Chapitre 37: Accueil glacial

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Dans l'amphithéâtre, Osborne dispensait machinalement son cours de droit constitutionnel. Par-dessus son habituelle robe, il portait une étrange veste affublée d'un logo en forme de chrysanthème noir. Ce jour-là, la leçon avait été si ennuyeuse que tous les élèves avaient quitté la salle, à l'exception d'Iris. La jeune fille était seule au premier rang, comme clouée sur sa chaise. Elle ne pouvait ni se lever ni même détacher son regard du tableau.

— Mademoiselle Sodan, pouvez-vous m'expliquer la différence entre l'AVO et nous ? tonna le juge d'une voix forte.

— Par... Pardon ? bégaya l'intéressée, déconcertée.

— Vous ne savez pas. C'est bien dommage pour vous. Dans ce cas, je vous propose un stage en Antarctique pour vous rafraichir la mémoire.

Un trou noir s'ouvrit sous les pieds d'Iris. L'étudiante fut aspirée à l'intérieur. Elle voulut crier, mais aucun son ne sortit de sa bouche. Alors qu'elle dégringolait dans ce tunnel sans aucune accroche pour ralentir sa chute, un profond sentiment de solitude s'empara d'elle. Iris était seule dans son calvaire. Elle était condamnée à sombrer vers les abysses.

Après un temps qui lui parut durer une éternité, la jeune femme atterrit avec douceur sur un sol entièrement gelé. Devant elle se dressaient trois croix de bois plantées dans la glace.

Iris, terrifiée, recula d'un pas. C'est alors qu'elle sentit une pression sur mollet. Elle découvrit avec horreur une main squelettique sortir de terre qui essayait de l'attirer à elle. Elle se débattit de toutes ses forces jusqu'à briser les os et extirper le reste du corps de son tombeau souterrain. Iris reconnut immédiatement la chevelure blonde sur le crâne dénué de chair de ce qui avait été un jour Marguerite Sodan, sa propre mère.

— Je dois te purifier. Les AIntelects t'ont corrompue.

Iris tenta de s'enfuir. Mais à peine se fut-elle retournée qu'elle heurta quelque chose et tomba à la renverse. Debout face à elle se tenait Chloé, le visage décharné, vêtue de son uniforme de guerre en haillon, maculé de son sang au niveau de sa poitrine trouée.

— Pourquoi as-tu choisi ce chemin, Iris ? gémit son amie. Si ton père n'avait pas attaqué Airi, je serais encore en vie...

La fille du martyr enfouit sa tête entre ses mains et se roula en boule, ses joues couvertes de larmes de culpabilité.

— Je sais ! sanglota-t-elle. Je suis désolée. Tout ça, c'est ma faute.

CC se retourna sans ajouter un mot. Son corps se fondit dans le blanc du décor, comme un mirage s'estompant lentement au coucher du Soleil. Iris se précipita vers elle pour tenter de la retenir, mais elle passa à travers.

— Attends ! S'il te plait, ne pars pas ! J'ai besoin de toi ! Tu étais la dernière qu'il me restait ! Je ne veux pas... Je ne veux pas être à nouveau seule, pitié... Chloé !

Iris ouvrit ses paupières en sursaut. Ses propres cris l'avaient réveillée. Sa respiration était saccadée, son rythme cardiaque aussi élevé que si elle avait couru un marathon. Elle suait à grosses gouttes. Son visage était trempé de transpiration mêlée à ses larmes. Sa gorge était sèche, ses yeux rougis. Tout son corps était en proie à des spasmes incontrôlables qu'elle ne put calmer qu'après de longues secondes de concentration.

Lorsqu'elle regarda autour d'elle, elle ne reconnut rien. Elle se trouvait dans une pièce semblable à une chambre d'hôpital, aux murs entièrement blancs, sans fenêtre. À côté d'elle, un moniteur relié à sa tension affichait une courbe en dent de scie. Sur une table de chevet, quelqu'un avait déposé quelques pâtisseries, dont des cookies aux trois chocolats. Les préférés d'Iris. Cependant, quelque chose interpela la résistante. Si elle avait cru être dans une clinique banale du continent à première vue, plusieurs appareils de haute technologie étaient éparpillés un peu partout pour mesurer différents paramètres de manière autonome. De même, plusieurs mains robotiques s'occupaient de la maintenance de son bras mécanique, réparant les diverses fissures et polissant sa surface. Enfin, sur sa tête de lit, elle repéra un logo, un chrysanthème noir et tout s'enchaîna dans son esprit.

Cogito Ergo VivoOù les histoires vivent. Découvrez maintenant