95. Sanctuaire

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Sa silhouette se dessine malgré la pénombre et il approche doucement.

Je baisse la tête pour contempler le fond de mon verre et je souffle de soulagement. Plus tôt dans la soirée, j'étais sûr à 95% qu'il viendrait. Mais cela fait presque 1h45 que tout le monde est allé se coucher. Alors, pendant que j'attendais comme un con assis sur ce muret, ma confiance est descendue à 15 % et j'ai bien cru qu'il ne viendrait pas.

J'esquisse un sourire alors qu'il n'est plus qu'à quelques pas de moi. Mais Louis passe devant moi sans un regard.

- Pas ici, il lâche en continuant à avancer tout en allumant sa clope. Et il traverse le jardin avant de descendre les marches qui mènent plus loin au coin piscine.

Il joue la carte de la prudence. De nombreuses fenêtres donnent sur l'espace où l'on a mangé. Peut-être que sa chambre est orientée de ce côté-ci. La chambre où dort le doc.

Louis ne veut pas qu'on nous voie ensemble.

Je me relève, j'avale la fin de mon verre et je le laisse sur le muret avant de suivre Louis.

Ce dernier s'est arrêté à quelques pas de la piscine, près du local technique. Je stoppe à son niveau et je m'adosse au mur. J'ai un peu bu et ça ne me fait pas de mal de me poser contre quelque chose.

Le châtain regarde un peu plus loin, le corps pas vraiment tourné vers moi. Il tire nerveusement sur sa cigarette. La lune et la piscine restée allumée éclairent son visage. Ses traits sont durs. Sa mâchoire est crispée, ses sourcils froncés, ses gestes abruptes.

Il est clairement en colère.

Pour ce que j'ai fait un peu plus tôt dans l'après-midi ? Parce que je le fais ressortir dans la nuit et qu'il risque d'avoir des problèmes avec son mec ? Ou alors parce qu'il se rend compte que je suis sa faiblesse et qu'il déteste ça ? Sûrement les trois.

Il avale la fumée de sa cigarette et, après quelques secondes, expire le tout.

- Tu t'es bien fait troncher ?

Sa voix cassée coupe comme des lames de rasoir. Ses mots traversent l'obscurité et viennent me percuter de plein fouet.

Louis n'est pas en colère. Il est hors de lui.

Il cherche l'affrontement alors qu'on devrait plutôt discuter lui et moi. Je ne devrais pas répondre à ses attaques. Je devrais le calmer.

Mais je suis triste et jaloux et amoureux ; et je suis content de le voir lui aussi triste et jaloux, alors que je ne suis pas son mec. Son vrai mec dort un peu plus loin.

S'il est jaloux, ça veut dire qu'il est amoureux lui aussi, non ?

- C'était bien, ouais, je lui réponds en le défiant du regard.

Louis me fixe. Il laisse passer quelques secondes et tire à nouveau sur sa clope en faisant "non" de la tête, comme s'il désapprouvait ce que j'ai fait et ce que je dis. Son regard change. Il m'observe maintenant avec dégoût.

- Vous l'avez vraiment fait ? Ne te fous pas de ma gueule, Harry ! il me menace en pointant sa cigarette vers moi.

Il sait que Mike est un top et qu'il n'est pas versatile. Mais il espère encore qu'on s'est arrêté avant. Qu'on en est resté au stade des caresses. Au pire, de la pipe. Mais pas plus loin.

Il ne veut pas l'imaginer. Il ne peut pas le concevoir. Il a peur de ça. Il espère, il rêve, qu'aucun autre homme ne m'a pénétré. Qu'il est le dernier, à jamais.

Mais on n'est pas à Disney. Ni dans un rêve.

- Oui, Louis, on l'a fait, je réponds sur un ton exaspéré. On n'a pas enfilé des perles. Il m'a baisé contre un bureau, puis sur le lit.

L'acteur que j'aimais || LARRY Où les histoires vivent. Découvrez maintenant