Chapitre I

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Elle avait dormi pendant si longtemps qu'elle eut quelques secondes de flottement. Puis elle réalisa qu'elle avait une nouvelle enveloppe, plus belle, plus forte, plus robuste que la précédente. Elle se rappelait furtivement de la fin. De la mort. De sa mise en abîme et puis des longs siècles, des millénaires de sommeil forcé qui avaient suivi. Elle n'avait pas eu le choix. Odin l'avait forcé à se réfugier dans cette retraite indélicate.

Et voilà qu'elle se retrouvait dans une enveloppe conçue expressément pour elle, par son ancien ennemi juré. Ramenée à la vie par cet être qui l'adorait mais pour qui elle n'avait pas la plus infime des considérations. Quand elle s'était élevée au-dessus du sol, surplombant le monde de tout son pouvoir, il s'était écroulé à ses pieds. Tête baissée, il semblait prêt à lui offrir le monde sur un plateau d'argent. Elle n'avait qu'un mot à prononcer pour le voir s'exécuter.

— Thanos, dit-elle de sa voix douce et âpre. Que cela faisait longtemps.

Elle lui offrit son sourire séducteur, jouant de sa beauté et son influence sur le Titan. Avec nonchalance et élégance, elle se laissa redescendre vers le sol lunaire, ses pieds nues touchant la poussière sans en être salis. Elle eut un regard circulaire, essayant de comprendre l'action. Il y avait des prisonniers, des visages familiers, d'autres inconnus. Mais elle n'avait besoin que d'une seconde pour tous les reconnaître.

— Les enfants d'Odin, murmura-t-elle, ravie. Tous présents, ici. Tous sous mon emprise.

Elle éclata de rire, d'un rire menaçant, glacial. Elle adorait cette sensation de pouvoir qui emplissait tout son être à mesure qu'elle récupérait les souvenirs de l'Univers. La déesse de la Mort avait été absente trop longtemps et l'équilibre en avait été perturbé. La fille aînée d'Odin, Hela, avait tenté de prendre sa place mais elle avait lamentablement échoué. Seul point positif : cela signifiait qu'elle avait libéré de son propre exil par son père. Que ce dernier était mort. Elle eut un sourire satisfait. Sa tête dodelinait et elle semblait heureuse, ravie par le moindre petit détail qui confortait sa position de dominante sur Yggdrasil. Elle observa Thanos, toujours agenouillé à ses pieds. Elle perdit ses airs de gentille et douce femme, ordonnant d'un ton grave et puissant :

— Lève-toi.

Il obéit sans réfléchir. C'était comme dans ses souvenirs, elle l'avait à sa botte, à jamais. Son amour pour elle l'aveuglait et elle était trop intelligente pour ne pas en profiter.

— Je dois te remercier, fait-elle en retrouvant sa façade de femme compatissante et complaisante. Tu m'as sauvée d'une éternité de misère. Tu m'as sorti des ténèbres. Grâce à toi, je vais pouvoir les répandre à nouveau sur ces mondes.

Elle prit le visage du titan en coupe dans ses mains, flottant à nouveau dans les airs pour se retrouver à sa hauteur. Ses iris noires comme la nuit se plongèrent dans les prunelles du géant. Ce dernier se perdait dans les étoiles qu'il voyait en Némésis. La Déesse de la Mort était reliée à chaque être vivant et pouvait décider de leur sort en un claquement de doigt. Plus efficace que le ridicule gant qu'il portait à sa main gauche. Mais il l'avait surpris, en attaquant Nidavellir et en tirant du dernier Nain forgeron des Neufs Royaumes ce joyau permettant de contrôler les Pierres d'Infinité. Et à cet exploit s'ajoutait celui d'avoir corrompu la Princesse d'Asgard, l'arme la plus puissante jamais conçue, qui dépassait toutes celles que l'Homme ou les Dieux avaient pu créé. Elle devait bien reconnaître qu'Odin avait eu du nez, sur ce coup-là. Il avait anticipé les manœuvres de son ennemie, sans se reposer sur ses lauriers. Même s'il l'avait envoyé dans un trou noir quelque part dans ce vaste arbre qu'était l'Arbre du Monde, il avait prévu un plan de secours.

Princess of Asgard [FR]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant