48. Panique à bord

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LOUIS PDV.

Je fais les cent pas au pied de son immeuble, tirant nerveusement sur ma clope. Qu'est-ce qui m'a pris putain ? Tout se déroulait pourtant très bien entre nous. Pourquoi a-t-il fallu que je fasse tout foirer ?

******

1h35 plus tôt.

- Pousse-toi bébé s'il te plaît, faut que j'aille fumer !

Harry descend de mon corps et relâche son étreinte. Je suis arrivé deux heures plus tôt chez lui et on s'est sauté dessus comme prévu. On a baisé comme prévu. Une fois sur la table, une fois sur le canapé. Et les deux fois on a joui comme prévu.

À présent, il me faut ma dose de nicotine alors je me rhabille vite fait et je sors sur le balcon m'en griller une. J'aime la vue depuis l'appartement d'Harry. On voit la ville s'étendre de nos pieds jusqu'à l'horizon. Ça ne vaut pas mes vignes mais j'aime imaginer toute cette vie qui se déroule juste sous notre nez : des gens qui bossent, des amis qui rigolent, des couples qui s'engueulent, d'autres qui baisent et qui s'aiment. 

Je me retourne pour jeter un coup d'œil dans l'appartement. Harry est resté allongé sur le sofa. Ses yeux sont fermés, et il étend le bras en tâtonnant pour attraper sa guitare qui repose au pied du canapé. 

Comme d'habitude, il est nu, son corps tatoué offert à mon regard. Mes yeux ont de plus en plus de mal à se détacher de sa peau. 

Il est couché sur le dos, un de ses pieds encore posé au sol. L'instrument sur son ventre, il se met à jouer tout bas et à chanter dans un murmure.

De mon spot, c'est à peine si les notes me parviennent mais je contemple ce spectacle presque muet. Ses mains pleines de bagues, ses ongles colorés qui dansent sur les cordes. 

Je ne sais pas ce qu'il chante mais ses sourcils sont un peu froncés, comme si un voile d'inquiétude s'était posé sur son visage.

Je me demande si lui, le célèbre musicien, chante souvent juste pour lui. Pas pour d'autres, pas pour le travail, mais juste pour lui. En le regardant comme ça à travers la vitre, j'ai subitement l'impression de saisir un instant de parfaite intimité. Comme s'il était seul chez lui et que je n'étais pas là.

Je sais que j'ai, en cet instant, en face de moi, le vrai Harry. Pas la personne qu'on compose tous en public, en essayant d'être charmant, plaisant, poli, drôle, agréable et je ne sais quoi encore. Non, c'est juste le vrai lui. 

J'ignore alors que je vais avoir, dans les années qui suivront, de nombreuses autres occasions de saisir de tels instants authentiques et qu'à chaque fois, je m'en émerveillerai.

Pour l'instant, c'est la première fois que je le vois ainsi et ce que je vois me plaît drôlement. Alors que je tire une latte sur ma cigarette, je ne peux en arriver qu'à cette conclusion : il est magnifique.

Ce n'est pas nouveau. Je dis toujours que je trouve Harry "diablement" beau, comme si, derrière, il y avait des notions de péché, d'interdit, de luxure, de tentation et de douce torture. Mais en cette fin d'après-midi, il n'est pas diablement beau. Il est beau comme un ange.

Machinalement, je lève mes mains devant mon visage pour former comme un cadre et je prends une photo mentale de cette scène, comme le feraient un photographe ou un réalisateur. Je capture l'image, pour la garder toujours en mémoire.

Et je fume ma cigarette lentement, pour profiter de ce que je vois le plus longtemps possible.

Lorsqu'Harry m'entend faire coulisser la porte fenêtre, il s'arrête de jouer et ouvre un œil pour me regarder entrer.

L'acteur que j'aimais || LARRY Où les histoires vivent. Découvrez maintenant