Elles furent réveillées par une Béti à l'air inquiet. Les secouant doucement, la cuisinière ne comprenait pas comment les trois jeunes femmes avaient pu passer la nuit sur la terrasse ainsi enlacées, sans qu'une des trois ait pu avoir l'idée de mener les autres à leur lit ou d'appeler le personnel pour qu'on les y transporte. La fête avait, certes, continué jusqu'au petit matin mais tout de même...
« Madame ! Mais enfin... Madame ! Il faut vous réveiller ! »
« Humm Bétricia... Vous en faites du bruit... Que diable vous arrive-t-il ? »
« Par les dieux... Mais Madame ! Vous avez dormi sur la terrasse ! A peine couverte, à même les coussins, et emmêlée dans les bras de vos amies ! Mais comment en êtes vous arrivées à vous assoupir ici ? »
« Ah... Nous avons parlé et... Je ne sais plus... Allons Béti, soyez aimable de nous préparer de quoi nous restaurer, et surtout de quoi étancher notre soif. La nuit a été longue. Je vais réveiller les autres. Allez allez ! »
Béti s'exécuta, non sans un regard contrarié et une moue peu convaincue, au soulagement d'Emelia. La maîtresse de maison avait menti, elle savait très bien comment elle en était arrivée à s'endormir de la sorte et ne regrettait rien. Si sa proximité avec ses deux amies pouvait soulever des questions, elle n'en avait cure et se préoccupait surtout de l'état de Mayna. Cette dernière semblait apaisée, dans son sommeil. Nulle grimace ne venait déformer ses traits juvéniles et ses larmes avaient séché, laissant des traînés salées à peine perceptibles sur son visage. Elle respirait doucement, encore plongée dans un profond sommeil qui, l'espérait-elle, l'avait aidée à évacuer les tourments passés.
Elle se prit à sourire, partagée entre plusieurs sentiments, le bonheur d'avoir pu l'aider et de savoir que Mayna leur accordait assez de confiance pour leur confier cet épisode particulièrement difficile de son passé, la peine de savoir à quel point elle avait pu souffrir sans que ça n'ait été mérité, innocente et douce qu'elle était, la colère contre ce montre qui dirigeait l'alliance des hommes, terré dans son palais, qui avait eu la cruauté de l'enfermer et de lui faire vivre cette monstruosité supplémentaire... Elle espérait que la jeune femme réussisse à passer outre et à faire son deuil, les mois ayant passé depuis. Lui caressant tendrement les cheveux, les premiers rayons du soleil dansant dans sa chevelure flamboyante et lui donnant des reflets dignes d'un vrai rubis, elle entreprit de la réveiller, Tany se frottant déjà les yeux sur son coussin. Quand Mayna les ouvrit à son tour, elle réprima un soupir. Elle avait les yeux rouges et gonflés, les lèvres sèches et ses traits était tirés. Elle se contenta, pour faire bonne figure, de la prendre dans ses bras et de l'embrasser tendrement sur le front avant de se lever et de l'aider à faire de même. Tany se joignit à elles en se frottant le visage.
« Bonjour maîtresse. Mayna... Ma belle, comment te sens-tu ? »
Mayna ne savait que répondre. A dire vrai, elle ne savait pas comment elle se sentait. Sa peine était toujours présente, elle le sentait, mais... elle avait l'impression de l'avoir étouffée, comme dissimulée derrière un rideau ou enfermée dans une boîte, atténuant ainsi sa morsure. Elle ne se sentait pas joyeuse pour autant, mais elle n'avait plus peur. Cette vérité lui parût surprenante, presque incroyable. Elle ne savait qu'en penser, aussi elle n'en parla pas en détail.
« Je... ne me sens pas mal. Je crois. »
« C'est déjà un formidable progrès, à mon sens. » Répondit Emelia en prenant délicatement son visage entre ses mains. « Si un jour, tu veux parler plus en détail de ce qui t'es arrivée, de ce que tu as vécu, sache que tu trouveras toujours en nous une oreille attentive. Jamais nous ne te jugerons. Pour l'heure, je suis contente que tu te sentes mieux. Mais j'aimerais tout de même éclaircir un point. Sache une chose, la mort tragique de ton ami... Tu n'es en rien responsable. Le seul fautif, c'est l'empereur. Il est le seul à pouvoir décider d'une telle mesure et je sais pertinemment que si tu en avais eu la possibilité, jamais tu n'aurais laissé ton ami périr de la sorte. Tu es une jeune femme merveilleuse, Mayna. Tu nous as apporté beaucoup de bonheur, grâce à toi, nous avons retrouvé le goût à la vie, nous savourons chaque jour comme s'il était un don des dieux. Rien n'est de ta faute. Sois-en persuadée. »
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⸙ Faeria ؞ Fille de la Forêt ⸙
FantasíaMayna a passé toute sa vie entre les murs froids d'une cellule de pierre, avec Damian, un des serviteurs de l'empereur, pour seul contact avec le monde extérieur. Mais la requête de l'empereur la fera s'enfuir à toutes jambes, suivant son instinct q...