47. Back to the south

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— J'ai un entretien à Avignon.

— Quand ça ?

— La semaine prochaine, j'ai déjà pris mes billets, je pars le mardi et rentre le mercredi soir.

Je ne connais rien d'Avignon, à part son fameux festival et es remparts. Mais c'est une jolie petite ville dans le sud de la France, suffisamment éloignée de son père et de mes propres parents pour que cela reste vivable.

— C'est pour un job dans l'arrière-pays...

— Oh.

Nous avions évoqué avec Florent ma volonté de reprendre une activité professionnelle à sa prochaine mutation. J'espérais qu'il choisisse une grande ville.

— C'est un village ?

— Une petite ville. De toute façon, c'est la porte d'entrée pour le Sud, on n'a pas vraiment le choix !

Comme souvent, pour ma part.

Louis et Liam chahutent à l'arrière. Gabriel s'est endormi, je leur demande de ne pas trop faire de bruit, mais ils ne m'écoutent pas. Ça fait plus de six heures que nous roulons, je comprends leur agacement. Je regarde le paysage défiler autour de nous. C'est essentiellement de la Garrigue. La route, tortueuse, traverse des villages et des lieux-dits abandonnés de tout. Je ne suis pas très sûre de vouloir arriver. Lorsque Florent nous a dit qu'il était embauché, j'ai eu du mal à être enthousiaste. L'idée de déménager à nouveau et de quitter mes camarades de dessin me fend le cœur. D'autant que cette fois encore, le poste est à pourvoir immédiatement. Les garçons ne finiront pas leur année scolaire et devront s'adapter tous les deux à un nouvel établissement en plein mois de mars. Cela me contrarie. Mais ce n'est pas le pire : l'appartement que nous occuperons est bien plus petit que celui que nous avons actuellement. Il n'y a que deux chambres. Nous ne savons pas exactement à quoi il ressemble, et c'est pour cette raison que nous nous sommes déplacés. Lorsque j'ai dit à Florent que je voulais le visiter, il était plutôt contre : il n'aime pas me mêler à sa vie professionnelle. Mais cette fois, j'ai insisté : nous allions traverser la France pour qu'il fuit sa supérieure hiérarchique, en pleine année scolaire. Nous pouvions au moins avoir une idée de ce qui nous attendait !

— Et là, la deuxième chambre...

L'intendant a l'air désolé de me faire visiter cet endroit. Je peux le comprendre. La pièce à vivre est minuscule, séparée en deux par une espèce de bar en bois qui doit dater des années quatre-vingt. Les sols sont en linoléum, sales et déchirés par endroit. Quelle différence avec les beaux parquets normands ! Même les fenêtres, gonflés par l'humidité, ont du mal à s'ouvrir. C'est vieux, sale, et humide. J'ai du mal à retenir mes larmes.

— On ne va pas habiter, là !

— C'est une super opportunité, après ce sera plus facile de trouver un poste dans le Sud !

— Mais quand ? Dans un an, deux ans, trois ?

— L'intendant m'a assuré que si un appartement se libérait, nous serions prioritaires.

« Si » « Peut-être ». En attendant, nous allons emménager à cinq dans 60 mètres carrés et dormir dans le salon. C'est pourtant pour éviter ça que nous avions quitté Paris ! Je le lui dis, mais il n'en a rien à faire.

— Ecoute, moi, je ne peux pas rester là-bas. Avec ma chef, c'est trop compliqué. J'ai trouvé un super plan, alors s'il-te-plaît, ne fais pas des manières !

Une larme s'échappe des mes yeux. Encore une fois, je n'ai rien à proposer. Je n'ai pas de travail digne de ce nom, et c'est lui qui tient les cordons de la bourse. S'il veut partir, nous partirons, je le sais bien.

— Et dis-moi, Louis, ça te dirait d'avoir une chambre tout seul ?

Louis lève la tête, étonné.

— Ah oui !

— Et ben, tu vois dans le nouvel appartement, ce sera possible...

Aussitôt, mon fils est enthousiaste à l'idée de déménager. Les deux petits dormiront ensemble. Et nous, dans le salon. Dès demain, il m'emmènera des cartons pour que je les remplisse. J'acquiesce mollement. Manifestement, c'est tout ce que je sais faire. Je me déteste.


J'ai du mal à te croireOù les histoires vivent. Découvrez maintenant