⸙ Faeria ؞ Fille de la Forêt ⸙

𝕮𝖍𝖆𝖕𝖎𝖙𝖗𝖊 30

Noctaline l'avait conduite jusqu'aux rives d'un grand fleuve qui s'écoulait de la montagne et se divisait en plusieurs bras pour rejoindre l'océan. Mayna admirait la clarté de ces eaux, leur pureté et leur transparence. Elle se risqua même à retirer ses souliers, emprunt qu'elle avait fait à la sage guérisseuse, pour y tremper les pieds. L'ancienne riait aux éclats devant la mine ravie de la jeune femme qui laissait de petits poissons venir lui picorer les pieds et jouait avec la mousse des berges qui s'étendait en de longs et doux filaments duveteux tout le long de la rive. 

    L'ancienne avait l'impression que Mayna retombait en enfance, s'émerveillant de tout et de rien. Elle avait passé plusieurs heures à lui détailler les magnifiques paysages que comptait la Lande et les créatures diverses qui la peuplaient. Notamment les fées, petites créatures volantes, malicieuses et grandes tisseuses, gardiennent de la trame du destin, les sylphes et autres créatures de la nature qui faisaient pousser les fleurs et les arbres, danser le vent et chanter l'eau. Mayna buvait ses mots comme on boirait une eau fraiche en pleine chaleur et s'en délectait. Sa soif d'apprendre était toujours aussi vive et inextinguible. Aussi, Noctaline entreprit de l'instruire sur la vie de l'île. Outre la géographie bien particulière de l'île, Noctaline lui donna de précieuses informations sur les peuples de mages, répartis en différentes castes, qui la peuplaient ainsi que sur les membres du conseil devant lesquelles elle devrait bientôt faire ses preuves. 

    Les Guérisseurs, le clan de Noctaline, étaient, tout comme les Changeformes, les Elementaux et les Voyants, issus d'un lignage. Ils tenaient leurs pouvoirs d'un de leurs parents, au hasard la mère ou le père. Ainsi, si deux lignées venaient à se croiser, l'équilibre déciderait si l'enfant serait membre de l'une ou l'autre des lignées. Les Erudits et les Enchanteurs, par contre, formaient deux clans bien restreints, liés par l'apprentissage. Si les Erudits préféraient l'histoire et la théorie, connus par tous comme de véritables  sages aux connaissances presque illimités, les Enchanteurs, eux, préféraient de loin la pratique. 

    Les Guérisseurs, représentés au conseil par Ziane, douce et sage, et par Orcho, peu loquace mais grand médecin de l'île, avaient une connaissance presque innée des plantes et des minéraux magiques et médicinaux. Potions, élixirs et onguents n'avaient aucun secret pour eux, leurs formules se transmettant de génération en génération par les anciens du clan. Certains se trouvaient plus aptes que d'autres dans certains domaines et en faisaient leur spécialité, mais rares étaient les incompétents et ils étaient en général volontaires pour devenirs érudits, abandonnant de ce fait les pratiques de leur clan natal. Leur magie bien spéciale leur permettait d'activer, en quelque sorte, les dons naturels de ces éléments et de les faire agir sur le corps ou l'esprit de tout être vivant ciblé. Cependant, ils étaient incapables de se guérir eux-mêmes et succombaient bien souvent à des maladies qu'ils avaient contractés en soignant leurs patients.

    Les Changeformes, représentés par Mestrel le loup et Jenis la biche, aussi craints que les Elémentaux, étaient issus du plus ancien lignage de l'île. Si autrefois tous les mages pouvaient changer de forme, eux seuls avaient conservé cette étonnante capacité, bien qu'elle fut désormais limité à un animal en particulier, leur totem, leur alter égo, qui leur donnait, même sous forme humaine, des capacités extraordinaires. Ils gardaient d'ailleurs souvent les traits de leur animal, par la couleur ou la forme de leurs yeux, la couleur de leur cheveux, leur pilosité, leur carrure... Cependant, vivre avec l'âme d'un animal avait un coup. Ils devaient, pour leur survie et leur santé d'esprit, cultiver leur force et développer un mental d'acier, sans quoi, la moindre transformation épuiserait leur corps, la magie nécessaire à la transformation brisant à chaque fois leurs corps, ou les conduirait à la folie, l'animal prenant le dessus. C'était d'ailleurs la raison de leur marginalité, les Changeformes n'ayant su se contrôler pouvant causer d'énormes dégâts et tuer de nombreux mages avant d'être arrêtés.