Cogito Ergo Vivo

Chapitre 43: Déclaration de guerre

— Si vous avez besoin d'autre chose, passez-moi un coup de fil. Et n'oubliez pas vos pilules. Trois fois par jour et vous péterez à nouveau la forme d'ici la fin de la semaine !

Iris salua son client du jour avant de retourner à sa tournée. Il ne lui restait plus que trois visites à faire, après quoi elle comptait bien aller se détendre à la nouvelle piscine du quatrième sous-sol.

En parallèle de ses études de droit chrysantien, la jeune femme avait pris goût au bénévolat. Sur son temps libre, elle allait aider volontiers les habitants les plus affaiblis en leur livrant des médicaments, paniers de fruits ou faisait simplement la conversation pour leur tenir compagnie. Pour elle, tous ceux qui avaient choisi de s'exiler sur le continent blanc étaient des héros. Madame Nishijima était une grand-mère qui avait perdu ses enfants durant le conflit et qui avait adopté leurs AIntelects. Monsieur Himmel était un restaurateur qui avait fait le choix de protéger tous ses employés robotiques. Mademoiselle Evans était devenue paraplégique en venant en aide à un androïde vendeur avec lequel elle s'était liée d'amitié. Autant d'histoires qu'Iris avait décidé de compiler dans un recueil de nouvelles. Son but était de faire connaître à tous ces actes passés inaperçus, mais qui avaient pu sauver de nombreuses vies. Elle voulait que, tout comme Osborne et Chloé, le monde d'après n'oublie pas qu'eux aussi avaient apporté leur pierre à l'édifice.

— Et bien, quelle star ! Tu sais qu'on ne me parle que de toi quand je fais ma tournée ?

Iris, empêtrée dans l'organisation des différents paniers, tourna légèrement. Elle découvrit Bruce Spark à quelques mètres d'elle, adossé à sa moto croulant sous les cartons à pizza. L'ancien militaire américain, désormais général de l'armée de Chrysantia, se livrait aux mêmes activités que l'étudiante, à la différence près qu'il s'occupait des enfants les plus défavorisés.

— Vraiment ? Pourtant, je fais que mon boulot, répondit-elle en se frottant la nuque, gênée par le compliment.

— Tu pourrais balancer les fruits sur le pas de la porte sans t'arrêter comme les livreuses UPS.

— Chez moi, c'est Colissimo. Mais justement, je déteste quand mes objets de valeur arrivent en miette, donc raison de plus pour ne pas le faire !

— En tout cas, je suis impressionné que tu trouves le temps d'étudier avec tout ça. Evelyn me tuerait si je faisais pareil...

— Il y a une différence entre discuter avec des grand-mères et attendre les enfants à la sortie des écoles...

— Eh ! Dis pas ça si fort ! On dirait que je suis un type louche ! Je fais mon job, c'est tout !

Iris éclata de rire face à la mine déconfite de son ami.

— Au fait, j'ai appris la nouvelle ! enchaîna-t-elle pour changer de sujet. Félicitations pour ton bébé ! Vous avez déjà des pistes pour le nom ?

— On y réfléchit. J'ai suggéré Tony, si c'est un garçon. Mais Evelyn dit que tout le monde se moquera de lui. Pourtant ça sonne super bien, Tony Spark...

— J'ai comme ma petite idée sur le pourquoi du comment...

— Bah, sinon, si c'est une fille, je l'ai laissée choisir et elle m'a proposé Émeline.

— Je sais pas lequel d'entre vous deux est le pire, ricana Iris.

— Elle, évidemment ! Sérieux, je ne vois pas le problème d'appeler son fils Tony S...

La sonnerie coordonnée des holophone des deux bénévoles le fit sursauter. Iris fut la plus rapide pour afficher le message en provenance d'Airi. Cette dernière leur demandait de la rejoindre au plus vite en salle de réunion de crise.