Chapitre XIX

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La nuit était enfin tombée sur le monde asgardien. Dans son berceau, le nourrisson dormait paisiblement, bordé par sa mère qui se préparait à lui faire ses adieux. Les larmes étaient au bord de ses yeux, prêtes à déferler sur ses joues. Elle renifla d'une manière peu élégante, ravalant sa peine. Elle devait d'abord mener sa mission à bien, avant d'enfin laisser libre court à sa peine. Ensuite, elle oublierait tout. Le bébé commença à s'agiter comme s'il sentait que quelque chose se tramait. Dehors, pas un bruit. C'était le moment. La jeune femme prit son enfant dans ses bras, prenant bien soin de l'enrouler dans son linge pour éviter qu'il n'ait trop froid. Elle passa sur son épaule le sac qu'elle avait préparé et qui contenait toutes les affaires de rechange du petit. Puis, sans un regard en arrière, elle quitta la chambre.

Les couloirs paraissaient déserts mais elle se méfiait. Elle devait se dépêcher de sortir de l'enceinte, loin de tous les problèmes, de toutes les personnes qui l'obligeaient à fuir. Elle serra son précieux contre elle : il dormait toujours et ses yeux clos dégageaient un tel sentiment de bien-être et de plénitude qu'elle en eut le cœur brisé. Elle détestait ce qu'elle devait lui faire subir à son si jeune âge mais elle n'avait pas le choix : c'était pour son bien. Elle ne passa pas par le grand hall du palais, qui devait être truffés de gardes, et bifurqua dans un petit couloir. Au bout du chemin, après avoir descendu d'un niveau, elle trouva la minuscule porte qui donnait sur la partie reculée des jardins, celle qui était habituellement déserte. Alors qu'elle traversait la pelouse avec hâte, elle se revit au pied de ce bassin, avec celui à qui elle devait tout, sa vie, son bonheur mais malheureusement aussi son malheur. Encore une fois, les larmes menaçaient de couler. Elle se réprimanda mentalement, essaya d'être forte. Elle ne devait pas essayer mais être forte. Encore quelques heures à tenir avant de sombrer dans le chagrin. Mais d'abord, la priorité était de mettre son enfant à l'abri. S'accrochant de toutes ses forces à cette pensée, elle accéléra le pas.

Franchir le pont multicolore ne fut pas une partie de plaisir. Il était long et les patrouilleurs environnants la rendaient anxieuse. Elle utilisa tous les pouvoirs à sa disposition pour éviter de se faire repérer et ne fut rassurée que lorsque Heimdall lui ouvrit la porte de l'observatoire. Elle s'engouffra à l'intérieur et le gardien du portail referma le lourd battant derrière elle.

— Merci de m'aider, Heimdall, lui dit-elle.

— Je ferai n'importe quoi pour assurer la survie et le maintien de la paix à Asgard, lui répondit-il de sa voix grave et profonde. Ne perdons pas de temps.

— Que diras-tu à ton roi quand il te le demandera ? s'enquit-elle.

Dans son linge, le bébé commençait à s'agiter. Elle caressa sa petite menotte pour le rassurer. Heimdall se pencha sur le nourrisson et l'embrassa sur le front, attendri par l'enfant.

— Je n'hésiterai pas à mentir. Ton secret sera à jamais gardé avec moi.

— Mais tu briseras tes serments.

— Je dois plus à Asgard qu'à son roi. Ne t'en fais pas pour ça. Le temps presse, fit-il en activant le portail, glissant sa lourde épée dorée dans son réceptacle.

Le tourbillon lumineux se mit aussitôt en marche. Il lui était impossible de reculer, elle devait s'y engouffrer. Elle regarda une dernière fois le grand gardien, lui souffla un merci, la voix coupée par l'émotion, puis se laissa emporter loin de son royaume.

Elle échoua au milieu d'un bosquet, en plein centre d'une banlieue pavillonnaire. Ici aussi, il faisait nuit, ce qui allait faciliter son escapade. Elle sortit d'entre les arbres et avança dans la rue principale, à la recherche du fameux petit manoir qu'on lui avait indiqué. Sa longue robe asgardienne ne l'aidait pas à se fondre dans le décor mais aucune voiture ne vint perturber la tranquillité du lotissement. Elle ne croisa pas non plus de marcheurs nocturnes et parvint à l'adresse indiquée sans encombre. Contrairement aux autres maisons, celle devant laquelle elle se trouvait avait encore des fenêtres allumées. Le porche s'illumina quand elle monta les escaliers et elle n'eut même pas à toquer pour que la porte d'entrée s'ouvre. Sur le seuil se trouvait un jeune couple, qu'elle avait rencontré au cours d'un séjour sur terre lors d'une mission pour le SHIELD. Sans prononcer un mot, les Pym invitèrent la jeune mère à entrer. A leur grande surprise, celle-ci refusa.

Princess of Asgard [FR]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant