Chapitre 45

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Quand je retournai à l'infirmerie, le hall était vide. Je regardai tout autour de moi, déconcertée. Il y avait toujours des infirmiers, des patients ou des Soleils. Là, il n'y avait juste personne. Outre le fait que je soupçonnais Jeremy d'avoir fait fuir tout le monde dans la crainte que je ne nous empoisonnasse, un blessé pourrait arriver d'un instant à l'autre, c'était dangereux. Mais non, on n'entendait que le bruit des chariots, pleins de nourriture, qui roulaient derrière moi, poussés par des assistants tout aussi surpris. Jeremy arriva finalement pour nous accueillir. Il s'adressa directement aux assistants :

- Tout le monde est dans la salle commune. On a installé des tables pour faire un grand repas, annonça-t-il.

Les plateaux suivirent ses instructions et disparurent bientôt de notre vue. Mon mentor baissa enfin les yeux sur moi, le regard étonnamment intense, comme lorsqu'il s'apprêtait à me parler de quelque chose d'important qu'il savait que je n'allais pas aimer.

- C'est une excellente idée, avouai-je dans l'espoir de lui faire changer d'avis.

- Oui. C'est celle de Mme Diggle en fait, m'expliqua-t-il.

Je hochai la tête puis regardai le sol pour éviter de rencontrer ses yeux chargés d'émotions.

- Ne lui en veut pas, souffla-t-il alors doucement.

Je redressai la tête avec un regard innocent et interrogateur.

- J'ai bien vu comment tu as agi avec elle. Elle s'en est aussi très bien rendue compte, d'ailleurs.

- Le contraire m'aurait inquiété, grommelai-je en sentant ma colère remonter à la surface.

Il pencha la tête sur le côté en fronçant les sourcils. Je n'aimais pas quand il faisait cette tête-là. J'avais l'impression que quelque chose n'allait pas chez moi.

- Pourquoi fais-tu ça ?

J'écarquillai les yeux de stupeur. Comment osait-il ?

- Tu as vraiment besoin de le demander !? Elle m'a attachée à un lit avec des sangles qui m'ont écorché les poignets et les chevilles, et enfermée dans une foutue salle d'observation toute seule avec...toute seule pendant une nuit entière ! m'écriai-je en serrant les poings. Et tu la défends ? Toi on t'a laissé dormir tranquillement dans un vrai lit, on ne t'a pas emmené de force dans un endroit où tout le monde épie tes moindres faits et gestes comme un animal de foire après ce qui était sûrement la pire journée de ta vie !

Je lui tournai le dos pour me calmer et respirer. Comme d'habitude, je voulus gratter nerveusement mon poignet, mais bien sûr un bandage m'en empêchait alors je ne pus que mordre mes ongles sans trop les ronger.

- Je suis désolé pour ce qu'il s'est passé entre Elizabeth et toi, mais je suis certain que ce sera vite réglé.

Comme par hasard, c'était la seule partie qu'il avait choisi d'écouter. Il était bien sûr naturel de parler de ma vie privée dans les moindres détails, mais au grand jamais nous ne parlions de lui. En l'occurrence, je ne me sentais pas le courage de le confronter alors je le laissai gagner.

- Tu ne comprends pas, soupirai-je en éloignant ma main de mon visage. Je lui ai dit qu'elle était en danger, j'ai même pris le temps de chercher des preuves avant d'agir pour une fois, mais non, elle a préféré faire confiance à un pauvre abruti, plutôt qu'à sa meilleure amie et ça m'a fait réaliser qu'en fait...elle a arrêté de me faire confiance depuis longtemps. Mais je suis incapable de comprendre quand exactement.

Mon mentor hocha lentement la tête.

- Tu n'as qu'à laisser le temps faire son travail.

Tu ne veux pas essayer d'être encore plus insensible tant qu'on y est !?

Fille du SoleilOù les histoires vivent. Découvrez maintenant