⸙ Faeria ؞ Fille de la Forêt ⸙

𝕮𝖍𝖆𝖕𝖎𝖙𝖗𝖊 22

Emelia ne put retenir une plainte douloureuse en sentant les ongles de Mayna s'enfoncer dans la chair de sa main. Elle ne comprit pas le brusque changement d'attitude de son amie qui, jusqu'alors, semblait profiter du moment et même le savourer. Tany, qui avait entendu la plainte de sa maîtresse, se tourna vers elle, perplexe et inquiète de constater l'état de Mayna.

« Mais, enfin... Que t'arrive-t-il ? »

Sa question resta sans réponse, Mayna ne pouvant tout simplement détacher son regard des hautes flammes qui dansaient devant elle et éclairaient la plage d'une lueur qu'elle trouvait tout à fait terrifiante. Emelia prit le relai de Tany et, se levant de son siège, attrapa la jeune femme sous les bras pour la forcer à bouger. Elle se doutait, d'après sa réaction à la plaisanterie de Tany, que c'était le feu qui lui faisait peur, mais elle ne comprenait toujours pas pourquoi. Elle n'avait jamais trouvé l'occasion d'aborder avec Mayna son passé et le traumatisme qui semblait toujours la hanter, mais elle se dit que c'était peut-être le moment d'évacuer ce malheur de ses pensées.

La tirant par le bras, Tany ouvrant la marche, elles rejoignirent le chemin qui menait à la maison, sans éveiller le moindre soupçon, les fêtards étant maintenant occuper à se servir en viande grillée et légumes cuisinés. La demeure était vide, tous les employés s'étant rendus sur la plage, elles purent donc la traverser sans rencontrer d'obstacle ni répondre à d'éventuelles questions indiscrètes. S'installant dans le jardin baigné de la douce lumière de la lune, elles patientèrent, le temps que Mayna calme ses tremblements et ses sanglots silencieux.

Quand elle fût calmée, Tany se dépêcha d'aller chercher du thé frais, de l'eau fraîche et des linges, qu'elle puisse se rafraichir et boire un peu, ce qu'elle fit avec empressement. La nuit était bien avancée quand, seulement éclairée par la lune et les torches à huile de la terrasse de toit, elle réussit à adresser un pâle sourire à ses amies. Tany, comme à son habitude, se jeta à son cou tandis qu'Emelia lui caressait affectueusement les cheveux.

« Je... Je suis... tellement désolée... J'ai gâché... votre soirée... Je... » Commença Mayna dont la voix tremblait tant qu'elle lutait pour prononcer le moindre mot.

« Mais non, ma belle. » Répondit doucement la maîtresse de maison. « Tu n'as rien gâché du tout ! Notre soirée aurait été gâchée si nous ne l'avions pas passée en ta compagnie. Je préfère nous savoir ici, avec toi, plutôt que te savoir seule dans cette maison à tourner en rond ou à te morfondre dans la bibliothèque. Ta réaction nous a réellement surprises, je te l'accorde, mais ne te sens pas coupable pour autant. »

« Oui, la maîtresse a raison ! » Ajouta encore Tany. « Tu comptes pour nous, il faut t'en rendre compte, ta détresse nous touche et nous importe bien plus que quelques festivités locales. »

Mayna, don le cœur s'était réchauffé sous les mots de ses amies, senti une vague de chaleur se diffuser dans sa poitrine et s'écouler sur son visage. Rendant son étreinte à Tany, elle tendit la main à Emelia qui s'en saisit sans attendre et la serra dans la sienne. Elle tremblait de tout son corps, si bien qu'elle claquait des dents et peinait à respirer. Son souffle erratique devenait presque douloureux et sa respiration sifflante l'agaçait autant que sa réaction. Malgré tout, elle se sentait chanceuse de les avoir à ses côtés. Elle avait énormément de tendresse pour ces deux femmes qui lui avaient redonné goût à la vie et leur était reconnaissante pour tout ce qu'elles avaient fait pour elle. La confiance qu'elles lui accordaient était précieuse à ses yeux, tout autant que leur amitié et leur enseignement. Elle se disait, à l'instant, qu'elle n'aurait pu supporter une telle situation sans les bienfaits de leur présence à ses côtés.

« Mayna, ma belle... » Commença Emelia, « J'aimerais que tu nous dises pourquoi le feu te fait réagir de la sorte. Tu n'en as pas peur, je t'ai vu plusieurs fois allumer et entretenir la cheminée à la maison principale. Il t'est arrivé quelque chose de grave ? Quoi qu'il en soit, il ne faut pas que tu gardes cela pour toi. Je sais que c'est difficile mais... »