𝕮𝖍𝖆𝖕𝖎𝖙𝖗𝖊 69

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La jeune femme n’était plus que rage et fureur. Les éléments se déchaînaient en écho à son esprit ravageur, libérant leur toute puissance sans se soucier de qui faisait office de victime. Une à une et à une vitesse ahurissante, les pierres de la tour se détachèrent, volants en tous sens, gravitant autour de la Faeria, heurtant les bâtiments alentour, s’écrasant sur le sol, manquant parfois de peu tel ou tel combattant. Elle n’en avait cure. Seule lui importait la sensation de plénitude procurée par la magie qui se déchaînait en elle et hors d’elle. La satisfaction qui s’empara d’elle lorsqu’un pan de mur du palais s’effondra, ouvrant une énorme brèche qui couvrait plusieurs pièces, était indescriptible. Elle était définitivement née pour cela. Le chaos, la destruction… La liberté.

    Et puis elle le vit. Elle n’eut aucun mal à reconnaître ce maudit visage qui hantait ses cauchemars, ce tortionnaire immonde, responsable des sévices qu’avaient subis Emelia et les siens. Certes, c’était un des hommes de l’empereur immonde à la tête de ce pays, mais il prenait réellement du plaisir à mutiler, torturer et massacrer ses victimes. Il se repaissait de leurs souffrances… Soit. Elle se repaîtrait des siennes ! 

    Un sourire tordu sur les lèvres, ses yeux, presque noirs de haine, grands ouverts, fixant sa proie, elle se fit descendre par les airs et se posa entre lui et le mage qui lui faisait face, hache à la main. Draigh, le loup gris maniant la hache de vent, sentait la magie qui émanait de la créature qui venait de se poser entre son adversaire et lui et qui, visiblement, n’avait cure de sa présence. Son aura, par contre, l’oppressait. La magie semblait prendre possession d’elle, envahir chacun de ses organes, gorger ses veines de puissance et de rage, affûter ses sens mais ensevelir son esprit. Cette énergie était comme douée de volonté et pensait à sa place, dirigeant son esprit et son corps aussi aisément qu’on tirerait les ficelles d’une marionnette. Cela lui fit froid dans le dos, à lui, le loup de plus de deux siècles qui avait affronté par six fois les monstres de la forêt des bêtes et chaque fois en était revenu entier. Tremblant, il recula prudemment, s’éloignant pas à pas de ce foyer de rage qui menaçait de l’engloutir à son tour. Mais tant de précautions étaient inutiles, la Faeria ne lui jeta pas même un regard. Elle avait plus intéressant devant elle. 

    Mayna…

    « Alors, voilà celui qui s’est tant délecté de la souffrance de ma bienfaitrice et des siens… »

    Sa voix n’était qu’un sifflement ignoble et strident lâché entre ses dents serrées. Elle avait fait de lui l’objet de sa rage et comptait bien qu’il subisse son châtiment. 

    « Plaît-il ? » Piaffa Godfray. « Je n’ai certes pas pour habitude de torturer tous ceux qui se présentent à moi mais, il s’avère que je suis particulièrement doué dans ce domaine. Pourriez-vous préciser votre demande ? De qui parlons nous, au juste ? »

    « N’avez-vous donc aucun souvenir de la maîtresse de la maison tisserande qui borde les montagnes du sud ? »

   

    Un rictus s’imprima sur son visage, sa nature arrogante l’empêchant de voir le danger. Ou peut-être se croyait-il capable de s’en sortir, lui, le fin limier.

    « Je me rappelle de cette péronnelle, la bourgeoise aux cheveux d’or… J’aurais certes aimé goûter à sa chair, mais le temps m’a manqué. Je me console régulièrement en pensant à son esclave d’ailleurs… » 

    Serrant les dents, Mayna lui envoya un bloc de pierre au visage en guise de réponse, mais il l’esquiva facilement, parant le coup de son épée tout en reculant.

⸙ Faeria ؞ Fille de la Forêt ⸙Où les histoires vivent. Découvrez maintenant