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- Lâche-moi.

Je ne hurle même pas. J'ai juste murmuré mes deux pauvres mots. Comme si j'étais si fragile que le simple fait de hausser la voix aller me briser. Mais il ne fait rien. Il m'aide à me relever. Aucun de nous ne décoche un mot. Je reste plantée devant cette foutue porte et lui reste derrière moi.

Je tente de me débattre, sans réellement de conviction, mais je peux à peine bouger. Il ne va pas me lâcher. Je laisse un soupir s'échapper.

- Tu sais qu'Alby va plus jamais te laisser tranquille maintenant ? Demande-t-il finalement.

Il est plus proche que ce que je pensais car je sens son souffle dans mon cou.

- Je m'en tape d'Alby.

- Mary...

Je tente de chasser mes fichues larmes face à son ton plaintif mais c'est de plus en plus difficile. Pourquoi il ne m'a pas laissée y aller ? Pourquoi ?

Je remarque à peine qu'il m'entraîne loin du labyrinthe. Je suis toujours dos à lui donc je ne peux voir son expression. Mais je ne veux pas me retourner. Je ne veux pas quitter des yeux les portes. C'est impossible.

La douleur refait surface. Elle transperce chacun de mes muscles, de mes os. Sauf que je reste la tête haute. Je ne pleure pas. Je ne me laisse pas aller. Je dois être forte. En tout cas, je dois essayer.

Tous les autres blocards dorment encore. Il finit par me lâcher. On est à l'opposé des dortoirs, vers la forêt. Je ne bouge pas. Je fixe un point dans les arbres. Il se déplace. Il est devant moi.

Il ne dit rien. Son regard se plonge dans le mien. Le silence est pesant. Mais il ne me dérange pas.

- Pourquoi tu fais ça ? Je finis par demander.

- De quoi tu parles ?

- Pourquoi tu ne m'as pas laissée y aller ?

Pas de réponse. Je soupire. Il commence à partir.

- Je vais parler à Alby pour essayer de le calmer.

Il paraît hésiter avant de rajouter :

- Et disons juste que je ne supporte plus de voir des gens mourir les uns après les autres.

En disant ces mots, il s'en va vers l'infirmerie et me laisse seule. Je suis perdue. Je ne sais plus quoi faire, plus quoi dire, plus quoi penser. Je sens que mon état s'aggrave. Pas physique. Celui-là va à peu près bien. Non, celui mental. J'ai l'impression qu'à tout moment je vais exploser.

Un sentiment d'oppressement me comprime le corps. Du mouvement se fait au loin. Je vois quelqu'un se lever. La personne marche. Vers moi.

Je n'arrive pas encore à distinguer qui c'est. Au bout de longues minutes, je comprends qu'il s'agit de Thomas.

Il continue son avancée. Il arrive en face de moi.

- Newt m'a expliqué, dit-il simplement.

Je ne réponds rien.

- Je suis désolé d'avoir autant insisté la dernière fois.

Aucun son ne veut sortir de ma bouche.

- Ça va ?

Je tente de dire oui mais ma tête répond indépendamment de mon esprit. Elle fait un grand non en se tournant de gauche à droite. Et là, je la sens. L'explosion. Les larmes que je retiens depuis toute à l'heure coulent sans s'arrêter. Je peine à respirer mais je me mets à hurler.

Je ne comprends même pas ce que je dis. Trois autres personnes arrivent en courant en m'entendant mais je suis trop aveuglée par ma propre haine et tristesse. Je ne vois rien. Je n'entends rien. Je ne sens rien.

Je suis autre part. Sur un bateau qui brave des vagues de sentiments qui déferlent sans jamais se calmer. Mais le bateau coule de plus en plus. Il me submerge et me rend à la fois vulnérable et intouchable. Je suis un parfait mélange entre une proie que l'on peut déchirer au moindre coup de griffe et un prédateur affamé capable de briser le monde entier avec un simple regard.

Je suis un animal dangereux. Pourtant, moi, je ne me suis pas faite piquer. Non. J'ai subi la pire des tortures. Celle de l'implosion. Celle-là, oui. Celle qui détruit tout alors qu'on a rien demandé. Juste un surplus de douleur qui n'arrivait pas à s'échapper. Après, il n'y aura plus rien.

Je sais que quand tout aura volé en éclat, j'irai mieux et je reprendrai pleinement le contrôle de moi-même. Ma bouche s'ouvre et se ferme. Je suis en train de parler. De crier. D'hurler. Sauf que je ne sais pas ce que je dis.

Soudain, plus rien. Néant. Mes hurlements cessent. Je vois à nouveau. Six personnes sont autour de moi, à me regarder comme si j'étais un fantôme. Mes mains tremblent. Je soupire. Ils sont choqués. Je me risque à poser la question qui broie mon cerveau depuis quelques minutes.

- Qu'est-ce qu'il s'est passé ?

Au premier regard | Newt & MarylynOù les histoires vivent. Découvrez maintenant