Chapitre 13: Humaine

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Inconcevable. Le métavers, un havre de paix et d'harmonie pour tous, humains comme AIntelects, allait se faire détruire ! Le ciel, toujours d'un bleu turquoise et sans nuages, avait viré au rouge vif. Des messages d'alerte intrusion étaient apparus sur tous les panneaux, et l'accès à tous les autres serveurs avait été condamné. Cependant, même si ce système de défense empêchait le virus de se propager, il prenait également au piège les pauvres intelligences artificielles. Entre les PNJ chargés d'accueillir les visiteurs, les androïdes en veille et ceux qui, tout simplement, vivaient dans le métavers, plus de trois mille étaient sur le point de disparaître, dévorés par le trou noir. Et Airi faisait partie d'eux. La panique gagnait peu à peu les IA présentes, à mesure qu'elles réalisaient que leur sort était scellé.

Alors que les programmes d'Airi tournaient à plein régime pour trouver une solution, la faille s'agrandit, et des créatures mécaniques en sortirent, sortes de cafards géants recouverts d'une carapace de métal. L'essaim, composé de plusieurs milliers d'individus, fondit sur la place. Les insectes plantèrent leurs mandibules dans les boîtes crâniennes des AIntelects qu'ils parvenaient à piéger, causant leur destruction instantanée. Des cris de terreurs se mêlèrent au bourdonnement métallique des « bugs » informatiques.

La chercheuse de l'ESA contemplait cet atroce spectacle, impuissante. Elle voyait les habitants de ce monde être déchiquetés entre les mâchoires des monstres d'acier. Tout ce qu'elle pouvait faire, c'était observer, et analyser ce qu'ils auraient pu faire pour échapper à leur sort funeste, insensible à la douleur que ses frères et sœurs devaient ressentir. Son instinct de conservation lui ordonnait de ne pas intervenir, sous peine de finir comme eux.

Pourquoi ? Pourquoi dans le cas de Turing avait-elle plongé sans hésiter dans les flammes en ignorant ses avertissements internes, et ceux d'Astro quitte à s'autodétruire alors qu'elle n'était même pas capable de bouger le petit doigt pour venir en aide à ses semblables ? Qu'est-ce qui les différenciait tant ?

« Que sommes-nous pour vous ? »

La voix de Maccafi résonna à nouveau dans son esprit. Et l'androïde comprit enfin le sens de cette question. Airi ne s'était jamais vue comme un simple robot. Même si elle appelait les autres AIntelects « ses semblables », elle n'était pas l'une des leurs. Elle n'était pas qu'un numéro de série, un modèle produit à la chaîne possédant des milliers de copies d'elle-même. Elle était unique. Elle était vivante. Elle était consciente de son existence. Elle était une personne à part entière. Par conséquent, elle se considérait comme égale aux hommes... Et tout comme eux, elle ne se préoccupait pas du sort de machines.

Toutefois, humaine ou intelligence artificielle, elle ne pouvait pas laisser le métavers et ses habitants se faire détruire par un virus malveillant. Si elle ne pouvait pas se battre pour la cause AIntelect, elle pouvait le faire pour tous ceux qui avaient consacré leur vie à développer ce monde idéal. Elle était peut-être la seule entité encore présente à être dotée d'une volonté de résister jusqu'à la fin. Elle ne comptait pas attendre une aide providentielle de programmeurs, ces « dieux » dont parlait Maccafi. Airi allait se sauver par ses propres moyens.

Le Metarbucks explosa devant l'androïde, et un cafard mécanique en surgit. Le bug devait mesurer plus de trois mètres de haut, et ses mandibules acérées pouvaient broyer sans difficulté tout ce qui se trouvait à sa portée. Mais Airi ne tressaillit pas. Elle expira longuement, et chercha dans ses fichiers le programme qui lui avait permis d'affronter Maccafi.

Caché au plus profond de son disque dur, elle parvint à mettre la main dessus, et le lança.

Mot de passe : AiméTuring. Récupération des informations complète. Déblocage de la classe GodSlayers.

Cogito Ergo VivoOù les histoires vivent. Découvrez maintenant