Chapitre 20-4

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Elio se gratta la gorge pour me demander toute mon attention. Je tournai mon visage vers lui.

— Je suis assez protecteur avec ma sœur, même si elle ne m'écoute jamais. Je me suis permis de rechercher ton nom et prénom sur internet, mais rien n'est ressorti. Pourtant, un homme d'affaires comme toi devrait apparaître. C'est comme si tu n'existais pas.

Tu cherches au mauvais endroit, mec.

— Je suis très discret. Je fais en sorte de protéger ma vie privée comme ma vie professionnelle. Les médias sont plus intéressés par l'action.

Elio hocha la tête. Il but machinalement son verre d'eau le regard lointain avant de promener ses yeux dans la vaste salle à la recherche de sa sœur pour s'assurer qu'elle était assez loin.

— Je suis très malade, je ne sais pas si Ronney te l'a dit.

— Elle évite d'en parler, mais oui, je suis au courant.

Les yeux du jeune homme vinrent se planter dans les miens. Il paraissait vraiment à bout.

— Je vais bientôt mourir, m'avoua-t-il à voix basse. Les médecins me donnent moins d'un an à vivre. Le temps n'a donc pour moi guère de signification.

Elio ferma ses paupières de toutes ses forces avant de les rouvrir douloureusement.

— Je veux partir en sachant ma petite sœur heureuse. Je veux être sûr qu'elle ne manquera de rien.

J'avais souvent écouté les dernières paroles d'un mourant sauf que celles-là me touchèrent au plus profond de moi, sûrement parce que j'étais réellement attaché à Ronney. Elio poursuivit :

— Personne dans ma famille n'est au courant. Le traitement me donne juste un sursis de quelques mois, le temps de leur dire au revoir. S'il te plaît, n'en touche pas un mot à ma sœur. Ça la briserait. Elle...elle a subi tellement de harcèlement, de choses.

— Je sais. Sa famille est particulièrement cruelle avec elle, même votre mère.

Je dus déployer des efforts surhumains pour garder mon calme. Toute cette méchanceté gratuite à l'encontre de Ronney me mettait hors de moi.

— Il ne faut pas en vouloir à ma mère. J'essaye de l'excuser. Je ne veux pas partir avec de la rancune et de la colère en moi. Toute ma vie j'ai été malade. J'ai accaparé tout son temps, toute son énergie, tout son amour.

Elio fit une pause. Il soupira puis formula des mots qui lui paraissaient désagréables à dire à voix haute :

— Je pense qu'elle a vraiment essayé d'aimer Ronney. Elle a vraiment essayé, mais elle n'y est pas parvenue.

Il avait baissé la voix à la fin de sa phrase comme pour rendre cette douloureuse vérité moins insupportable à entendre.

Je serrai ma mâchoire. Au loin Ronney parlait avec une femme au teint bien poudré, les cheveux grisonnants soulevés par un brushing impeccable.

— Giovanni, prends soin d'elle. Ne laisse pas Caleb revenir dans sa vie.

Entendre son prénom provoqua en moi une irritation passagère. Je revins sur Elio, les traits crispés.

— Ma sœur mérite d'être heureuse. Elle doit rester loin de ma famille qui est néfaste pour elle. Elle doit oublier Bryan et ses autres connards de copains.

— Bryan ? le coupai-je avant de l'interroger du regard.

Elio ouvrit de grands yeux en comprenant que je n'étais pas au courant.

— Non c'est juste...c'est une sale histoire.

Mes yeux s'assombrirent, avec un signe de main, j'invitai le jeune homme à poursuivre. Il secoua la tête.

— Non, c'est à ma sœur de t'en parler. Ces choses-là ne se disent pas comme ça. C'est beaucoup trop grave.

C'était hors de question que je laisse cette histoire en suspens, mais Elio s'était déjà refermé sur lui-même. Je savais que je n'en tirerais plus rien. Mille questions me vinrent en tête. Il m'observait attentivement.

— Tu parais te soucier d'elle, dit-il presque étonné.

— C'est le cas. Je tiens à elle, plus que je ne le devrais. Personne ne l'a encore respecté dans ce monde, avec moi, elle le sera, je te l'assure.

Soulagé, Elio me sourit avec indulgence puis passa à autre chose :

— Le week-end prochain, c'est l'anniversaire de Carolina. J'imagine que tu seras là.

— Je ne pense pas. Je dois me rendre à Los Cabos.

— Los Cabos ?

Elio ouvrit de grands yeux. Son regard brillait comme un enfant, le jour de Noël. Je fis "oui" avec la tête.

— Ronney et moi n'avons jamais eu la chance de voyager. Nous ne sommes jamais sortis de Sheryl Valley.

Je levais un sourcil, dubitatif. C'était inconcevable pour moi de rester toute sa vie au même endroit.

— Ronney part-elle avec toi ? Fais attention, elle ne sait pas nager.

Soudain, je revis Hamza et Ashley dans mon bureau. La seconde d'après, je vis Ronney et Caleb, ensemble, tout un Week-end. Les mots de Carolina me revinrent en tête "Elle va te quitter aussi. Tu les vois bien. Ronney a encore des sentiments pour lui".

— Oui, Ronney vient avec moi, affirmai-je avec aplomb. Je ne m'imagine pas la laisser seule plusieurs jours.

Elio, ravie de la nouvelle, accueillit sa sœur avec le sourire quand elle revint s'asseoir avec nous.

Ugly Ronney T 2 : Yeraz [Français]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant