Ugly Ronney T 2 : Yeraz [Français]

Chapitre 4-1

Isaac nous laissa devant l'entrée de la somptueuse demeure de l'époque coloniale, entourait d'un jardin flamboyant. La façade de brique et de pierre était recouverte de plantes grimpantes. Postée devant la porte, Jimenez regardait tout autour d'elle en clignant des yeux. Je me doutais qu'elle n'avait pas l'habitude de se rendre dans des endroits pareils. Bakery District était tout sauf un quartier riche. C'était la Rosa Negra qui détenait ce territoire, mais nous étions en discussions avec eux afin d'obtenir une partie des commerces et des restaurants de ce secteur. La haine que j'avais pour Nino ne devait en aucun cas venir entacher les affaires même si je comptais bien régler ce problème personnel très bientôt. Mon père ne l'avait jamais porté dans son cœur, mais il m'avait rappelé tant de fois que cette alliance était nécessaire pour l'équilibre de nos deux familles.

C'est un jeune et solide gaillard, aux cheveux soigneusement plaqués, qui vint nous ouvrir la porte. Il nous invita à le suivre. Tandis que nous montions à l'étage, Miguel et Fares étaient attentifs au moindre bruit tout comme Jimenez qui observait discrètement cet environnement. Je sentais bien qu'elle inspectait minutieusement chaque recoin de la maison en notant dans sa tête ce qu'elle voyait. C'était souvent les personnes les plus silencieuses qui étaient les plus observatrices, je le savais. Une petite voix intérieure me disait de me méfier de cette assistante différente sous tous rapports.

En rentrant dans le bureau d'Hamza, tous les regards se tournèrent vers Jimenez, la jetant dans une grande détresse à tel point qu'elle me suivait d'un peu trop près. Derrière le bureau, au fond de la pièce, le visage d'un homme fatigué, aux lèvres charnues et au nez long et fort, nous attendait pour pouvoir commencer la réunion. Hamza posa sur mon assistante, un regard surpris. Sûrement le même que le mien lorsque j'avais rencontré la jeune femme quelques heures plus tôt. Il retira son cigare de la bouche et attendit que je présente ma nouvelle assistante.

— Bonjour, Hamza. Voici mon assistante, Ronney Jimenez.

Il tourna sa tête vers elle et la considéra un instant avant de poser sur moi un regard désapprobateur, mais ses sentiments m'étaient depuis longtemps indifférents. Ce dernier fit un geste théâtral de la main pour nous inviter à nous asseoir à nos places. Nous devions aborder beaucoup de sujets ce matin. Les hommes présents ici attendaient les directives. Mieux valait ne pas attendre et rentrer directement dans le sujet.

— Nous avons un problème sur le complexe les "Baléares ", commença Hamza. La construction prend du retard. Nous avons énormément investi dans ce projet.

Son regard s'arrêta de nouveau sur mon assistante qui avait sorti son bloc note. Il s'arrêta de parler. Jimenez était pour nous une étrangère et nous ne pouvions pas prendre le risque de dévoiler trop d'informations sur certaines de nos activités. Je décidais de prendre les devants, après tout ce n'était pas la première fois que Camilia nous mettait quelqu'un dans les pattes. Ma mère agaçait tout le monde avec ce défilé d'assistantes.

— Les fruits et les légumes, c'est meilleur quand c'est de saison, nous le savons tous.

Hamza se racla la gorge puis il rejeta sa tête en arrière, pensif, avant de répondre :

— Je préfère ne pas les mélanger dans le même panier. Certains pourrissent trop vite.

Nous avions l'habitude de parler en langage codé, au téléphone ou même dans les endroits publics. Jimenez tourna brusquement sa tête vers moi, choquée. Elle comprenait ce qui était en train de se passer. Je pouvais sentir son désarroi, mais c'était le jeu.