XXXVIII

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 Nos aventuriers commençaient à traverser des villages de plus en plus vivants au fur et à mesure qu'ils s'approchaient du palais d'Olbies. Perrine et Yan étaient les plus émerveillées par l'agitation des rues et des champs. Malheureusement, elles ne possédaient pas le temps pour s'arrêter et profiter de cette atmosphère insouciante.

– Et là, que vend-t-il ? demanda Perrine alors que leur cortège passait devant un étal couvert de fioles colorées.

– Ce sont des parfums, répondit Erian. S'ils viennent d'Edenia, ce sont les meilleurs du monde et également les plus chers. Il paraîtrait même que leur royaume détiendrait le secret de la recette des filtres d'amour.

– Ils n'ont jamais pu le prouver, les interrompit Yan.

– De quel royaume viens-tu ? l'interrogea soudain Perrine.

– D'Iniese, où nous possédons les plus belles étoffes du monde.

– Pour quoi Olbies est-il connu alors ?

– Pour leurs beaux garçons, rit Yan. Mais d'où viens-tu pour en connaître si peu sur les différents royaumes ? N'as-tu jamais eu d'instructeurs ?

– Tu avais un instructeur ?

Erian détourna rapidement le sujet de la conversation avec cette question, venant en aide à Perrine.

– Tu dois être issue d'une noble famille.

Yan remua sur la scelle, mal à l'aise face à cette interrogation. Elle n'avait pas envie de parler d'elle au risque de dévoiler son identité.

– J'en ai eu un aussi, intervint alors Louis.

Il avait senti la détresse de la princesse et malgré leur dispute, il ne pouvait l'abandonner ainsi.

– Mes parents étaient amis avec des instructeurs. Je n'étais pas riche, mais j'ai pu profiter de leur savoir.

Erian hocha la tête, oubliant bien vite que Yan ne lui avait pas répondu.

– Qu'est-ce qu'un instructeur ?

La curiosité de Perrine refit surface.

– Tu as dû naviguer sur les mers durant toute ton enfance pour ignorer tant de choses, supposa Yan.

– Un instructeur est quelqu'un qui t'enseigne la langue, l'histoire et les sciences du monde. Mais le savoir coûte cher et tous les enfants n'y ont pas si facilement accès, expliqua Erian.

– Que font les autres enfants ? s'inquiéta alors la terrienne.

– Dans la plupart des cas, ils vont à la bibliothèque où un instituteur les éduque. Ils n'y restent que quelques années puis ils partent travailler avec leurs parents. Un instructeur peut t'apprendre des matières plus spécifiques selon le métier que tu feras plus tard. Il est beaucoup plus qualifié et reconnu.

Perrine hocha la tête et pensa à son monde, à la manière dont elle vivait et aux coutumes de ce pays inconnu dans lequel elle était soudainement apparue. Les enfants ici étaient-ils heureux ? Ils étudiaient quelques temps puis travaillaient avec leurs parents. Avaient-ils l'opportunité de choisir une autre voie s'ils le souhaitaient ? Pouvaient-ils suivre leur propre chemin ou devaient-ils obligatoirement marcher dans les pas de leurs parents ? Si sur Terre le même système existait, se serait-elle sentie capable d'assumer les responsabilités que ses parents endossaient actuellement ? Ils travaillaient tant qu'ils n'avaient plus de temps pour leur fille, elle ne savait même pas comment elle avait pu naître alors que sa mère et son père ne possédaient pas une seule minute à consacrer à leur amour. Ou travaillaient-ils si souvent parce que leur relation s'était étiolée ?

Petite, elle avait souvent craint que ses parents se séparent, mais aujourd'hui elle ne s'en souciait même plus. Elle avait grandi et la vie des adultes ne la concernait plus autant qu'avant maintenant qu'elle devait s'occuper de la sienne.

Perrine se concentra sur les passants. Ils étaient comme des terriens : ils marchaient de la même manière, avec un pas plus ou moins pressé, ils parlaient avec les mêmes mots – ce qui lui paraissait très étrange d'ailleurs – et à part leurs vêtements quelque peu désuets, ils dégageaient la même apparence. Après une dizaine de têtes, elle se rendit compte que pas une personne n'était blonde. Elle repensa à Kian qui lui avait coupé sa magnifique chevelure et à ce qu'il lui avait dit : "plus tard, tu me remercieras". Elle se souvint aussi de la réaction de Sarah, cette vieille dame qu'elle avait croisée au début de son aventure, et de celle de Jia qui lui avait immédiatement teint les cheveux ; toutes deux avaient semblé redouter sa couleur blonde. Mais pourquoi ? Cela avait-il un rapport avec l'étrange question que lui avait posée Erian juste après lui avoir annoncé qu'il la croyait maudite ? Dès qu'elle se retrouverait seule avec le pirate, elle éclaircirait tous ces mystères.

Bientôt, les maisons se firent plus éloignées les unes des autres, et les champs ainsi que les forêts reprirent leurs droits sur la nature. Mais une dizaine de minutes plus tard, alors que le bois que nos héros traversaient commençait à s'éclaircir, des collines se dessinèrent à l'horizon. La plus haute était couverte d'habitations qui s'étalaient jusque dans la vallée, tout le long d'une rivière la traversant. Un château trônait au sommet, trop loin pour en percevoir sa splendeur, mais assez près pour en saisir son aura majestueuse.

La petite troupe avança sur le sentier menant en direction de la ville. Perrine, Ynasuana et Louis gardèrent leurs yeux rivés sur Olbies, émerveillés par la vue qui se présentait à eux pour la toute première fois. Quant à Kian, Jia et Erian, ils refoulèrent leurs vieux souvenirs et continuèrent leur route silencieusement. La princesse et la terrienne agissaient telles des touristes dont toutes les phrases commençaient par « Tu as vu... ? ». Louis, plus réservé, se contenta de quelques questions concernant les souverains du pays. Ce fut Erian qui lui répondit et cela surprit Kian et Jia puisqu'ils le pensaient pirate depuis sa naissance. Visiblement, ce n'était pas le cas. Le maudit et l'immortelle le scrutèrent, se demandant quels autres secrets cet homme dissimulait.

Olbies se révélait à leurs yeux au fur et à mesure que les six aventuriers avançaient en direction de la ville. Le soleil descendit lentement en direction de l'horizon, se couchant après une longue journée sans nuage. Iziria était ainsi, ensoleillé la plupart du temps. Chaque être vivant était doté d'une énergie qui lui permettait de résister en attendant la pluie si rare depuis la disparition des dieux la faisant tomber. Quatre déesses étaient autrefois responsables d'apporter l'eau sur Iziria. Elles étaient les descendantes légitimes des souverains des mers, deux frères dirigeant ce royaume avec leurs épouses. L'aîné possédait trois filles : Stena, déesse de la foudre, Medya, déesse de l'eau, et Euryiale, déesse des nuages. Ces trois sœurs étaient autrefois liées par une profonde amitié et un sens du sacrifice exceptionnel. Mais leur cousine, déesse du vent qui trouvait la vie d'immortelle bien longue, s'était amusée à détruire ce trio inséparable. Les unes après les autres, elles furent maudites et bannies du monde céleste, sous le sourire hypocrite de leur cousine. Le nom de cette perfide déesse, vous le connaissez déjà : c'est Erinna.

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Bonjour !

Voici le chapitre, avec un peu de retard, désolée...

Un commentaire sur la fin ? Que pensez-vous du plan d'Erinna pour détruire la vie de ses cousines ?

Si vous êtes curieux, je vous propose d'aller lire le tout nouveau livre que je vais publier et qui raconte comment les trois soeurs ont été maudites par la fameuse et diabolique Erinna ! Je vous attends alors ne loupez pas ça ;)

BLUE HEARTOù les histoires vivent. Découvrez maintenant