49 • Tel est pris qui croyait prendre.

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Je regarde l'intrus perché dans l'arbre. 

C'est une femme, couchée sur le tronc comme si c'était un transat. Un coude contre le bois et la tête calée dans sa main, elle m'observe attentivement. Un petit sourire étrange fixé aux lèvres, elle joue avec un objet brillant de sa main libre. Ma nouvelle vision me permet de constater que, ce que je croyais être une pièce, est en réalité une petite pierre plate, aussi polie, brillante et transparente qu'un diamant. À chaque mouvement, la pierre joue avec le soleil et produit un petit éclat de lumière. 

- Oui, dis-je en répondant enfin à sa question, que vous avez évité sans peine il semblerait. 

Elle s'arrête soudain de jouer et de sourire pour me regarder. Que dis-je ? Me scruter serait plus exact. J'ai l'impression d'être un insecte prêt à se faire dévorer. Pas qu'elle soit bien impressionnante, au contraire même, mais pourtant elle dégage un je ne sais quoi qui vous met en garde. Après cet étrange instant, elle se relève adroitement et marche tranquillement vers le tronc de l'arbre. Elle se remet à sourire et hausse les épaules comme si le fait d'éviter un couteau ne méritait pas d'être remarqué. Décidément, elle n'est pas normale ! 

Une fois arrivée au bout de sa branche, auprès du tronc, elle s'accroupit et décroche sans peine le poignard bien enfoncé dans le bois un peu plus bas. L'endroit même où elle se trouvait lorsque j'ai visé. Elle regarde la lame sous toutes ses coutures, toujours avec un sourire. Y'a de quoi flipper je vous le dis ! Après cela, elle jette tout simplement l'objet par dessus son épaule, comme s'il s'agissait d'un caillou. 

- Une arme sans finesse, dit-elle juste après, vraiment pas le meilleur atout au combat si vous voulez mon avis. 

Je lève un sourcil, elle tient vraiment à parler de ça ? Je sais très bien pourquoi elle est là. Ce n'est pas sa taille banale, ni son nez légèrement crochu ou encore la pâleur extrême de sa peau recouverte par de multiples et fines cicatrices qui m'ont donné la puce à l'oreille, mais ses cheveux. Comme Avenroy et malgré leur noirceur, des plumes noires associées à des perles se démarquent sans peine. 

Interrompant mon observation, elle se redresse d'un coup pour sauter en l'air. Elle atterrit gracieusement, presque sans bruit, me donnant l'impression qu'elle est aussi légère qu'une plume. Aussitôt sur la terre ferme, elle se remet à jouer avec sa pierre. Je la regarde s'approcher de moi, sur mes gardes, prête à m'enfuir s'il le faut. Parce que malheureusement je ne pense pas être encore à la hauteur. L'encoche sur le tronc de l'arbre est le meilleur des penses bêtes. 

- Avec une taille et une force aussi grandes que les vôtres, je vois quelque chose de différent. 

Si la situation était différente je serais sûrement en train de me marrer. J'ai l'impression d'être à un relooking. "Tu as une morphologie S, les couteaux ne sont pas faits pour toi." 

Mais je sais que c'est en réalité bien plus sérieux, elle est en train de me jauger. Je ne me dégonflerais pas devant elle, ça je peux le promettre. 

- Que voulez-vous réellement? demandais-je en levant un sourcil dédaigneux. Je me doute que vous n'êtes pas ici pour me conseiller sur mes choix d'armes. 

Elle pousse un rire suraiguë, pour s'arrêter l'instant d'après. Elle fait mine de réfléchir mais c'est tout à fait inutile. Je pense savoir pourquoi elle est là. 

- Eh bien ? 

Je claque la langue, agacée. Je ne suis pas son jouet. 

- De quoi ? demande-t-elle, comme si elle était réellement perdue.

Je retiens de souffler bruyamment. Soit elle joue très bien la comédie, soit elle est vraiment folle. 

- Oh oui, ça me revient, rit-elle en se frappant la tête. La raison de ma présence, dit-elle la seconde d'après l'air grave et la voix sombre.

Le Murmure de l'Originelle T-1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant