. Ils parlaient, ils souriaient, ils riaient, ils pensaient, ils rêvaient, ils marchaient, ils marchaient et ils marchaient encore et encore. Ils vivaient. Le soleil était haut dans le ciel et les oiseaux jouaient à cache-cache dans les arbres. Ils vivaient tous comme si tout était normal. Les rayons du soleil me chatouillaient le visage, mais c'était une sensation que j'adorais. Comme si la vie était normale. Mais elle ne l'était pas et depuis un moment déjà...

Je m'appelais Savannah et j'étais une fille du Soleil. La première fois que l'on m'avait désignée comme telle, je n'avais pas compris. Qui aurait pu ? Néanmoins, ce terme avait changé ma vie. Il m'avait changée moi. Certaines personnes pensaient que ce n'était qu'un nom qu'on avait attribué à un changement, une anomalie. Ces personnes ignoraient tout de la réalité, parce que, si ça avait été le cas, aurais-je dû me considérer moi-même comme une anomalie ? Une erreur de la nature ? Je m'y refusais. J'étais différente, et alors ? J'étais loin d'être la seule. Nous étions des fils et filles du Soleil. Le sang qui coulait dans nos veines nous rendait spéciaux, d'accord, mais je ne le laisserais jamais me définir. Seuls mes actes le feraient.

Il y avait maintenant 5 ans, un virus lié aux rayons ultraviolets avait débarqué sur Terre. Je m'étais toujours demandée comment l'on choisissait les noms de virus de ce genre. Honnêtement ? N'importe comment ! Bronzage mortel... je ne plaisantais pas, ils avaient réellement fini par l'appeler comme ça aux infos. Bronzage mortel. On aurait dit le nom d'une huile de bronzage, ce n'était pas étonnant qu'on ne nous ait pas tout de suite pris au sérieux. Et pourtant, cela n'aurait pas pu être plus sérieux.

Il n'y avait pas eu de grand flash lumineux, d'explosion ou quoi que ce soit dans le genre. Le monde s'était simplement réveillé et avait commencé à vivre cette journée comme un jour banal. Cependant, cela n'avait pas duré bien longtemps. D'ici la mi-journée, des centaines de morts avaient été rapportées. Le soir, on était passé à des milliers de morts. Tous des enfants. Dans le monde entier.

Beaucoup de personnes avaient été mobilisées afin de découvrir de quelle pandémie il pouvait bien s'agir. « Nos chercheurs sont malheureusement dans l'incapacité de communiquer les résultats de leurs enquêtes et analyses, s'il vous plaît, gardez votre calme. » Ce n'était pas très compliqué de comprendre qu'ils n'avaient surtout aucun résultat. Voilà pourquoi garder son calme était bien plus facile à dire qu'à faire quand les morts ne cessaient d'augmenter et que cela pouvait arriver à n'importe quel enfant et n'importe où.

En ce qui concernait ma famille, ce n'était pas vraiment un problème. Pas parce que nous n'étions pas le genre de famille qui partageait ses sentiments sans difficultés, mais plutôt parce que cette annonce n'avait pas fait naître de sentiment particulier tout court chez mes parents. Pour être honnête et sans en faire des tonnes non plus, disons simplement que je n'avais jamais été la préférée de la famille. Ainsi le lendemain, j'étais allée au collège comme d'habitude.

Si le monde pensait que la situation ne pouvait pas empirer, il n'était pas au bout de ses surprises. Moi non plus, d'ailleurs. Pendant la récréation du midi, j'allais souvent à la bibliothèque du collège pour être tranquille. Oui, je n'étais pas non plus la préférée de la classe, mais passons. Je lisais donc mon livre, cachée dans un coin entre les étagères pour ne pas être dérangée, quand j'avais commencé à entendre des bruits de plainte. Je ne comprenais pas vraiment ce qu'il se passait, mais je savais que plusieurs personnes se trouvaient de l'autre côté de l'étagère qui me séparait du couloir voisin.

Je m'étais donc levée et, le plus discrètement possible, j'avais fait un trou entre les livres pour voir de quoi il s'agissait. Trois garçons encerclaient une fille. Ils lui jetaient des livres, lui criaient toute sorte d'insultes et allaient jusqu'à lui donner des coups. La pauvre était en larmes et les suppliait d'arrêter. Ils avaient 15 ans, j'en avais 12 et manquais de courage. Par conséquent, je ne m'étais pas interposée moi-même, mais avais décidé d'aller trouver un adulte.

Fille du SoleilOù les histoires vivent. Découvrez maintenant