Prologue, partie Une

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Il y a mille ans...

Il était de retour sur sa terre natale, celle qui l'avait vu naître et grandir. Désormais, c'était son royaume, hérité de son père. Fini le temps joyeux et insouciant de l'enfance, voici venu le moment de prouver qu'il était devenu un homme capable de diriger un peuple. Derrière lui, le tunnel de lumière dont il venait de sortir se refermait déjà. Campé sur ses deux jambes, s'appuyant sur sa lourde épée dorée comme si c'était une canne, le gardien du portail ne lui jeta même pas un regard. Rien n'échappait à son regard perçant, même à des années lumières d'ici, et il savait ce qu'il devait penser du nouveau venu et de ses actes. Un jeune impétueux à la tête du plus puissant des neuf royaumes n'était certainement pas ce qu'Heimdall avait espéré après la mort de son regretté roi. L'héritier, lui, s'en trouvait gonflé d'orgueil. Enfin, le royaume était sien et il pouvait en faire ce qu'il désirait. Ses actes et paroles n'étaient plus surveillés ni régis pas des lois. Maintenant, il était le maître.

Il passa la grande arche marquant l'entrée de l'observatoire et traversa d'un pas pressé le gigantesque pont de cristal que ses ancêtres avaient érigé entre le portail et le palais, lieu de passage privilégiés des grands de ce monde. Le jour n'allait pas tarder à se lever et il devait rejoindre ses appartements avant que sa femme, la douce Frigga, ne s'aperçoive de son absence. Il espérait avec force que sa grossesse la rende suffisamment faible pour dormir d'un sommeil très profond. Et même si cela n'était pas le cas et qu'elle se réveillait en lui demandant où il était passé, il n'aurait qu'à lui mentir. Après tout, il était le roi et on ne discute pas les paroles du souverain. Il sourit à la pensée du ventre de la reine déjà bien rond et ce qu'il cachait : bientôt, il n'aurait pas un mais deux héritiers. Et les neuf royaumes réunis craindront chacun d'eux.

Il parvint enfin aux portes du palais. Mais, à sa plus grande surprise, quelqu'un l'y attendait. Quand le mystérieux personnage sortit de l'ombre et que l'éclat de la lune mit son visage en lumière, il fut mécontent de constater qu'il s'agissait de la créature la plus perfide qu'il eut jamais rencontré, celle-là même qu'il voulait épouser il y a encore quelques mois. Volla, la divine prophétesse, se tenait devant lui, droite et fière, vêtue d'une élégante robe blanche, dont la simplicité en faisait toute sa beauté. Les yeux glacés de la jeune femme pétrifièrent sur place le jeune souverain qui, malgré lui, était encore sous son puissant charme. Il ne l'avouerait jamais mais elle était la seule eprsonne qu'il craignait réellement. Sourcils froncés, mâchoire serrée et bras croisés, elle paraissait remontée contre lui et il pensait savoir pourquoi : le don de Volla était aussi connu que redouté. Ce soir, il allait en faire les frais.

— D'où venez-vous en cette heure si tardive, votre Majesté ? Railla-t-elle. Comment se fait-il que votre garde rapprochée n'ait pas été informée de cette escapade nocturne ?

— Cela suffit, Volla, tonna Odin, que le ton supérieur de la sorcière commençait à agacer. Je n'ai de compte à rendre à personne. Je suis le roi.

Il contourna la haute silhouette afin de pénétrer dans son palais. Mais la jeune femme était tenace et, loin d'être inquiétée par la colère du jeune homme, qu'elle connaissait mieux que personne, elle n'en semblait que plus virulente.

— Au contraire, Majesté, vous avez des comptes à rendre. A votre royaume, d'abord. Puis aux huit autres qui sont sous votre égide. Et, reprit-elle après avoir laissé ses paroles pénétrer la conscience d'Odin, si je puis me permettre, à votre femme aussi.

— Je ne te permets pas ! Se retourna-t-il en criant. Tu es ma sujette, je suis ton roi. Je gère ma vie privée comme il me semble et tu n'as aucun droit de me faire des reproches.

— Alors laisse-moi exercer le seul droit que tu veuilles bien me donner, ô puissant roi, commença Volla la voix chargée de menaces. Sache que l'acte purement égoïste que tu viens tout juste de commettre, aussi innocent qu'il paraisse à tes yeux, causera mort, chagrin et désolation. Ici, sur Asgard, mais également partout dans l'Univers. Tu viens tout juste de créer ce que ton père redoutait de croiser un jour : une créature capable de réduire jusqu'au plus puissant des dieux existants en poussière. Ton sang engendrera la perte d'Yggdrasil et tu en es l'unique responsable.

 La prophétie flotta dans l'air, comme un gaz âcre et brûlant, chargée de vérité et de peur. Interpellé, il se retourna vers elle, d'une lenteur en parfaite contradiction avec les battements soudain effrénés de son cœur. Les paroles de la divinatrice, lorsqu'elles furent prononcées, provoquèrent un écho en lui. Son âme vit la vérité mais son cœur s'efforçait de l'oublier. La peur tourmentait ses iris, véritables miroirs, qui reflétèrent ses émotions à la prophétesse. Elle savait qu'elle venait de réveiller en lui un profond sentiment de crainte. C'était exactement ce qu'elle espérait en venant le trouver.

— Tu mens, affirma-t-il d'une voix trahissant cependant un avis contraire.

— Je ne mens jamais au sujet de mes prémonitions, tu le sais mieux que n'importe qui, rétorqua-t-elle.

Il demeura muet. Il avait l'impression d'avoir plongé dans un lac gelé, tant son corps était engourdi. Il savait que la jeune femme, aux dons divins, était liée au roi par un contrat très ancien et inviolable, lui demandant la plus parfaite des vérités au sujet de chacune de ses prémonitions. Et si elle avait raison ? Et si le destin venait tout juste d'être écrit ?

 Et si elle avait raison ? Et si le destin venait tout juste d'être écrit ?

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Princess of Asgard [FR]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant