Minuit dix-sept, de gros nuages camouflent la lune, alors qu'une légère brume a partiellement investi la ville, apportant un air sinistre au quartier.
Charline gare la Clio en espérant mettre un terme à cette horrible journée. Les phares mettent en évidence le mouvement de la brume qui avale lentement la rue. De cette vapeur dévorante surgit le souvenir de ce fameux jour de juillet, quand Yvan lui a retiré les roulettes de son vélo...
« Tout ça remonte à si loin. Tout ça est perdu depuis longtemps », se désole-t-elle intérieurement en éteignant les phares pour sortir du véhicule.
Les réverbères éclairent la modeste maison familiale, avec sa palissade blanche et ses volets rouges. La lueur artificielle traverse le voile brumeux et laisse deviner le chêne centenaire qui prend ses aises dans le jardin, auquel un vieux pneu de voiture avait été suspendu par Yvan, une éternité plus tôt, pour faire une balançoire à sa petite sœur.
En larmes, Charline prend son sac et court vers la maison pour gravir les marches du perron, prête à être assaillie par les murmures des souvenirs qui vivent dans ce lieu chargé de leur histoire.
8 h 06, Charline se lève après une nuit agitée, son mal de crâne l'accompagne sous la douche, puis lui conseille une tenue décontractée et la suit à la cuisine pour un café. Rapidement, elle prépare quelques affaires pour sa mère et quitte la maison direction l'hosto...
15 h 37, choquée. Charline est choquée et plantée dans le couloir en face de la chambre d'Yvan. Elle a passé la journée avec Jeanne et Émilie à l'hôpital. Elles étaient là quand les machines auxquelles Yvan est relié se sont mises à biper... Infirmières et médecin leur ont demandé de quitter la chambre, depuis l'attente est aussi insoutenable qu'interminable.
16 h 08, le verdict tombe enfin : les médecins ont réussi à ramener Yvan à la vie, qui est mort durant trois minutes, privant son cerveau d'oxygène. Yvan est revenu, mais il est dans le coma, ajoutant d'autres incertitudes aux possibles séquelles de son accident.
Les médecins leur conseillent d'envisager le pire et parlent de don d'organes en cas de mort cérébrale, mais il est surtout question de temps. Le temps est une variable incontournable pour leur permettre de suivre le pronostic vital d'Yvan et de prendre les décisions qui s'imposeront.
Les médecins tiennent également un raisonnement juste et posé, incitant Jeanne, Charline et Émilie à prendre du repos ou à effectuer des visites séparées pour leur permettre de continuer à vivre en dehors de cet endroit et de prendre du temps pour elles.
16 h 48, émue et l'esprit assailli de "si", Émilie quitte l'hôpital pour s'occuper de sa fille.
19 h 27, maison familiale
Charline a reconduit Jeanne. Assises l'une en face de l'autre à la cuisine, la fatigue et l'inquiétude leur nouent l'estomac tout autant que ça leur coupe l'appétit.
— Il va s'en remettre, affirme Jeanne en ouvrant et refermant son téléphone portable.
— Ils ont parlé de dons d'organes, marmonne Charline.
— On doit être fortes pour Yvan, objecte Jeanne.
— Mais...
— C'est mon fils et je rejette l'éventualité qu'il meure avant moi, lance Jeanne au bord des larmes.
Charline, qui n'a pas les mots pour répondre à sa mère, tourne son attention vers la fenêtre et observe le chêne dans le jardin... Le centenaire affiche ses couleurs automnales avec panache.
— Il va s'en sortir, souffle Charline avant de soutenir le regard de sa mère.
20 h 13, le tambourinement à la porte d'entrée agace Charline qui va ouvrir à l'importun. Elle l'étudie, certaine de connaître le trentenaire aux cheveux bruns coupés courts, mais sa barbe de quelques jours lui mange le visage et la mémoire de la jeune femme lui fait défaut.
— Jeanne est là ? demande le visiteur, visiblement étonné de voir sa fille.
— Elle dort, répond Charline en gardant la porte à peine entrouverte.
Le visiteur approuve l'annonce d'un hochement de tête et lui tend une enveloppe :
— Tu lui donneras ça, ordonne-t-il.
Charline prend l'enveloppe et regarde à l'intérieur alors que le visiteur tourne les talons pour rejoindre sa moto.
— C'est quoi ce bordel ? marmonne Charline face au contenu.
Charline rattrape l'inconnu et se plante devant lui pour l'empêcher de monter sur sa bécane, qui est garée dans l'allée du garage.
— Mais t'es qui, putain ? s'inquiète-t-elle en lui tendant l'enveloppe.
— Un ami, répond-il en la toisant.
— Tu parles, connard ! s'exclame-t-elle en réalisant qui elle a en face d'elle. Putain, je me rappelle de toi, s'écrie-t-elle. T'étais un p'tit dealer notoire quand Yvan était au lycée.
Charline insiste et lui tend l'enveloppe, alors qu'une autre moto se gare le long du trottoir.
— C'est de l'argent sale de ton trafic de merde, alors reprends ça, lui ordonne-t-elle.
— C'est pour aider Jeanne, crache-t-il en faisant un pas menaçant vers Charline.
— D'où tu connais ma mère ? s'étonne-t-elle.
— Fais pas chier, grogne-t-il en fronçant les sourcils.
— Du calme, Vince, clame H en se plaçant entre eux.
— Elle me prend la tête, crache Vince en contractant les mâchoires.
— J'vois ça, s'amuse H, mais c'est la frangine d'Yvan, tu piges !
— M'prends pas pour un con, crache Vince en tendant un index menaçant.
— D'où tu connais ma mère ? s'énerve Charline, furieuse d'être mise à l'écart.
— J'la connais, c'est tout ! grogne Vince.
Vince se tourne vers H :
— Essaie de convaincre cette conne de garder le fric, lui ordonne-t-il.
Charline affiche un air indigné :
— Va te faire foutre, enfoiré, s'insurge-t-elle.
H soupire d'agacement en attrapant Charline par le bras pour la faire avancer vers le garage.
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Une Cage et des liens 🔞 ( terminé)
RomantizmSpin off de Boomerang Vince, H et Patrick sont Les Fondateurs de la Cage : Ils organisent des combats MMA clandestins. Ils mènent chacun une double vie, mais sont liés par une amitié de longue date. Amitié, amour, danger et combats sont inextric...