Princess of Asgard [FR]

Chapitre IV

Elle lui résistait. Et elle détestait ça. Elle essaya de pénétrer dans la mémoire d'Astrida mais ç chaque tentative, elle se faisait violemment repoussée. Cela lui faisait l'effet d'une claque à chaque fois et elle commençait à en avoir assez. Elle força alors encore plus, prenant le risque de blesser la princesse. Mais encore une fois, elle essuya un échec cuisant. On la forçait à abandonner.

— Je n'y arrive pas, lâcha-t-elle dans un souffle peiné.

Elle baissa les bras, tentant de reprendre avec difficulté sa respiration. Jamais, dans toute son existence, elle n'avait été placée dans une situation aussi complexe. D'ordinaire, ce sortilège était une formalité pour elle, une banale promenade de santé. Mais aujourd'hui, la mémoire d'Astrida lui restait obstinément close. Agacée, elle laissa échapper de ses doigts un petit éclair rouge, qui vint exploser contre le mur de la salle du trône. Heureusement, le maléfice était bénin et ne causa aucun autre dégât qu'une trace noire sur la pierre. Mais cela mit en colère le propriétaire des lieux.

— Volla ! tonna Odin. Cesse de vouloir détruire mon palais et explique-nous ce qu'il se passe !

La divine prophétesse jeta un regard vers la princesse qui, dans les bras de Thor, reprenait lentement ses esprits, après avoir été durement mise à l'épreuve pendant les quinze dernières minutes. Les deux femmes semblaient épuisées mais Odin ne s'en préoccupait pas plus que ça : il voulait obtenir des réponses. Elle obtint de lui d'aller dans l'antichambre jouxtant la salle du trône, lui promettant de lui expliquer ce qui venait de se passer. Astrida à peu près remise, elle conseilla à son frère de l'emmener prendre l'air dans les jardins. Bien qui lui aussi était chamboulé par ce qu'il venait de voir, il obéit cependant sans rechigner et guida sa sœur vers une porte donnant sur les somptueux extérieurs du palais. Pendant ce temps, Volla alla rejoindre son souverain, prête à lui donner les explications qu'il attendait tant.

Mais finalement, elle décida, après une brève entrevue avec elle-même, de s'en tenir à quelque chose de sobre. Depuis quelques temps, elle trouvait le comportement d'Odin très étrange et préférait prendre ses précautions. Si le monarque perdait la raison, ce qui était sa principale hypothèse, mieux valait ne pas lui donner trop de pouvoir. Il était temps de préparer la succession mais le moment n'était pas propice. De plus, elle avait également une deuxième hypothèse quant à la dégradation de son état psychique et celle-ci était beaucoup moins réjouissante. C'était une de ses visions nocturnes qui l'avait alertée mais elle n'avait toujours pas eu d'indice pouvant la confirmer. Cela faisait donc plusieurs semaines qu'elle était à l'affût du moindre signe inhabituel, quelque chose qui pourrait la mettre sur la voie. Jusque-là, rien. Mais avec le retour tant attendu d'Astrida, elle avait le sentiment que les choses allaient s'accélérer et prendre une nouvelle tournure plutôt intéressante.

Elle retrouva le dieu plutôt agité, comme si cet évènement gênait des plans prévus depuis longtemps.

— Que s'est-il passé, bon sang ? s'écria-t-il.

— Mon sortilège n'a pas fonctionné, expliqua-t-elle en tentant de conserver une voix calme devant la colère du dieu.

— Ca, je l'ai bien vu ! Nous l'avons tous remarqué, que tu avais échoué ! Mais quelles explications peux-tu me fournir sur ce désastre ?

Eurêka ! Elle venait tout juste d'avoir une première information, qui confirmait ses nombreux doutes : autrefois, bien que leurs rapports fussent ambigus, jamais Odin ne lui avait parlé comme ça. Leur relation était basée sur le respect. Mais depuis la mort de sa femme, Frigga, l'homme n'était plus le même. Elle craignait que le chagrin n'ait affecté ses capacités, ce qui le rendrait inapte à diriger un univers tout entier. Thor devait bientôt monter sur le trône, qu'il le veuille ou non. Mais d'ici là, elle devait faire profil bas. Elle se doutait qu'Odin n'apprécierait pas qu'on complote dans son dos pour le renverser, même si l'intention était légitime. Jadis, il se serait retiré de lui-même. Mais depuis quelques temps, il s'accrochait à sa couronne, tel un naufragé agrippé à sa bouée.

— Je suis fatiguée. De nombreuses visions m'ont affaibli et mes capacités ne sont plus ce qu'elles étaient, inventa-t-elle avec un flegme naturel. Je pense également qu'Astrida n'est pas totalement remise de... Ce qui l'a mise dans cet état. Je lui préconise de se reposer. Inutile de la brusquer.

Cette dernière phrase sonnait comme un avertissement pour le roi. Elle appuya son regard pour lui transmettre le message, car elle sentait bien qu'il était très impatient de voir sa fille recouvrir ses pleines capacités. Mais pour le moment, elle avait terriblement besoin de repos et ce n'était pas en la sollicitant à ce point qu'on allait obtenir des résultats probants. Evidemment, Volla savait réellement ce qui l'avait empêché de mener à bien son sortilège. Mais elle préférait ne pas en informer son souverain. Elle quitta donc la pièce sans ajouter un mot, laissant derrière elle un Odin perplexe et courroucé, pour rejoindre Thor et Astrida dans les jardins.

Les deux jeunes gens avançaient sur un chemin fait de pierres, bordés de fleurs exotiques, uniques dans l'Univers. Astrida s'émerveillaient devant la beauté de la planète asgardienne et Thor se faisait professeur appliqué et attentionné. Volla voyait bien quel plaisir il avait de retrouver son rôle de grand frère. Sa relation avec sa sœur avait toujours été tendrement complice et l'absence d'Astrida lui avait pesé plus sur le cœur qu'il n'avait bien voulu le laisser paraître. Elle le rejoignit d'un pas léger, la tête cependant pleine d'inquiétudes et de questionnements. Elle se constitua une mine neutre, afin de ne pas alerter la jeune amnésique, et s'approcha de Thor.

— Puis-je te parler en privé, Altesse ?

Un peu surpris, il finit par accepter, laissant Astrida continuer son exploration seule. Accompagnée de la divinatrice, il se dirigea vers un bosquet à l'écart, intrigué par ce qu'avait à lui dire la mystérieuse jeune femme, qu'il redoutait plus que son propre père.

— Je t'écoute, fit-il en croisant les bras sur son torse. Je suppose que tu vas m'expliquer ce qu'il vient de se passer dans la salle du trône.

— Effectivement. Le sortilège a échoué.

— Comment ça ? S'étonna-t-il.

— Quelqu'un m'en a empêché : Astrida.

Il crut avoir mal entendu.

— Comment Astrida aurait-elle pu t'empêcher de lancer ce sortilège ? Elle n'a plus aucun pouvoir.

— Elle ne sait seulement plus comment les utiliser, rectifia Volla. Mais ses pouvoirs sont toujours en elle, endormis. Et je crains qu'elle se soit infligée à elle-même son amnésie.

— Volla, ce que tu me racontes devient de plus en plus étrange à croire. Pourquoi aurait-elle fait ça ?

—Cela, je l'ignore malheureusement. Et la seule personne à avoir la réponse,c'est elle.