Chapitre 35-1

1.9K 166 1
                                    

L'atmosphère avec les préparations des festivités des fêtes de fin d'année ne parvenait pas à me sortir de mon humeur morose que je trainais dans mon sillage. Mon tempérament détestable à l'encontre de mes employés et des gens qui m'entouraient faisait douloureusement écho à la solitude de ces trois dernières semaines sans Ronney. Ma vie avait complètement changé de direction depuis quelques mois à cause d'une seule femme. Mes pensées me submergeaient à n'importe quelle heure du jour et de la nuit, me torturant l'esprit de façon vertigineuse. Après avoir quitté Ronney ce matin-là, je m'étais porté volontaire pour tous les déplacements professionnels afin de m'éloigner le plus possible de Sheryl Valley.

En ce début d'après-midi, à la descente de mon avion, je me rendis directement chez Camilia, puis sur le lieu où devait se tenir le défilé haute couture Fashion For Liberty. Ma mère m'avait demandé de lui apporter personnellement son carnet où étaient notés tous ses contacts, prétextant l'avoir oublié dans son bureau. Je me rappelais lui avoir dit au téléphone qu'elle avait des assistants et trois filles pour ça.

— Ils sont tous occupés aujourd'hui. Personne ne se tourne les pouces. Chéri, s'il te plaît. Je ne te demanderais pas ça si ce n'était pas urgent.

— Je suis autant occupé qu'eux. Je vais demander à Ashley de t'apporter ce que tu demandes.

— Non ! Je ne veux pas voir cette débauchée. La journée est assez stressante pour moi aujourd'hui. N'en rajoute pas, Yeraz.

Mon regard était tombé sur ma montre. Camilia ne m'avait pas vu depuis des jours, c'était la seule solution qu'elle avait trouvée pour me ramener près d'elle. J'avais évité tout le monde, même les membres de ma famille, pensant que cela me guérirait plus vite de son absence.

— Très bien, j'arrive, avais-je soupiré.


Le lieu était absolument magnifique, dans un style moderne, revisité, contrastant avec l'ambiance abandonnée de ce hangar. Ma mère, sur le podium, dans son costume de femme d'affaires, donnait des instructions à une équipe chargée de l'éclairage. Je tournai la tête en direction d'une jeune femme menue, blonde, dont les cheveux retombaient sur son long visage de façon désordonnée. Elle était en train de préparer les coffrets cadeaux pour les invités triés sur le volet. Quand son regard se leva sur moi, la jeune femme se recroquevilla comme si j'étais le diable en personne. Camilia arriva à ce moment-là et s'adressa à cette dernière sur un ton courtois, mais ferme :

— Lucia, merci de nous laisser seuls un instant.

La jeune femme obtempéra immédiatement avant de s'éloigner à grands pas, les épaules voûtées. Je tendis le calepin à ma mère puis levai ma tête vers le plafond vitré.

— Tu aimes ? me demanda-t-elle en constatant que j'étudiais le lieu.

— Oui, comme d'habitude tu as très bien choisi l'endroit.

Quand je revins sur elle, Camilia me fixait affectueusement. Ronney était-elle là ? Je me fis violence pour ne pas lui demander de ses nouvelles.

— J'imagine que ce carnet était juste une excuse pour me voir ?

Un sourire se dessina sur ses lèvres.

— C'est toi qui m'y obliges, Yeraz. J'aurais aimé te voir sans tes lunettes, mais je sais qu'il y a trop de monde autour de nous pour que tu les enlèves.

Je la dévisageais pendant quelques secondes avant de venir frôler sa joue avec ma main. Elle ferma les yeux. Je lui manquais terriblement. Mes gestes d'affection étaient si rares qu'elle attrapa mes doigts pour les garder contre sa peau.

— Assisteras-tu au défilé, ce soir ?

L'intonation de ma réponse était sans appel :

— J'ai beaucoup de travail. Ça fait des jours que je n'ai pas mis un pied au club.

Je relevai la tête pour balayer l'endroit des yeux en espérant au fond de moi croiser Ronney. La déception dut se lire sur mon visage, car Camilia déclara sur un ton rempli de délicatesse :

— Elle n'est pas là. Peter la couvre en pensant que je n'ai pas remarqué son absence. Il ferait n'importe quoi pour Ronney. Cette fille, je comprends... je comprends qu'elle t'a ébloui par sa lumière même si j'avoue qu'Elvis Presley me casse un peu les oreilles.

Je ne pus m'empêcher de lâcher un rire léger qui surprit ma mère. Elle n'avait pas l'habitude d'entendre ce son.

— Ronney sans Elvis, ça ne serait pas Ronney, déclarai-je à voix basse, trahissant un peu plus l'état de ma tristesse.

Je l'embrassai sur le front avant de tourner les talons et partir. Je devais impérativement me rendre à San Francisco dans l'après-midi.

Ugly Ronney T 2 : Yeraz [Français]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant