⸙ Faeria ؞ Fille de la Forêt ⸙

𝕮𝖍𝖆𝖕𝖎𝖙𝖗𝖊 77 - Epilogue

Tany courrait joyeusement entre les arbres gorgés de fruits du verger impérial. Les abricotiers et les pêchers donneraient assurément de magnifiques fruits, certainement sucrés et juteux, en assez grand nombre pour en faire une quantité remarquable de confitures, ainsi que quelques tartes, clafoutis et autres gourmandises, faisant profiter tout le palais de leur fraîcheur. Mayna s'attardait devant quelques arbustes pleins de cassis tout en gardant sa fille dans son champ de vision. Elle se rappelait encore le regard d'Emelia lorsqu'elle avait appris le prénom que sa fille porterait. L'envie de rendre hommage à son amie si chère lui était venue dès qu'elle avait compris porter la vie et Killian n'aurait pu mieux réagir. Et sa fille la lui rappelait, son amie à la peau de miel et aux yeux sombres. Non pas qu'elle lui ressemble physiquement, mais leur amour de la vie et leur gaieté naturelle semblaient issus du même moule.

Plus souriante que jamais, la Faeria se redressa et, riant avec sa fille, la couva du regard alors qu'elle dansait au milieu des fleurs sauvages et des derniers pétales de cerisier volant au gré d'un vent dont elle contrôlait déjà les bourrasques. Elle avait beau être fille de la forêt, son affinité avec l'air, héritée de son père, ne faisait aucun doute. Les plantes se pliaient volontiers à ses demandes, mais nul élément ne lui répondait tel que le vent. Killian était d'ailleurs très fier de sa fille et des prouesses dont elle était déjà capable pour son jeune âge.

Demain soir, elle fêterait ses huit ans. Pour l'occasion, toute la famille de son père se réunissait au palais. La famille s'étant encore agrandie, il avait fallu dresser la table à l'extérieur, la grande salle, malgré son nom, étant devenue trop petite pour accueillir tout le monde. Si Mayna, de son côté, n'avait qu'une poignée d'amis à inviter, ses amis les plus proches et quelques ministres et conseillers qui avaient toute sa confiance, Killian avait pour lui plus d'une cinquantaine de convives, dont 48 rien que pour sa propre famille. La jeune femme sourit, l'idée lui venant qu'en gagnant le cœur de l'aigle elle avait gagné une famille plus grande qu'elle n'aurait jamais pu le rêver. Tany adorait sa famille et jubilait depuis ce doux matin d'été à l'idée de revoir ses oncles et ses tantes, et de jouer avec ses cousins. Le repas du soir serait long, la nuit courte, et la journée du lendemain, consacrée à des jeux d'enfants, aussi bien pour les grands que les petits, ravirait chacun jusqu'à la tombée du soir.

Une fois encore, la jeune mère perdit son sourire. Certes, la famille serait là, les amis également, les représentants venus du continent et de l'île également. Si les feryans et les Alderans avaient été presque trop faciles à convaincre des bienfaits de la paix avec les mages et de la légitimité du couronnement de Mayna, il avait fallu de longues négociations, passant par la libération des esclaves que Mayna comptait de toute manière affranchir, avant que Baklan ne cède et se rallie à l'empire. Cependant et au grand dam de la nouvelle souveraine, la guerre avait éclaté avec Dormen et Radamen. Ces deux pays, prospères et autonomes, avaient vu en ce pouvoir nouveau l'occasion de prendre leur indépendance et, au terme d'une alliance rivale, de prendre le pouvoir à leur tour. Quelques mages se joignant à la bataille, elle fût courte et presque sans pertes, bien que les quelques vies sacrifiées au nom d'une paix qui avait selon elle fait couler beaucoup trop de sang réveille encore l'impératrice la nuit. Cependant, en voyant le visage radieux de sa fille, elle arrivait à se pardonner les morts inutiles.

Killian se posa près d'elle, ses habits dans son bec, et se vêtit rapidement après avoir repris forme d'homme. S'attardant un instant sur les lèvres de sa femme, il appela Tany pour qu'elle le rejoigne. Pour le plus grand plaisir de son père, elle utilisa une bourrasque que lui envoya le vent et se laissa porter jusqu'aux bras de l'aigle. Elle s'amusait de sa cabriole, un grand sourire fendant son visage radieux, et rit plus fort encore sous les bisous chatouilleux que Killian lui infligeait. Lorsqu'il la reposa, lui tenant une main et laissant l'autre à Mayna, elle se calma rapidement.