J'arrivai en plein milieu de la fête d'anniversaire de Carolina. Une file de gens rentrait et sortait de la salle réservée pour l'occasion. À l'intérieur, il y avait du monde. Un groupe de musicien jouait sur scène en faisant danser les invités dans une ambiance festive.
Après avoir parcouru la salle du regard, j'aperçus Ronney de dos, assise, au milieu de sa famille. Autour d'elle régnait une grande agitation.
En me rapprochant du groupe, je vis mon assistante jeter un regard sur le côté comme si elle cherchait un moyen de s'enfuir d'ici sans être vu. Je ne l'avais jamais vue aussi découragée.
Maintenant tout près du groupe, j'entendais Hailey demander :
— Quelle est la couleur préférée de Ronney ?
Ils commençaient visiblement un jeu ridicule de questions et de réponses où Jimenez était au centre de l'attention. De nature introvertie, j'imaginais que cette situation ne devait pas l'enchanter.
— Pourpre ! cria Valentina pensant que c'était la bonne réponse.
Je levai les yeux intérieurement. Ces imbéciles n'avaient-ils jamais regardé les chaussures de Jimenez ou le genre de tee-shirt qu'elle portait ?
De peur de vexer sa mère, Ronney balbutia :
— Oui, c'est possible. C'est vrai que...
— Rouge ! Sa couleur préférée est le rouge.
Encore une fois, personne ne m'attendait. Ma réponse surprit tout le monde même mon assistante qui n'osait pas bouger ni se retourner vers moi. Le visage de Gabriella se figea de stupeur. Les garçons redressèrent leurs épaules et me saluèrent d'un mouvement de tête. Caleb me foudroya du regard tandis que Valentina et ses sœurs m'accueillirent avec de grands sourires, ravies, elles, de me voir.
Je m'assis à côté de Ronney qui tourna son visage vers moi. Je pensai voir de la colère, de l'exaspération ou une grande déception au fond de ses yeux, mais contrairement aux autres fois elle paraissait presque me remercier d'être venue. Elle laissa échapper un petit sourire qui illumina aussitôt les tréfonds sombres de mon cœur. J'étais incapable de le lui redonner, incapable de lui avouer que l'envie de la voir avait pesé plus lourd que tout le reste.
— Pourpre ou rouge ? demanda Aïdan, agacé.
Je tournai brusquement ma tête vers lui. Pas aujourd'hui, mec, je ne suis pas d'humeur. Mon regard glacial et menaçant fit taire son insolence. Le jeune homme reprit doucement :
— Alors, cousine ? Ta réponse c'est le rouge ou le pourpre ?
— Ronney a marqué rouge, dit Hailey, le nez plongé dans les réponses.
Mélissa ouvrit de grands yeux en me félicitant.
Silencieux, pensif, je n'entendais pas les gens me parler. Je n'étais pas venue pour ça ni pour jouer un rôle aujourd'hui. Je luttai contre mon impulsivité pour ne pas me lever et retourner cette table. Mes poings se serrèrent involontairement.
— Dis-moi ce qu'il se passe, me demanda Ronney au bout d'un moment, à voix basse.
— Rien. Il ne se passe rien !
Je fis pivoter ma tête vers elle puis plongeai mes yeux dans les siens. Jimenez sentait que quelque chose clochait en moi. Elle ignorait que mon cœur était écrasé par une rancœur insoutenable que j'avais envers ses parents.
Le temps passé à cette table, à faire semblant, parut durer une éternité. J'avais répondu aux huit questions sans donner une seule mauvaise réponse et laissai les deux dernières à Valentina qui, une fois de plus, se loupa. Comment pouvait-on à ce point ne rien connaître de sa fille ?
Mélissa déclara sur un ton faussement joyeux :
— Giovanni a presque répondu à toutes les questions, personne dans notre famille n'a eu autant de points que Ronney. Qui l'aurait cru ?
Caleb la fixa un moment puis posa ensuite ses yeux sur moi. Il sentait qu'elle s'éloignait de lui, que j'étais sa seule préoccupation à ce moment. Mon regard dans le sien, j'essayais de ne pas l'imaginer en train de la baiser, mais c'était impossible. J'avais du mal à garder la tête froide face à ce sentiment désagréable qui m'étreignit. J'entendis à peine la question de Gabriella. Confiante et se sachant appuyée par sa famille, elle demanda soudain :
— Dites-nous, Giovanni. La question peut vous paraître incongrue, mais nous sommes toutes de grandes romantiques ici, autour de cette table. Quand avez-vous remarqué Ronney pour la première fois ?
C'était toujours la même question, mais posée différemment. Histoire de faire réaliser à leur cousine que je n'étais pas honnête. Chose que Jimenez savait déjà.
Ronney, mal à l'aise, sentait l'atmosphère s'alourdir. Elle appréhendait ma réponse.
— Avez-vous déjà entendu Ronney rire ? Vraiment rire ? demandai-je.
Leur regard incrédule voulait dire "non". Plongée dans une longue réflexion, Valentina ne répondit pas non plus. Elle cherchait au fond de sa mémoire ce souvenir qui bien sûr ne s'y trouvait pas. Avec un petit sourire embarrassé, elle souleva ses épaules en secouant légèrement la tête. Je reniflai avant d'ajouter sur un ton d'une ironie grinçante :
— Ça ne m'étonne qu'à moitié.
Je passai sur eux un regard dénué d'expressions et de sentiments. La tension était palpable.
— Jusqu'à présent, je pouvais tout m'offrir : voitures, maisons et même, les baisers des femmes sur mes lèvres. Absolument tout, jusqu'à ce que je rencontre Ronney. Elle a un sourire magnétique et un rire délicieux. C'est une mélodie qui peut éclairer les ténèbres et rendre l'enfer plus agréable à vivre. La seule chose que je veux posséder, je ne peux pas l'acheter, car ça n'a pas de prix. C'est juste une douceur de quelques secondes qui se mérite. Quand elle me sourit, je sais que j'ai fait quelque chose de bien dans ma journée. Quand elle rit, je sais que je suis à ce moment quelqu'un de bien.
Ronney relâcha ses épaules et s'autorisa de nouveau à respirer. Mon assistante pensait sûrement que j'avais prononcé ces paroles par pitié ou pour mieux rentrer dans la peau de mon personnage, mais pas cette fois. Troublée, elle me remercia dans un murmure pendant qu'autour de la table les exclamations de surprise fusaient. Je jugeai le moment opportun pour partir de la fête. J'étais venu chercher des explications, sauf que ce n'était pas l'endroit ni le meilleur moment pour interroger mon assistante.
— Je dois y aller, dis-je en me levant avec un sourire faux et forcé.
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Ugly Ronney T 2 : Yeraz [Français]
RomanceLa mafia et les gens normaux ne se mélangent pas à Sheryl Valley. Yeraz est le fils d'un des patrons du crime les plus brutaux des États-Unis. Il doit succéder à son père, assassiné quatre ans plus tôt, et prendre les rênes du royaume d'ici les six...