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L'air était glacial et le chauffage avait été mis à fond pour réchauffer la villa. Malkia, assise sur une chaise près de la fenêtre donnant sur la forêt à l'extrémité gauche de la maison, la tête collée sur la vitre froide et embuée, écoutait au loin Sonia ranger la vaisselle qui avait été utilisée pour le repas de Noël de la veille.

En effet, hier était le 25 décembre, jour de la naissance du Christ, et d'après ce que lui avait dit la gouvernante, il était de tradition pour Matteo, comme partout dans le monde, de partager une bûche de Noël avec ses amis. Toujours d'après Sonia, Matteo avait des amis, même s'il ne le disait pas ouvertement ; il les considérait comme tels, voire même comme ses frères d'armes.

Hier, donc, autour de la table dressée par Sonia - une magnifique table, d'ailleurs, très conviviale, chaleureuse et familiale, un véritable paradoxe et une superbe hypocrisie quand on regardait la situation : des mafieux qui fêtaient la naissance du Christ ? ! Elle avait fait la connaissance, sans le vouloir, de Giorgio, le bras droit de Matteo, de Lorenzo, un gros blagueur toujours détendu, et de Joachim, le « ronchon », comme disait Lorenzo ; il aimait beaucoup se payer sa tête.

Elle émit un petit rire en repensant à cette soirée hors du commun, sans sapin, sans décoration, mais avec beaucoup de rires. Même si elle n'avait pas participé, cela ne l'avait pas empêchée de profiter, tout en restant dans son coin. Elle se rappelait des multiples tentatives de Lorenzo et de Giorgio de la faire participer, mais en vain. Matteo s'était contenté de sourire et de la regarder du début jusqu'à la fin, un comportement vraiment agaçant, un véritable pervers. Et Joachim, lui, mangeait dans son coin, écoutant d'une oreille attentive ses amis, qui n'hésitaient pas à lui lancer des piques dont il répondait à certaines ; il avait même lancé quelques blagues, pourries, mais c'était au moins ça.

À l'heure du jeu, elle s'était retirée dans sa chambre ; elle en avait déjà assez donné comme ça. Elle n'attendait plus que Sonia chante, signe qu'elle en avait terminé avec sa tâche. Elle avait constaté que la vieille dame aimait bien chantonner en faisant la vaisselle ; maintenant, elle devait sûrement être dans la buanderie pour la lessive ; il y avait des aides ménagères pour cela, mais elle aimait le faire.

Elle ouvrit la bouche pour laisser son souffle se déposer sur la vitre, et de son doigt, elle dessina un cœur ; elle ne savait pas pourquoi ce dessin, elle avait juste suivi la trajectoire de son doigt sans plus. Derrière son dos, elle entendit des pas arriver, mais ne se concentra pas plus dessus.

— Serait-ce une déclaration, mia regina ? demanda Matteo d'une voix sensuelle, les mains dans les poches.

— On évolue ; ce n'est plus comment déjà... prici... princi... princicessa  ?

Elle cherchait la bonne prononciation du surnom qu'il lui répétait tant, mais n'étant pas italienne d'origine et ne parlant pas cette langue, c'était compliqué.

L'homme pouffa de rire, se moquant ouvertement de sa mauvaise prononciation et de l'imitation grossière de l'accent italien ; il devrait lui porter plainte pour ce manque de respect envers sa patrie.

— Principessa, mia regina, la corrigea-t-il. Oui, hier, en faisant quelques recherches, j'ai découvert que ton prénom signifiait « Reine », et il te va à merveille, une reine pour un roi.

— Tu n'as rien d'autre à faire, comme gérer tes affaires illégales, tuer tes ennemis et je ne sais quoi d'autre.

— Tu sembles beaucoup informée ; ne s'intéresserait-on pas par hasard à l'affaire familiale, cara mia ? La taquina le mafieux.

— Je vois beaucoup de films, c'est tout, et puis qu'est-ce que tu veux ? Qu'est-ce que tu fous là ?

— Je dois aller au club, j'ai quelques affaires à régler là-bas, l'informa-t-il en regardant sa montre luxueuse accrochée à son poignet.

Perfect AddictionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant