Noël chez les Muñoz

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Ander Muñoz

Le 22 décembre, à 16:00
J'empoigne ma valise et enferme mon appartement le temps de mon voyage. Lorsque je verrouille la porte, je reçois un message de Lu.

Lu
On vous laisse à la gare, on t'attend dans le hall

Sur le moment, je fronce les sourcils: avec qui je suis sensé partir? Je prends l'ascenseur, je me dis que je saurais bientôt. Peut-être que Val et Lu amènent Guzmán quelque part. Lorsque les portes de l'ascenseur s'ouvrent sur Niccoló et Siro, tout me semblait logique. Je leur offre une mine fermée, en avançant vers la brune.

« On y va? » Insistais-je en me dirigeant vers la voiture. J'y entre le premier, le bouclé se met entre Siro et moi. Son copain est face à elle, et Lu est en face de moi.

« Vous allez où? » Demande ouvertement Siro. Valerio lui répond qu'il va à Oaxaca, au Mexique. « C'est trop mignon. » Je vois que Lucrecia regarde ses souliers. En quoi partir en famille pour Noël est mignon? Je lève les yeux au ciel. Qu'elle ne compte pas sur ma réponse.

Moi, je pars à Aranjuez, là où mes parents ont dernièrement décidés de vivre ici après mon acceptation à l'université, lorsque nous vivions toujours à l'extérieur de Madrid. Mais là, ce n'est plus l'extérieur, c'est littéralement un bled paumé. À mon souvenir, quand ils m'ont invité la première fois, nous étions allés au centre-ville qui est, en soit, un village médiéval. Autant dire que je vais m'emmerder. C'est donc le premier Noël que nous passons là-bas. Nous ne sommes pas de ceux qui invitent les nièces ou les grands-parents —parce qu'ils sont morts. D'habitude, les oncles et leurs enfants âgés de dix ans viennent, c'est tout. Vais-je être à la table des adultes, à parler politique et racisme, ou faire la baby-sitter, à dire au petit Lenny de ne pas mettre son doigt dans le nez ou ordonner à Sofia, la petite ado déprimée de ne pas boire le champagne que mon père a pris grand soin de choisir?

Je sens un léger coup dans mon tibia. « On est arrivé. » Vingt minutes étaient alors déjà passées. Tout le monde quitte la voiture qui elle reste en stationnement le temps que les deux bruns remontent. Valerio décharge la valise à la blonde pendant que je décharge la mienne. Une fois les roulettes posées sur le sol, Lu me saute dans les bras.

« Contente-toi d'amadouer ton père pour qu'il gonfle ton compte en banque. » Chuchotais-je. Je la sens acquiescer dans mon cou.

« Ciao, mec. » Me dit Valerio en tapant dans ma main.

« À la semaine prochaine. » Leurs répondis-je puis tire ma valise vers l'autre côté de la rue, où la gare se dresse.

J'y rentre, composte mon ticket et ne me préoccupe plus des deux petits, qui sont partis à l'extrémité de ma position, prêts à partir comme des scouts dans un pauvre village.

Finalement, nous sommes nous trois tous dans la même situation. Nous partons tous dans un vieux village morbide. Je ressors mon pendentif religieux qui compte énormément pour ma mère, Azucena. La chaîne et la croix sont dorées. Je branche mes écouteurs et réajuste mon bonnet noir. En coinçant ma valise entre mes jambes, je tente de me reposer, mais c'est sans compter sur les notifications incessantes de mon mobile. Depuis peu, —à peu près novembre—, l'un de nous a ajouté Siro dans le groupe WhatsApp que nous avons depuis que nous nous étions rencontrés donc depuis très longtemps. Ils ont décrété qu'elle est une personne de confiance malgré moi.

Promiscuité - Ander MuñozOù les histoires vivent. Découvrez maintenant