Perrine suivit Kian jusque dans une auberge du centre-ville. Stressait-elle ? Soudain elle s'en voulut énormément sans comprendre pourquoi. Euryiale. Le prénom de la petite sœur de Jia tournait en boucle dans son esprit. Perrine avait brisé leur famille, détruit leur vie. « Tu n'as rien à te reprocher, » se sermonna-t-elle. D'une certaine manière, ce n'était pas de sa faute alors pourquoi se blâmer ? Surtout qu'elle n'avait aucun souvenir d'avoir eu une conduite répréhensible. Elle avait toujours respecté la loi jusqu'à maintenant. Peut-être dans son enfance avait-elle menti, oublié — et souvent omis — de faire ses devoirs ou bien craché son chewing-gum dans la rue mais ce n'était pas grave au point de se sentir coupable d'un crime, n'est-ce pas ?
– Vous êtes amis depuis longtemps ?
Kian hocha la tête. Jia et lui se connaissaient depuis plus de dix-neuf ans, autant dire qu'il ne pouvait pas l'avouer à Perrine ; elle lui aurait rit au nez. Le prince avait l'apparence d'un jeune homme d'à peine dix-neuf ans, à moins de mentir et de prétendre se connaître depuis le berceau, il était peu probable qu'on l'eût cru. Quoi qu'il en fut, il ne pouvait prendre le risque de mentir à Perrine car il ignorait encore l'étendue de son mana. Sans doute était-elle capable, comme lui l'était au début de sa malédiction, d'être instinctivement sûre d'une chose mais de ne pouvoir expliquer pourquoi. Avec de l'entraînement, elle apprendrait à contrôler cette aptitude et à déceler la moindre fausse note dans le discours des meilleurs baratineurs. Mais pour l'instant, il était clair qu'elle ne maîtrisait rien.
– Vous vous êtes connus comment ?
C'était la question qu'il redoutait. Il fallait taire une partie de la vérité tout en évitant d'inventer des événements qui ne s'étaient pas produits.
– Je traversais une période difficile et elle m'est venue en aide.
– Je comprends.
– C'est bien plus compliqué que tu ne le penses.
Perrine se tut ne sachant pas comment expliquer qu'elle ressentait la peine et la haine qui l'avaient habité ainsi que le soulagement qu'il avait éprouvé lorsque Jia l'avait aidé. Comment la jeune fille pouvait-elle ne se baser que sur de simples intuitions ? C'était absurde, complètement fou. Elle observa les gens dans la rue en se demandant quelle était leur histoire. Avaient-ils des problèmes ou ceux du passé les hantaient-ils comme tentait de le dissimuler cet homme qui marchait devant elle ? Ces personnes avançaient, plus ou moins pressés, plus ou moins belles, plus ou moins vieilles. Une femme tenant contre sa hanche un panier de fleurs sauvages capta son attention. Était-elle fleuriste ? Les apportait-elle à sa mère ou peut-être à sa sœur malade ? Ou alors en rentrant chez elle, les mettrait-elle dans un vase pour égayer sa vie fade et décolorée ? Perrine se posait toutes ces questions mais savait qu'elle n'obtiendrait jamais de réponses. Ces interrogations étaient comme celles sur ses parents, sur ce loup, sur cet homme dans son long manteau et ses bottes à la mousquetaire, et surtout sur ce monde. Elle avait cru les connaître mais n'en savait rien.
– Comment tu t'appelles ?
Peut-être que s'intéresser à lui était une façon pour elle, ignorante, de rattraper le temps perdu avec d'autres. Si elle apprenait à le connaître lui, cet homme mystérieux, ce serait un peu comme connaître une infime partie de ce monde. Cependant, il ne répondit pas. Ils venaient d'arriver à l'auberge.
– Je l'ai trouvée, annonça-t-il lorsqu'il entra dans la petite chambre qu'occupait Jia.
– Bonjour, la salua-t-elle mais contrairement aux autres fois, ses yeux fixèrent sa poitrine.
Lorsque Perrine était entrée dans le salon de coiffure de Jia, une chose avait immédiatement frappée la jeune fille : c'était l'étonnante capacité de la coiffeuse à plonger son regard dans le vôtre, comme si elle vous voyait.
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BLUE HEART
FantasyImaginez-vous prendre un bain et la seconde d'après vous retrouver propulsée toute nue au milieu d'un immense lac. Difficile à croire n'est-ce pas ? Et pourtant c'est exactement ce que vient de vivre Perrine, jeune fille d'à peine dix-huit ans. Sur...