Chapitre 38

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Point de vue Shuichi

Akamatsu n'était pas partie depuis longtemps que c'est au tour de Harukawa de faire irruption dans la chambre, l'air irritée.

- Tu n'aurais pas quelque chose à m'avouer à propos de ce service que je t'ai rendu ?

Elle se plante devant moi.

- Heu...

- Pourquoi avoir fait ça ? Si tu savais, ce qui est très certainement le cas, tu devais te douter de la manière dont ça finirait.

Je lève la main comme pour l'arrêter.

- S'il te plaît, j'ai déjà eu droit à un sermon. Pas besoin que tu t'y mettes aussi.

- Tu le mériterais pourtant. C'était complètement stupide.

- Comment tu l'as su ?

- Oma m'a appelée, en larme. Je suis allé le voir pour le réconforter et il m'a tout raconté. Absolument tout. J'ai encore du mal à croire ce que j'ai entendu.

- Je ne veux pas y croire plus que toi... Pourtant les faits sont là.

- Donc tu vas simplement laisser tomber.

- Je ne vois pas ce que je peux faire d'autre. À chaque fois que j'essaye de m'approcher de lui, je finis par le blesser.

D'abord à l'école, en tant que bourreau. Puis dans ce jeu en lui rappelant de mauvais souvenirs. Et enfin maintenant, parce que je suis un idiot qui en veut toujours plus. Je ne connaissais pas cette facette de ma personnalité. Et j'aurais préféré continuer à l'ignorer.

- Alors vas-y. Reste dans ton coin à pleurer sur ton sort.

- Qu'est-ce que tu voudrais que je fasse ? Tu as très bien vu comment ça s'est terminé.

Elle soupire, agacée.

- Pas un pour rattraper l'autre.

- Mais tu veux quoi à la fin ? J'explose. Que je le revoie ? Pour le mettre encore plus mal ? Hors de question. Et tu sais pourquoi ? Parce que je suis un monstre. Un horrible monstre qui s'en est pris à une personne qui n'avait rien fait. Je n'arrive même pas à me regarder dans la glace maintenant. Tout ça parce que j'ai blessé celui que j'aime.

Je me stoppe brusquement. Je ne viens quand même pas de...

À ma plus grande surprise, la brune éclate de rire.

- Pas trop tôt.

- Oublie ce que je viens de dire.

- Tu pensais vraiment que je ne me doutais de rien pour Oma ? Tu as ce sourire niais collé au visage dès qu'il était question de lui. Tu n'arrêtais pas de le défendre, de dire qu'il n'était pas si mauvais que ça. Et ici, tu avais l'air si heureux de pouvoir lui parler à nouveau.

- Oui mais... J'ai tout perdu maintenant.

- Tu vas arrêter d'être défaitiste ? Combien de fois la situation nous a semblé impossible à résoudre ? Et qui nous sortait à chaque fois de ce mauvais pas en nous apportant une autre réflexion ?

- Moi mais...

- Qui a démasqué l'instigatrice ?

- Je n'avais pas deviné le fin mot de l'histoire.

- De toute façon, ce qu'elle nous a raconté était faux.

Un petit sourire naît sur mes lèvres.

- Qu'est-ce que tu proposes alors ?

- Envoie lui un message. Laisse le détective parler.

- Il me déteste.

- Faux. Il déteste celui qui s'en est pris à lui. Est-ce que c'est toujours ton intention ?

Je me redresse vivement.

- Bien sûr que non. Je ne suis plus du tout le même.

- Alors à toi de lui faire comprendre. Sans pour autant y aller aussi franchement que la dernière fois. Je n'en reviens toujours pas que tu aies monté un tel plan.

- Moi non plus. C'était stupide.

- Je ne vais pas te mentir, ça va être compliqué. Très compliqué. Mais à côté d'un jeu de la mort, est-ce que ça l'est vraiment ?

- Non. Merci Harukawa.

- De rien. Je te laisse maintenant. Écris-lui un beau texte en étant totalement sincère.

- Je vais faire mon maximum.

- À plus tard.

Et sur ces mots, elle quitte la pièce.

J'inspire un grand coup avant d'attraper mon téléphone.

"Salut. Je ne sais même pas si tu prendras la peine de lire ce message jusqu'au bout. Honnêtement à ta place je ne le ferais pas : j'ai été une personne affreuse avec toi. Ce que j'ai fait est tout simplement inexcusable j'en ai bien conscience. Crois-moi.

Je tiens d'abord à te dire que je suis désolé pour tout ce que je t'ai fait subir par le passé. Jamais, je dis bien jamais, je ne m'en remettrai.

Tout à l'heure je t'ai exposé la raison pour laquelle je suis ici. Mais je vais te le réexpliquer. Si j'ai été amené à subir ce traitement, c'est parce que j'étais quelqu'un de mauvais. Je m'en prenais aux mauvaises personnes. Je n'étais pas ce que l'on pourrait appeler une personne bien. Je n'aurai pas l'audace de dire que c'est le cas maintenant : nous l'avons vu tous les deux il y a peu. Mais je peux t'assurer que j'ai changé. Je suis différent de celui que tu as connu à l'école.

Alors oui, je vais encore faire des erreurs. Oui, je vais sûrement garder ce côté impulsif. Mais non, je ne te ferai plus de mal. Tu as ma parole.

Ce n'est pas l'ancien Shuichi Saihara qui te parle actuellement. Ni même le détective. Ces deux personnalités font désormais partie du passé. Ce même passé qui m'a permis d'être quelqu'un d'autre. Quelqu'un qui ne fera pas les mêmes fautes.

Oma, je te jure que je suis totalement honnête avec toi. Et je te promets de toujours l'être peu importe la question que tu me poseras. Si je suis en mesure de t'aider, je le ferai sans hésiter. Quitte à ne pas respecter les règles.

Ps : Je sais que je ne suis pas celui qui devrait te dire ça, mais je suis heureux que tu sois toujours en vie."

Point de vue Kokichi

Mon téléphone sonne, me réveillant d'un nouveau cauchemar. Ils s'étaient calmés ces derniers temps, pourtant le fait de le revoir les a réanimés. C'est ironique de penser que c'était grâce à lui qu'ils avaient disparus alors même qu'il en est la cause.

Je prends le petit objet en main et me fige en voyant qui est l'auteur du message. Le détective.

Mon premier réflexe est de lâcher l'appareil comme s'il m'avait brûlé. Je ne veux plus avoir à faire avec lui. Qu'est-ce qu'il me veut maintenant ? Finir ce qu'il avait commencé avant ?

Je me pose tellement de questions. Trop de questions. Tant et si bien qu'une curiosité presque malsaine s'est installée. Alors j'ai lu. D'une traite sans m'arrêter.

À la fin, je ne savais pas quoi penser. J'ai du mal à croire qu'il puisse être honnête. Pas après ce que j'ai vécu. Mais en même temps, tout à l'heure, il n'a pas eu l'air de vouloir me blesser. Au contraire.

Il aurait totalement pu s'amuser avec moi comme il en avait l'habitude : j'étais à terre et seul. Personne n'aurait pu nous interrompre. Pourtant il n'a rien fait. Il s'est contenté de me parler.

Est-ce possible qu'il change à ce point ? Ce traitement peut-il faire des miracles pareils ?

D'un côté, j'ai très envie d'y croire. Croire qu'il ne s'est pas joué de moi tout ce temps. Mais de l'autre, j'ai peur de retomber de cette spirale infernale. Cette spirale qui m'a ôté le goût de vivre.

Je prends le téléphone en tremblant légèrement tandis que j'écris quelques mots.

- Je vais avoir du mal à y croire. J'ai besoin de preuve. Alors je vais te poser une question simple : qu'est-ce que nous étions l'un pour l'autre pendant ce jeu ?

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