Chapitre 8: Retrouvailles tendues

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Le lendemain, Mirai démarra aux aurores afin de prendre l'avion qui la ramenait à Tokyo. Elle remercia chaleureusement ses nouveaux amis, et leur donna des places de concert pour sa prochaine représentation. Au moment de dire au revoir à Ronan, elle s'inclina avec respect devant lui, et déclara :

— Je suis soulagée d'avoir réussi à éloigner vos peines. Je considère avoir corrigé les erreurs de mes sœurs. J'espère que vous nous pardonnerez pour tout le mal que nous vous avons causé.

L'humain baissa la tête, pensif.

— Vous ne faisiez que remplir votre rôle, au final. Élise vous admirait, et en est venue à vous jalouser. Mais, s'il y a quelqu'un à blâmer, c'est son putain de producteur. Elle était heureuse quand elle chantait dans le métro. Mais la société l'a utilisée comme un consommable qu'ils ont balancé dès qu'elle a arrêté d'être rentable... Enfin, voilà que je recommence à jeter la faute sur les autres.

— Si vous vous sentez mal, n'hésitez pas à m'appeler. Je ferai tout mon possible pour vous redonner le sourire, comme cette nuit.

Ronan rougit, et détourna le regard, gêné.

— File, ou l'avion va partir sans toi.

Sans se faire prier davantage, Mirai laissa ses coordonnées personnelles à Airi et sa voiture démarra. Ronan se détacha du groupe quelques instants plus tard en voyant que la ville se réveillait lentement.

— Je ne vais pas tarder non plus, déclara-t-il. Je vous en dois une, les tas de ferraille. Sans vous, j'aurais sûrement fait la plus grosse connerie de ma vie et je serais mort sans avoir pu entendre à nouveau la voix d'Élise. Alors, si un jour vous avez besoin de moi, passez-moi un coup de fil. Je vous montrerai que les humains n'ont rien à envier aux AIntelects !

— Est-ce que cela signifie que vous quittez l'AVO ? demanda Airi.

— Je n'ai plus aucune raison de fréquenter ces cassos. Et Élise ne pensait pas toutes les horreurs qu'elle a dites sur vous. En vrai, grand remplacement robotique ou non, je m'en fiche. Maintenant que je sais qu'Élise a pu trouver la paix, je vais passer à autre chose. Pourquoi pas m'occuper de ses petits frères ? Depuis le temps qu'ils voulaient un AIntelect pour les aider, je peux leur en offrir un...

— Fais comme bon te semble, gamin, lança Astro. J'ai bien effacé ton fichier de la base de données de la police. Donc, qu'on ne t'y reprenne pas, que je n'aie pas bossé toute la nuit pour rien !

— Il y a peu de chances ! Allez, salut les tas de ferraille, et merci encore !

Puis Ronan s'éclipsa à son tour, pour ne laisser qu'Airi et son assistant-domestique sur le parvis de NOVAE. L'androïde sentit un étrange vide en elle. Elle n'avait peut-être passé que quelques heures en compagnie de ses deux nouveaux amis, mais les moments qu'ils avaient partagés ensemble étaient gravés sur son disque dur. Elle les avait même copiés sur le cloud, afin qu'ils ne puissent jamais disparaître, comme une preuve que cette nuit avait bel et bien existé.

— Toute cette histoire est triste, quand même, reprit Astro, pensif. Normalement, Élise Lopez aurait dû l'emporter.

— Pardon ? s'étonna Airi.

— Elle avait deux cents vues de plus que sa concurrente. Mais elle a été accusée de triche en coulisses par la production à cause de la drogue qui avait été saisie dans sa loge. Du coup, la maison de disques, qui l'avait obligée à en prendre au passage, a glissé un gros billet pour étouffer le scandale, et a accepté de laisser une IA remporter le concours.

— Comment sais-tu cela ?

— Parce que son cas n'est pas isolé et même tristement banal, d'après les recherches que j'ai pu effectuer hier tout en piratant la police. Face à la montée des Vocaloids, de plus en plus de studios ont recours au dopage. Le phénomène est loin d'être nouveau, mais il s'est accentué avec la peur que les vedettes soient remplacées par des robots.

Cogito Ergo VivoOù les histoires vivent. Découvrez maintenant