𝕮𝖍𝖆𝖕𝖎𝖙𝖗𝖊 20

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Mayna commençait à s'affoler. Seule, perdue au milieu de la foule et des étals, elle ne savait plus d'où elle venait ni par où elle devait aller. Elle tournait en rond, cherchant vainement du regard ses deux compagnes qui s'étaient volatilisées sans qu'elle ne s'en aperçoive. Petite comme elle l'était, elle ne pouvait voir au dessus des hautes silhouettes qui l'entouraient de toutes pars et ne pouvait s'en remettre qu'au hasard pour retrouver la trace d'Emelia et Tany. Son affolement se changea bien vite en panique et sa recherche en une course effrénée. Elle courrait, à en perdre haleine, bousculant les passant et parfois des piles de caisses ou de produits qui s'étalaient sur le sol sans pour autant la ralentir, elle courait, à toutes jambes, sans prendre le temps de repérer son chemin, sans chercher à savoir où ses pas pourraient la mener.

Elle courut tant et si bien qu'elle finit par sortir du marché pour déboucher dans les quartiers d'habitation, peu fréquentés à cette heure de la journée, les locaux étant, pour la plupart, occupés au marché ou sur le port. Elle ne ralenti que lorsque, au détour de plusieurs ruelles étroites, elle perdit de vue le soleil et l'océan. Là, elle était totalement perdue. Elle le savait et sa panique, jusque là battante, se changea petit à petit en angoisse. Elle avait déjà expérimentée l'angoisse et n'en gardait pas un excellent souvenir. Un voile de sueur froide commençait à couvrir sa peau, collant les voiles fins de sa robe contre son dos et ses bras qui s'étaient mis à trembler, tout comme ses jambes qui ne la portaient plus qu'au prix d'un gros effort de concentration.

Elle s'enfonça d'avantage dans la ruelle, au bout de laquelle elle entendait des voix, sachant pertinemment qu'elle ne retrouverait pas son chemin seule et espérant pouvoir demander la direction à prendre aux quelques personnes qui se trouvaient plus loin. Une main sur le mur, elle finit par s'arrêter près de la porte d'une sorte de pub ou de salon de thé, se dit-elle, devant laquelle deux colosses, visiblement d'humeur joyeuse et chantante, devisaient gaiement. Elle fit un dernier pas en avant et toussota pour signaler sa présence, n'ayant guère envie de surprendre ces deux montagnes de muscles armés de matraques. Elle se rappelait des leçons de Tany et d'Emelia en matière de courtoisie et de politesse, aussi, elle s'adressa à eux, certes d'une petite voix, mais avec toute la douceur dont elle était capable.

« Heu... Pardonnez-moi de vous interrompre, je ne voudrais pas vous déranger. Seulement, voilà, je ne suis ici que depuis peu et ne connais pas le dédale de ces rues, je me suis perdue et cherche à rejoindre le port. Auriez-vous l'amabilité de m'indiquer le chemin ? »

L'un des deux colosses à la peau hâlée se tourna vers elle et se dressa de toute sa hauteur. Ce ne fut que lorsqu'il approcha son visage du sien que Mayna comprit son erreur. Non, ils n'étaient ni joyeux ni joviaux, ils étaient ivres et visiblement peu avenants, maintenant qu'ils se tenaient juste à quelques centimètres d'elle et la regardaient de haut en bas telle une bête dont on voudrait faire l'acquisition. Car c'était exactement ce que ces deux hommes avaient en tête. L'homme à la peau hâlée l'attrapa par le bras et la tira à lui, se saisit de son visage et l'offrit en pâture au regard vicieux de son compagnon.

« Regarde-moi cette beauté... Elle manque un peu de chair, mais une jeune femme à la peau si pure et rousse, en plus... Elle ferait une parfaite catin pour les clients de la haute, non ? »

« Certes... Mais ils aiment les formes et elle n'a que la peau sur les os. » Répondit l'autre, à la peau d'ébène. « Il faudrait la remplumer avant de pouvoir en faire quoi que ce soit. Sans compter que, vu comme elle est habillée et vu comme elle cause bien, elle est certainement pas de chez nous. Peut-être une noble, ou au moins une bourgeoise. Faudrait pas qu'on prenne le risque d'offrir à un noble sa fille ou sa cousine en guise de pute s'il venait à s'arrêter chez nous... »

« Moui... On peut la réserver aux locaux, tu sais comme ils n'aiment pas partager la chair, les suderons. Une rouquine, et qui ne sent pas la marée, c'est si rare, ça serait bien dommage de la laisser filer si facilement ! »

⸙ Faeria ؞ Fille de la Forêt ⸙Où les histoires vivent. Découvrez maintenant