Chapitre 7 - Douleurs

1K 32 24
                                    





PDV Alma


J'ai pris cette habitude de l'observer dormir. C'est apaisant. Il a l'air tellement en paix.

Comme si son corps n'avait jamais enduré tous ces coups.
Comme si son âme n'était pas entaillée de tous les côtés.
Comme si les battements de son cœur n'étaient pas comptés.

Mais pourquoi il a pris ces foutus médocs.

Cette habitude s'est installée très tôt. Dès que j'étais en âge de comprendre que je n'étais pas en mesure de réparer son coeur.
Ni même d'être docteur Maboul.
Voir sa poitrine se lever à chacune de ses inspirations me rassure.

Installée près de lui sur son lit, je parcours son visage des yeux.
Ses boucles brunes retombent sur son front, cachant d'anciennes cicatrices. Ses sourcils bien garnis sont détendus, abandonnant toute trace de tension. Quelques légères tâches de rousseur à peine visible constellent ses narines. Ses joues sont légèrement creusées, attestant de la fatigue accumulée au fil des années.

Pourtant, même dans son sommeil, il garde une expression sereine, comme s'il était en paix avec le monde qui l'entoure.

Mes doigts commencent délicatement à se perdre dans ses boucles entremêlées. Petite, j'adorais jouer avec et même aujourd'hui, cette habitude est restée.
Au bout de quelques secondes, j'ôte tout de même mes doigts pour ne pas briser son sommeil.

Ni briser les rêves qu'il est en train de bâtir dans sa tête.

- T'arrêtes pas continues...

Surprise d'entendre le son de sa voix, je sursaute.

-Quoi ? Je fais si peur que ça ? Marmonne-t-il en ouvrant les yeux.

J'ai comme une remontée de larmes. Et pour une fois, ce sont presque des larmes de bonheur.

Il a enfin la force de parler...

Ces derniers jours, son état s'était stabilisé.
Cependant, il n'avait pas la force de faire quoi que ce soit. Alors le voir parler si fluidement, sans aucun effort, a été le plus beau cadeau qu'il puisse me faire.
Le savoir en vie est une bénédiction.

- Tu t'en rends compte seulement maintenant ?

Il m'adresse un léger sourire. Puis, il essaie de se redresser sur ses coudes mais je l'en empêche. Je cale le coussin sur la tête de lit et l'aide à s'asseoir.
Il prend ma main dans la sienne, puis joue avec mes bagues. Après un long silence, il brise la glace.

- Pourquoi t'es revenue ?

Il y a trois ans, Alvaro a dû me supplier d'accepter de quitter cet endroit. Cet enfer.
Et je l'ai fait. Je l'ai abandonné.

- Tu sais Alma, on ne guérit jamais dans l'environnement qui nous a brisé.

- Comment guérir lorsque la vraie source du problème se trouve ici et ici. Dis-je en pointant mon cerveau et son cœur. Et si il n'y avait aucun moyen de guérir ?

-Tu avais la possibilité de rester loin de tout ça... Pourquoi replonger dans ce monde aussi sombre ?

-Peut être que je ne l'ai jamais quitté... Tu savais que papa me surveillait ? Chaque jour, il n'y avait pas une seule seconde où ses hommes ne me surveillaient pas.

Il ne répond rien. En même temps, connaissant le monstre, ce n'est pas étonnant.

- Pourquoi... Pourquoi tu as... Tu voulais mourir ?

Les larmes se mirent à couler sans que je ne puisse les retenir.
Comme si chacune de mes larmes représentait une goutte d'acide, Alvaro s'empressa d'essuyer chacune d'entre elles.

Almas CaídasOù les histoires vivent. Découvrez maintenant