Les bourgeons de la Haine [Between shades of gray fanfic]

Chapitre 45A:La fin du premier hiver.

J'ouvris les yeux,éveillée par des rayons de soleil particulièrement chauds qui filtraient à travers la canopée.J'ai attrapé l'épaule de Wladek ,le plus discrètement possible.J'ai bougé légèrement son poignet,et j'ai vu que nous avions dormi jusqu'à 8 heures du monde.On a dormi très longtemps.Les nazis devaient déjà être réveillés.

Les deux enfants étaient déjà levés.Ils jouaient près du ruisseau.On s'arrêtait toujours près d'un ruisseau.Je nous ai regardé,et à huit heures du matin,à peine réveillée la joue collée contre des feuilles:chaque polonais a son taux de judéité dans l'âme,comme chacun a son taux de mélanine,ou de dimension dans l'ego.Dans sa position de civilisation souvent sans terre et victime,elle s'inspire du modèle juif.

-Bon,on mange ce matin?ai-je dit à la place.

Il y avait un contraste:nous étions érudits,civilisés,sans avoir de civilisations.Peut-être qu'il allait nous falloir une terre pour nous épanouir finalement,ai-je dit en me levant sur mes jambes tremblantes.Au sein de l'état,il semblait qu'on nous avait oublié.Ce n'est pas comme si il y avait d'autres innocents à tuer,ce n'est pas comme si nous étions des hors la lois au Moyen âge.C'était ce qui pouvait nous arriver de mieux et je ne pouvais m'empêcher de réjouir.En plus,nous allions peut-être avoir un peu moins froid,manger un peu autre chose que de la viande.C'est alors que deux miracles,croyez-le ou non,s'opérèrent dans la même journée.

D'abord,nous avons déterré des pièces sous des couches de feuilles mortes.De quoi rapidement aller nous payer du pain au pavot et au tournesol.Il fallait rapidement trouver où les dépenser.

-Y a une petite boulangerie à l'entrée du village,a signalé Ania d'un ton détaché.

-Oh merci,de nous prévenir!

Je me suis approchée de ce qui semblait être un stand de plage de Gdansk transposé dans une forêt froide et continentale.L'achat fut d'une étonnante simplicité,la ville vendeuse semblait presque aveugle et extérieure au monde,la forêt derrière elle la mettant en valeur comme sur un carte postale.Je l'ai remercié chaleureusement,sans accent,serrant dans ma main le pain obtenu,que j'ai acheté moi même et non volé,ce qui le rendait si précieux.J'ai pris le pain dans un sac,ce qui demandait un réel effort de contrôle tant j'avais faim,puis j'ai voulu m'éloigner un peu pour partager en cinq.J'avais déjà vu des bonbons divisés en cinq parties,si petites,séparées moins pour le goût que pour les calories qu'ils apportent.Ainsi,ce n'est pas parce que je me sentais physiquement faible et mourante,que j'allais forcément mourir.

-Haha,ai-je fait devant des enfants surexcités,voilà la merveille des merveilles!

J'ai demandé de l'aide à Waldek pour la partager.Ania remercia son frère et engloutit le pain.Quand j'ai mangé le pain à mon tour,j'eus l'impression de dire adieu au monde,de jeter mon visage dans l'eau fraîche et délicieuse.L'expression de Waldek,elle,changea d'une manière brutale que je fus seule à percevoir sans doute,les autres n'avaient pas les yeux ouverts.Si j'avais cru que les sauvables,comme je les appelais parfois,nous reconnaîtraient comme juifs au faciès,cela ne semblait plus être le cas à présent.Mais ça allait être le cas à cause de notre absence d'identité.

Je ne savais pas pourquoi dans ce monde où soupçonnaient d'être juifs tout ceux qui n'étaient pas blonds aux yeux bleus.La mentalité des nazis était-elle si universelle?Alors pourquoi Hitler était brun?

Alors le monde entier avait bien un comportement dérangé.J'en arrivais à cette conclusion tous les jours quoi qu'il arrive,et cela me donnait encore plus envie de survivre.

-J'aurais peut-être de quoi manger jusqu'à devenir adulte!a dit Ania en riant,exposant un théâtre buccal que je préfèrerais oublier.

Oh,cette phrase.Du miel sulfurique sur mon coeur.Je suis bien placée pour savoir que ce groupe est très ouvert,mais l'étendre nous donnerait surtout plus de bouches à nourrir.