Chapitre 34B:Ziemassvētku

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Même après plusieurs mois,je ne connaissais toujours pas les lieux.Mon esprit ne voulait pas les assimiler,et c'est ce qui me dérangeait.Je ne voulais pas me rebeller par la flemmardise.Ce n'était pas mon objectif.

Je n'avais aucun repère,aucun point d'accroche dans ce pays pourtant si proche,si impérialiste que l'on confondait souvent ma nation avec lui.

Je ne me souvenais pas d'avoir vu aussi peu de végétations dans un milieu aussi sauvage.Nous étions réellement dans les steppes rases et isolées du sud de la Russie,et les seuls plantes que j'ai vu décoraient le bureau du kolkhoze.

Il nous a fallu attendre deux semaines pour que Gaëll aille mieux.Deux semaines où sa maladie s'est également répercutée sur nous sur le plan physique.Gaëll n'avait pas un travail épuisant,et pourtant elle était si mal en point qu'elle y avait perdu connaissance.Un travail hautement intellectuel pour une petite fille de huit ans.Elle lisait les comptes,après tout c'était son intelligence qui l'avait perdue.Les notes sur les marchandises qui naviguaient vers la grande mère URSS,la patrie,qui échangeait avec l'étranger quand ça ne la dérangeait pas.Qui refuserait un approvisionnement en fromage de Hong Kong,en poudre chimique norvégienne,qu'ils ne manquaient pas d'expérimenter sur les prisonniers,ou de mélanger avec leur alcool,les bouchons de nez d'Alaska,qui nous seraient bien utiles pour un petit séjour en train,de pièce de rechange de voitures qui arrivaient de Belgique,pays du grand Ouest méchant,les tissus du Bénin.D'après ma mère,géopoliticienne extrêmement dangereuse et ennemie principale du Kremlin,même eux n'échappaient pas au capitalisme.Ils n'étaient pas assez suicidaires pour atteindre l'autosuffisance alimentaire.

Ce n'était pas un travail très fatiguant,mais notre pain quotidien,était emputé d'un bon tiers.Car dans les pays communistes,il peut arriver qu'il y ait de la nourriture tous les jours,les ukrainiens n'ont pas eu cette chance,mais qui ne travaille pas ne peut pas en profiter.Par la suite,comme je vous en parlerai,j'ai visité d'autres camps communistes et tous ont confirmé mes vues de 1941.Ce manque de rationnement ont laissé ma mère ma soeur et moi très affaiblies,comme si notre inquiétude n'avait pas suffi.Mais Gaëll était guérie.Maigre,faible,mais elle n'était pas atteinte d'un mal incurable.C'était ça de gagné.Lorsqu'elle a commencé à parler,Lasse avait répondu en riant:

-Gaëll,tu ne peux pas te plaindre!Puis il pris un ton conciliant:Tu as toujours rêve d'apprendre une langue étrangère,comme le racontait Lavra(il n'y a qu'elle pour raconter une anecdote aussi passionnante),tu es servie!

Elle lui jeta simplement un regard furtif,en s'appuyant aux boiseries de la hutte pour se déplacer.Il allait rester difficile pour elle de travailler,et donc de se nourrir.Sa voix n'était qu'un mince filet de voix,et pourtant il me faisait tant plaisir.Elle m'avait complimenté sur mon chant lors des berceuses qui devaient la maintenir en vie.Des berceuses,et des chansons étrangères,celle qu'écoutent plus les jeunes de mon âge lorsqu'ils dansent en soirée.Lorsque je dansais en soirée.

-Je suis entièrement d'accord avec elle,me disait ma mère.

Mon chant n'a pas permis de nourrir ma soeur.La générosité des autres variait en fonction du temps.Les gens devenaient de moins en moins gentils avec nous.Il faisait trop froid pour donner le croûton de la baguette à son frère de rang.Viktor est passé la voir lorsqu'il n'avait rien d'autre à faire,et à chaque fois,cet idiot revenait les mains vides.

-J'ai envie de le gifler ce petit con,déclarai Lavra.

Lavra,justement.La situation fut éclairée par ses 18 ans.Une équipe était autour d'elle pour célébrer sa majorité.Deux heures de jeu dans la nuit.Puis après ils se sont arrêté.Il se sont effondrés pour dormir sur le sol,avant d'être chassés à grands coups de pieds de chez nous.Ils parlaient de son absence de petit ami,quand sa petite soeur en avait un.

-Il n'y a aucun prisonnier ici avec lesquels je voudrais faire connaissance...

-Avec un agent peut-être?je demandai sur le ton de l'humour.

-Tu sais ce qu'ils ont fait à Gaëll?Ils ont littéralement refusé de la nourrir!Ma mère est arrivée au stand,elle a ouvert la porte et elle a demandé à parler aux soldats.Elle a continué d'insister pour Gaëll,cette petite Gaëll qui aurait pu être leur fille,mais ils lui ont demandé de servir le café,sans même glisser la moindre poudre dans ses poches,et ils se sont avec entrain moqué d'elle.Je leur aurai volontiers cassé la gueule.

Je ne sais pas pourquoi,mais sa remarque sonnait faux.La façon dont elle racontait cette horreur à la place de maman elle-même m'horrifiait.Ma mère la regarda,puis elle me regarda,et elle annonça une bonne nouvelle,celle d'un rapprochement avec Jona,qui lui avait donné des vêtements chauds.

D'autant que nous commencions à nous préparer à la célébration de la Noël,fête religieuse,très mal tolérée par les agents,selon qui le seul dieu à célébrer était Joseph.Noël,c'était également la fête du grand amour,bien sûr pas à la base,mais dans la culture populaire,si.Pendant la première guerre mondiale,les allemands et les français avaient fêté Noël ensemble,ce n'est pas à nous que ça arriverait.Il allait être également difficile de trouver des cadeaux à tout le monde.

Les réunions de célébration,de préparation,se passaient chez la seule personne qui n'était pas concerné,ce juif homosexuel répondant au nom de Markas.Malgré sa discrétion et son orientation sexuelle,il était croyant et ne supportait pas de voir sa religion malmenée.

Ma mère,la seule bonne âme en ce triste monde,avec Lasse et Viktor,à qui j'avais pardonné l'épisode des pains,insista pour qu'on invite Madame Grimas aux célébrations.Elle avait beau avoir adopté deux jumelles qu'elle avait maintenue en vie,elles ont quatres mois,elle avait signé,pour maintenir ses jumelles en vie.Les gens sont injustes des fois lorsqu'ils sont poussés à haïr.C'est ce qu'ils ont vite compris,et ces deux jumelles vont pouvoir fêter la première fête de Noël de leur vie.

On était dans cette hutte,avec des containers de récupération d'eau de pluie et de neige fondue,et des livres de desserts lettons,qui ne servaient qu'à nous faire saliver inutilement,sur les bords.Lasse,le suédois,était pris d'une compassion énorme pour Markas,letton mais pas chrétien.Il y avait également des finnois et des lituaniens dans ce camp,mais ils étaient entre eux.On aurait bien tenté de réfléchir aux desserts qu'on allait bien pouvoir cuisiner,mais on avait pas de fours,pas de salles de cuisine pleines de monde où travailler.Et même pas de cuisine dans cette exploitation agricole où nous pourrions subtiliser un peu de nourriture.Nous n'avions pour ingrédients que des baguettes de pain et des pommes de terre.De toute façon,nos desserts préférés prenaient quatre heures à cuire.

L'un des gardes nous avait surpris,mais il ne s'était contenté que de jurer en russe.C'était très vulgaire,c'est ce que maman m'a expliqué,hésitant à traduire.Moi,j'étais tellement nerveuse que j'avais explosé de rire,c'était la fatigue,c'était la situation.L'idée de pour une fois ne pas être traînée sur le sol glacé devant les autres qui nous dévisageaient.Comme lorsqu'on faisait des batailles de nourriture à l'école primaire et que les heures de colles n'avaient aucun effet sur nous.Et alors que la situation était beaucoup plus grave,j'étais prête à assumer l'entière responsabilité de mes actes.J'étais prête à assumer les conséquences de mon impardonnable naissance.

Ces réunions à la veille de Noël,c'était comme si on allait bientôt aller mieux alors que c'était pas vrai.C'était comme si on allait lancer à ce monde en guerre des centaines de lanternes multicolores.Comme si on allait sacrifier au monde nos dernières forces d'espoir pour montrer que même lorsque nous avons l'air mort,nous sommes vivants.Et nous allons célébrer la Noël.


Les bourgeons de la Haine [Between shades of gray fanfic]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant