chapitre 27

194 30 39
                                    

Sous un soleil de plomb, une bande de jeunes profite de la piscine de leur ami pour se désaltérer.

— Bonsaï ! s'élance un albinos à la chevelure bleue.

Lorsqu'il plonge dans l'eau, il éclabousse ses amis assis au bord.

— Félix, fais attention ! gronde sa petite amie Sarah.

Il remonte à la surface en ricanant.

— L'eau est parfait ! Venez les amis !

Félix fait des longueurs sur le dos, ravi de pouvoir se rafraîchir par cette chaleur d'été. Sa petite amie sourit et le rejoint pour un tendre baiser.

— Vous n'en ratez pas une, vous, ricane une petite ronde à la peau ébène.

Ses longs rastas enfin attachés en chignon, elle s'étale sur le transat, un verre de jus à la main.

— Ce n'est pas de notre faute si Hugo n'est pas encore là, se moque le perturbateur.

Faisant semblant d'être outrée, elle lui tire la langue.

— Arrête de te moquer d'elle, intervient un autre jeune homme, Carmen n'a pas besoin de se coller vingt-quatre heures sur vingt-quatre à son mec, pour qu'on sache qu'ils s'aiment.

De sa taille longiligne, ses épaules carrées robustes et cet air suffisant qui ne le quitte plus, il avance vers son amie, un plateau de fruits en main. Carmen attrape une pastèque, puis il dépose le reste sur la table de jardin.

— Nous au-moins nous avons des partenaires, moque Félix. Quand tu auras quelqu'un, peut-être que je t'écouterais.

Jona sourit en ajustant sa paire de lunettes de soleil. Si seulement son ami savait. L'haïtien mord dans une pastèque d'un air coquin en pensant à son petit «secret».

À quasiment dix-sept ans, Jonathan et Yassen sont toujours amoureux et en couple. Devenus inséparables après quatre ans, l'haïtien est persuadé que plus rien ne peut leur faire obstacle.

La bande d'amis a grandi. C'est leur dernier été avant la rentrée de terminale. Ils savent qu'ils seront très occupés, alors ils ont décidé de passer tous les vacances ensemble. Jona les a invités à passer deux semaines chez lui, à l'absence de sa famille à Cancun. Il a refusé d'y aller pour des raisons personnelles, alors il a la maison pour lui tout seul. Bien-sûr cette invitation cache autre chose.

— Vous savez où est Yassen ? interroge Sarah. Il devait déjà être là à cette heure.

À quelques kilomètres de là.

— Tu ne préfères pas tout le carton ? raille le boutiquier du quartier.

Yassen veut juste s'enterrer six pieds sous terre là.

— Donne-moi juste ce que j'ai demandé, s'il-te-plaît. Ce n'est pas pour moi.

— Tu achètes des préservatifs pour quelqu'un d'autre ? Oh, mon petit Yassen, je ne suis pas né de la dernière pluie, deh ? rigole-t-il en papillonnant des sourcils.

— Tu poses des questions à tous ceux qui viennent t'en acheter ?! Tu me saoules, wallah ! Mieux tu restais en côte d'ivoire !

Sortant de la boutique sous les railleries coquines de Mamadou, il enjambe son vélo en direction de chez Jonathan. Yassen est un grand jeune homme aujourd'hui. Ses complexes d'enfance ont disparus. S'il avait peur de ne jamais correspondre au standard, la nature s'est chargée de réparer son injustice. Sa voix rauque et son physique athlétique ont fait disparaitre tous ses doutes de prépubère. Loin de vouloir se comparer à tous les garçons de son entourage, il se trouve pas mal dans son genre.

Feutre vertOù les histoires vivent. Découvrez maintenant