J'arpentai la grange d'un pas lent quand je tombai soudain sur des cages qui renfermaient autre chose que des chiots. À l'intérieur, il y avait des chats, des lapins et même des renards. J'attrapai la patte d'un de ceux-ci à travers les barreaux. Ses griffes avaient été arrachées ainsi que les dents.
— Nous nous servons de ces proies pour stimuler leur agressivité, m'indiqua Percy qui m'avait suivi. Il essuya son front qui ruisselait de sueur et sourit en dévoilant des dents pourries.
— Les conditions de vies de ces animaux sont déplorables, lâchai-je, froidement.
Le sourire de mon interlocuteur se fana. Il esquiva un geste évasif.
— Monsieur Khan, cette pratique est un sport national, une pratique ancestrale qui rapporte énormément d'argent. Les sommes pariées sur un seul combat peuvent atteindre des milliers de dollars.
Percy s'arrêta, hésita un instant avant de continuer :
— J'ai bien connu votre père. J'avais énormément d'admiration pour lui. C'était un grand fan de ces combats.
Un air de satisfaction passa sur son visage, mais il s'assombrit aussitôt.
— Je ne suis pas mon père, monsieur Percy. Nous avions là-dessus un point de vue différent.
— Oui, c'est ce qui m'a été rapporté. Mais il n'empêche que les combats de chiens restent un divertissement populaire au sein de la mafia. La Mitaras Almawt compte énormément d'adeptes. Vous ne pouvez pas changer ça. Vous ne pouvez pas changer le monde, monsieur Khan.
— Et vous, vous ne pouvez pas me changer.
J'ôtai mes verres pour les essuyer des deux côtés. Désorienté, Percy battit des cils. Il avait vu mes yeux, il savait que ce n'était pas bon pour lui. Découragé, il baissa sa tête en poussant un soupir qui ressemblait à un gémissement puis il releva son visage, les dents serrées. Je l'enveloppai d'un regard perçant qui le fit tressaillir. Miguel, Fares et Soan arrivèrent derrière moi.
— Monsieur Khan, je suis prêt à discuter avec vous. Vous êtes là pour ça, après tout. Moi je ne fais que du business.
— Tous ces animaux sont torturés. Ces chiots sont frappés nuit et jour. Et l'ours dehors ? Hein ?
Mon interlocuteur ouvrit la bouche, mais sa voix resta coincée dans sa gorge. Il ne put articuler un seul mot.
— Mon père m'emmenait voir ces combats. Je sais bien comment ça se passe. Les chiens combattent contre des ours quand le public en redemande. Je sais que vous recousez ou agrafez leurs plaies sur le lieu même du combat, sans anesthésie. Je sais aussi que certains de nos collaborateurs payent très cher pour assister à vos petits spectacles de "trunking" qui consiste à enfermer deux chiens dans le coffre d'une voiture en mettant la musique à fond tout en roulant en ville. Vous jetez ensuite le chien mort sur le bord de la route et le vainqueur peut rentrer avec son maître.
Percy fronça les sourcils et riposta :
— C'est vous, la mafia, qui avait mis la main sur ce trafic très lucratif. C'est vous qui blanchissez l'argent sale avec et qui vendez un tas de drogue lors de ces réunions. Nino nous soutient. Nous avons tout son respect et sa protection.
Dans un élan de rage, j'agrippai d'une main son cou et le lui serrai avec une force terrible en rapprochant mon visage du sien.
— Savez-vous qui je suis ?
Le type, au bord de l'asphyxie, passa du rouge au bleu. Il attrapa mon poignet pour essayer de s'extirper de ma main. Entre deux souffles, il arriva à articuler difficilement :
— Le futur chef de la Mitaras Almawt. Mais vous devez rendre pour l'instant des comptes à monsieur Saleh.
— Yeraz, s'il te plaît.
La voix dans mon dos chassa immédiatement les ténèbres en me tirant de mes délicieux projets de vengeance. Jimenez me suppliait de relâcher l'éleveur. Mon pouls se calma et mes doigts autour du cou de Percy se desserrèrent. Elle voyait à cet instant le véritable monstre que j'étais. Si elle restait jusqu'au bout, elle me donnerait sa démission à la fin de cette journée. Je savais qu'elle n'en supporterait pas davantage. Il fallait juste qu'elle reste et qu'elle voie le sort que je réservai à cet homme.
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Ugly Ronney T 2 : Yeraz [Français]
RomanceLa mafia et les gens normaux ne se mélangent pas à Sheryl Valley. Yeraz est le fils d'un des patrons du crime les plus brutaux des États-Unis. Il doit succéder à son père, assassiné quatre ans plus tôt, et prendre les rênes du royaume d'ici les six...