Les rencontres

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Le 15 septembre à 17:50
C'est en prenant le chemin de droite, puis de gauche, puis encore une fois de droite que je me suis perdue. Ça ne fait que quelques minutes que je marche depuis l'université mais faute à ma routine qui est de venir en cours, faire des courses à la supérette près des résidences et rentrer, je ne sais ce qu'il y a au-delà de l'université. Je n'ai jamais visité la ville où je compte vivre et ça fait déjà un mois que je suis là. Il s'agirait de ne plus agir comme une touriste, mais comme une vraie madrilène!

La rue dans laquelle je piétonne semble être l'artère de la ville puisqu'elle est bondée de gens. Entre touristes et habitants, je n'ose demander la direction de mon habitat et je patiente un peu pour ne pas croiser Lucrecia à l'appartement.

Je doute de sa méchanceté, je pense qu'elle est réellement gentille, elle se donne seulement un air de crâneuse que je déteste. Elle ne me donne pas envie de traîner avec elle.

Je dois seulement attendre une heure avant qu'elle ne parte pour sa énième soirée, auxquelles elle ne revient que tard le lendemain.

Un petit stand de churros se dresse devant mes yeux, j'en commande un et patiente. Près de moi, une fille qui doit avoir mon âge peine à trouver son euro symbolique tandis que l'homme patiente, prêt à donner le churros. Je prends ma pièce de 2 euros et la glisse sur le plan de travail. « Je le paie. » Dis-je. La fille se redresse et se retourne vers moi. Son voile bleu ciel cadre parfaitement son visage. Son sourire fait ressortir ses joues rosées. « Merci, c'est gentil de ta part. » Répond-elle.

« C'est normal. » Dis-je en pinçant mes lèvres, gênée de ne pas pouvoir alimenter la discussion. En attrapant ma pâtisserie, je me dis que si j'arrivais à discuter avec elle, j'aurais la chance d'avoir enfin une amie ici. Elle me regarde et pince aussi ses lèvres de gêne. « Ehm, est-ce que tu saurais quel bus ou métro il faut prendre pour se rendre aux résidences de la fac? » Ajoutais-je.

Ses yeux s'écarquillent légèrement et montrent ses cils naturellement longs, j'en suis jalouse. « Il faut prendre le bus cinq. C'est le terminus, tu arrives directement aux résidences. Sinon, tu peux prendre le métro mais tu auras un peu de marche à faire. »

Inconsciemment nous commençons à marcher vers je ne sais où. En réalité, je la suivais.

« La marche ne me dérange pas, j'ai juste peur de me perdre parce que je sais que j'en suis capable. » Me moquais-je.

« Je me suis aussi perdue la première fois que je suis venue ici. Je m'étais dit que tu étais une touriste, mais tu étudies à la fac de la ville, je me trompe? »

« C'est exact. C'est parce que je ne viens pas d'ici, et je n'ai absolument aucun sens de l'orientation. Tu es aussi à l'université? » Demandais-je.

La brune regarde devant elle en me répondant: « J'ai fait ma première année ici, j'entame ma seconde mais autre part. »

J'acquiesce. « Tu sais quand est-ce que le prochain passe? » Dis-je en remarquant qu'elle m'avait emmené à l'arrêt de bus. Elle regarde l'heure sur son téléphone et me dit dans moins de cinq minutes. Nous nous asseyons, puis après avoir fini de pianoter sur son téléphone, elle m'annonce prendre le bus avec moi.

« Pourquoi? » Demandais-je. « Si ce n'est pas trop indiscret. »

Elle ricane doucement à ma gêne et rétorque: « Je dois voir mes parents, ils ont la supérette près de là où t'habites. »

« Elle est cool, cette supérette. » Me surprenais-je à dire, pourquoi j'ai dit ça?!

« Ouais, c'est une supérette quoi! » Ricane-t-elle encore une fois avant de partir jeter son mouchoir qui enveloppait le churros. Je fais de même. « Alors, » Commence-t-elle en heurtant ses deux mains et les secoue pour éliminer le sucre qui lui restait, « tu es seule dans ton appart? »

« Je suis avec une fille de seconde année, elle est... particulière. » Débutais-je en montant dans le bus qui vient d'arriver.

« C'est une fille de riche, en gros. »

« Absolument. »

« Ah ma pauvre! » Souffle-t-elle en s'asseyant sur un siège en face de moi. « Ce n'est que le début! Tu tomberas sur quelques boursiers mais méfies-toi! Parfois ils sont plus bêtes que les fils de mécènes. »

« Je prends note. » Ricanais-je.

Nous parlons légèrement durant le trajet, je me sens vite bercée par les vibrations du vieux bus. Un arrêt avant le mien, la brune se lève. « Bon, je pense qu'on va se revoir dans pas longtemps! »

Je souris et acquiesce. Tout en mettant son sac à bandoulière sur l'épaule je lui demande: « Comment tu t'appelles? »

« Nadia. »

« Siro. »

Plus tard, dès mon entrée dans l'appartement, des bruits de talons retentissent en rythme. Ce sont ceux de Lu, comme ses amies l'appellent.

« Hey! » intervient la brune en prenant son sac à main Chanel et en se dirigeant là où j'étais il y a quinze secondes. « À demain, xoxo! »

Je ne lui avait toujours pas adressé un mot, elle était trop rapide.

Je m'assois sur le canapé, devant la télé et me décide à appeler mes parents. Tout contents, ils m'alertent sur la venue proche de mon anniversaire. Ma mère me supplie de revenir pour ce jour ci, tandis que mon père me conseille de le fêter en boîte de nuit avec mes amis puisque je serais d'ici là majeure. J'acquiesce pour tout et pour rien et je conclue l'appel.

Je regarde le soleil se coucher à l'horizon sur la terrasse, il est caché par de maudits buildings. Par ce temps éclatant et chaud, une silhouette masculine se dessine à quelques mètres de moi. Le garçon est sur sa terrasse aussi, tout habillé en noir. A sa distance je peine à voir les détails de son visage, mais je vois clairement le joint qui créait un épais brouillard s'écraser contre son mur avant d'être jeté par-dessus le balcon. Je le vois, il me voit. Après cette action, je lève les yeux au ciel et rentre dans l'appartement.

En tournant le dos au garçon, une voix grave qui cache une intonation énervée se fait entendre. « Quoi?! J'ai pas le droit de fumer en paix? » Il semblait avoir vu ma réaction.

Agacée, je m'approche de nouveau sur le balcon jusqu'à coller mes cuisses dénudées sur le verre me protégeant du vide: « Mec, je me fous de ce que tu fumes. Mais jeter un joint par terre c'est complètement con. »

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Promiscuité - Ander MuñozOù les histoires vivent. Découvrez maintenant