⸙ Faeria ؞ Fille de la Forêt ⸙

𝕮𝖍𝖆𝖕𝖎𝖙𝖗𝖊 27

Mayna ne savait pas où elle était. Rien ne lui était familier, ni les murs recouverts de bois et de meubles en tout genre qui l'entouraient, ni le lit moelleux sur lequel elle reposait, ni le visage tiré de la femme qui se tenait au dessus d'elle. Elle semblait âgée, ses cheveux parsemés d'éclats argentés et son visage ridé en témoignant, mais semblait calme et douce. Ses petits yeux clairs la fixaient avec attention et curiosité et semblaient vouloir lire en elle. La jeune femme trouva cela fort désagréable, bien que rassurant. Portant sa main à son front, elle sentit sous ses doigts une étrange mixture qui sentait l'herbe et la terre et lui réchauffait la peau. Ne comprenant pas, elle se redressa et chercha du coin de l'œil de quoi s'essuyer les doigts.

La femme lui tendit une serviette humide pour qu'elle se nettoie les doigts et le visage et prit place sur une chaise à côté du lit. Bien qu'elle ne paraisse pas hostile, Mayna se méfiait. Elle ne savait que trop bien que les apparences pouvaient être trompeuses et ne voulait prendre aucun risque. Elle pinçait les lèvres, immobile ou presque, incapable du moindre geste volontaire, quelques tremblements secouant par moment imperceptiblement ses mains et ses épaules. Elle n'avait même pas cherché à tendre le morceau de tissu à la femme après s'être nettoyée et se contentait de la fixer à son tour, incertaine et effrayée. Elle avait vécu trop de séparations, perdu trop de monde, la maison où elle vivait lui était interdite, elle ne voulait pas en plus mal agir envers cette personne et s'en faire une ennemie. La vieille se pencha vers elle sans prévenir, ce qui la fit alors reculer au fond du lit, contre le mur, et se recroqueviller sur elle-même.

« Bah nous v'là bien... » Commença-t-elle. « Allons, du calme ma p'tite. Je n'suis pas bien méchante. Par contre, trouver une fille sur la plage, vivante, et en bon état, c'est un sacré petit miracle, si tu veux mon avis. Tu aurais du voir ma tête ! Ah, non, tu ne pouvais pas, tu étais inconsciente... Bon, je parle beaucoup, mais dis-moi, comment t'appelles-tu ? »

Mayna, toujours perdue, se mordit la lèvre, se retenant d'émettre le moindre son. Si elle lui donnait son nom, si elle parlait, alors la vieille voudrait certainement en savoir plus, et cette conversation, elle n'était pas certaine de pouvoir la tenir.

« Allons bon, me v'là flanquée d'une muette ! Je ne mors pas ma jolie. Je suis peut-être sorcière mais je ne suis pas un monstre ! »

« Sorcière ? »

Mayna se mordit à nouveau les lèvres, grimaçant sous l'effet de la douleur. Elle ne comprenait pas pourquoi cela lui faisait mal alors qu'elle avait déjà eu ce geste par le passé sans conséquences. Portant ses doigts à sa bouche, elle comprit. Ses lèvres étaient totalement sèches, tirées, gercées. Même sur leur pourtour, la peau pelait et se détachait par endroits, révélant sa chair meurtrie et sanguinolente. Ses yeux, rougis, avaient du mal à faire le point. Heureusement pour elle, la vieille ne bougeait pas beaucoup, ce qui lui évitait de la voir trop floue. Sa tête lui faisait mal, tout comme ses doigts écorchés et ses mains abîmées. Elle avait des cloques sur les bras, certainement dues à sa longue exposition au soleil. Oui, elle était dans un bien piètre état.

« Oui, tu n'es pas en grande forme ma petite. Et oui, je suis une sorcière. Une vraie. Mais comme je t'ai dit... »

« Oui, je sais que les sorcières ne sont pas mauvaises. Je le sais bien. »

« Et comment sais-tu cela ? »

« On m'a dit il y a peu que... que j'en suis une, moi aussi. »

Noctaline ne put dissimuler sa surprise. On lui avait dit il y a peu ? Quelle étrange manière d'apprendre ses origines ! Normalement, toutes les sorcières savaient qui elles étaient, et ce depuis leur plus tendre enfance, lorsqu'elles étaient en âge de développer leurs premiers dons... Encore un mystère que le conseil devrait élucider. Secouant la tête, elle se décida à ne pas chercher plus de réponses pour le moment et se contenta de se lever, parlant doucement à son invitée.